IL EST AMUSANT de rappeler que Bergson a dit que tout philosophe était l’homme d’une seule idée. On cherchera bien sûr à lui appliquer cette affirmation. Dès sa thèse « Essai sur les données immédiates de la conscience » (1889), Bergson construit une ligne de pensée impeccable. Première donnée, irréfutable, car elle est là : la Sensation. Ensuite, deux ou trois états de conscience s’enchaînent, et c’est la durée, ce flux ininterrompu, la mélodie de notre vie intérieure, qui fait qu’on change sans cesse, sans pourtant que cela ressemble à une ligne segmentée. Ma tristesse actuelle, il faut bien que j’en sorte, va peu à peu se muer en vague intérêt, et imperceptiblement peut m’amener à la gaîté.
Mais l’Espace, la pensée « partes extra partes », autant dire, la matière, va gagner les représentations des philosophes (on dit « Pierre est plus profond que Paul »).
Matière et esprit.
Tout le bergsonisme se déduit de cette opposition entre la Matière, lieu de l’action indispensable (c’est la dette à l’égard du pragmatisme de William James), et l’Esprit, l’énergie spirituelle, force qui meut l’espace et le temps ; la pensée est liée au cerveau, mais ne se réduit pas à l’écorce cérébrale, la condition n’est pas la cause.
Il en résulte, pour le plus exaltant, une philosophie de la liberté, l’esprit caracole vers une spiritualité proche du religieux. Pour le pire, Bergson sera vers la fin de sa vie tenté par les expériences spirites, un aboutissement pas forcément catholique ... « Notre philosophe juif », disait-on dans les sphères pétainistes. De fait, Bergson envisageait une conversion au catholicisme et, bien sûr, renonça au moment de l’Occupation à ce qui aurait pu passer pour une lâcheté. Une lâcheté dont était peu suspect ce petit homme discret, dont les cours au Collège de France (1900-1914) entraînèrent un succès mondain parfois ridicule.
Il faut se souvenir qu’il convainquit Woodrow Wilson de la nécessité de l’entrée en guerre des États-Unis lors du premier conflit mondial, qu’il obtint le prix Nobel de littérature en 1927, ce qui doit étonner de la part d’un philosophe, et que toute sa pensée est dans un merveilleux petit livre écrit en 1900, « le Rire ».
Nous rions des pantins, chaque fois que la souplesse de l’esprit est télescopée par le raide, le mécanique, la stupidité du matériel. C’est le fonctionnaire chez qui chez Courteline exige, en nous voyant, des preuves de notre existence au travers de documents.
La fraîcheur tuée par le grinçant, cela doit être ceci la fameuse idée, matrice de toute le reste.
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