* Impossible d’ignorer « Anéantir » , ce livre-objet d’une élégante raideur présenté comme l’événement de la rentrée littéraire, doublement signé Michel Houellebecq (son 8e roman après le prix Goncourt obtenu en 2010 pour « la Carte et le territoire »), puisqu’il en est l’auteur mais aussi le directeur artistique. Le récit se situe avant Noël 2026, lorsque des vidéos d’attentats hyperréalistes affolent le Net, dont celle de la décapitation du ministre de l'Économie, appelé à remplacer le Président qui arrive au bout de son second mandat et que sert fidèlement un certain Paul Raison. Ce simulacre de polar d’espionnage et d’anticipation ne semble là que pour maintenir l’intérêt d’une fiction dans laquelle ce dernier, haut fonctionnaire quinquagénaire et assez terne, se fait le porte-parole de l’auteur selon deux directions et d’innombrables considérations. On entre d’une part dans la sphère politique où l’ami Paul œuvre sans sourciller pour installer, au lieu du grand argentier jugé pas assez charismatique, un très populaire animateur de télé. Et on prend le chemin de la France profonde, le Beaujolais, après que le père de Paul, un ancien des services secrets, a été hospitalisé à la suite d’un AVC. Sans enthousiasme mais avec curiosité, l’énarque renoue avec sa famille, sa sœur au foyer et son époux notaire licencié, tous deux fervents catholiques, son jeune frère marié à une journaliste gauchiste et vraie harpie, sa belle-mère effacée… Autant de figures qui sont prétexte à d’infinis – et souvent déplorés – constats sur les changements du monde et de la société. (Flammarion, 730 p., 26 €)
* Face à Houellebecq, on peut, pour mettre l’eau à la bouche citer quelques noms : Frédéric Beigbeder, Philippe Besson, Michel Bussi, Philippe Delerm, David Foenkinos, Maylis de Kerangal, Pierre Lemaître, Nicolas Mathieu, Pascal Quignard, Leïla Slimani, Joy Sorman, Jean Teulé, Karine Tuil… Mais le roman le plus actuel est sans doute « Rentrée littéraire », une fiction d’Éric Neuhoff très réaliste. Un couple d’éditeurs plus très jeunes est en passe de vendre – ou pas – sa maison d’édition à un grand groupe. L’auteur, journaliste (« le Figaro », « le Masque et la Plume ») et, avec une trentaine d’ouvrages, lauréat de nombreux prix, n’a eu aucun mal à se placer du côté de l’éditeur ou de l’écrivain. C’est évidemment un roman nostalgique, le temps a fait son œuvre. Tout s’use et disparaît, sauf l’amour de ce couple, plus fort que la vocation d’éditeur. (Albin Michel, 201 p., 19,90 €)
* Auteur de plus d’une dizaine de livres (« 37, étoiles filantes ») et parolier reconnu, Jérôme Attal met en scène dans « L'Âge des amours égoïstes » un Parisien plutôt bobo rive gauche à l’heure de s’engager dans la vraie vie : il a 26 ans, il n’est pas plus intéressé par ses études d’histoire de l’art qu’on lui donne poliment l’occasion de conclure que par son statut de chanteur dans un groupe qui de toute façon se sépare. Seule le fascine Laura, aussi insaisissable que ses projets d’avenir. Un roman d’apprentissage écrit à la première personne et qui court sur une année. (Robert Laffont, 219 p., 19 €)
* Après plus d’une centaine de romans et autant de nouvelles et de textes divers, Jean-Bernard Pouy, le créateur du Poulpe, célèbre enquêteur littéraire, et l’adepte de l’Oulipo qui a fait les beaux jours des « Papous dans la tête » sur France Culture, reste à 76 ans un défenseur opiniâtre du roman noir. « En attendant Dogo », référence à Beckett, évoque un certain Étienne, un écrivain qui n’écrivait que des débuts de romans et que sa famille n’en finit pas d’attendre depuis qu’il a disparu. Quand, lassée, sa sœur part à sa recherche à travers une France déboussolée, c’est le début d’une épopée sociale et humaine où le burlesque côtoie la tendresse. Inclassable, comme toujours. (Gallimard, 201 p., 18 €)
* Dans « Médée chérie », l’anthropologue franco-marocaine Yasmine Chami se penchait sur la douleur d’une femme abandonnée dans un aéroport. « Dans sa chair » en est la suite, qui interroge cette fois le mari, un neurochirurgien estimé et engagé, un homme loyal qui a pourtant abandonné son épouse artiste tendrement aimée, parce qu’il a été pris de passion pour Meriem, son étudiante devenue sa consœur. Ce texte explore la vérité de l’être, « ce moment de la vie d’un homme, où la force de vivre s’exprime avec une sauvage nécessité », et interroge plus largement les enjeux du désir et de la liberté. (Actes Sud, 191 p., 19 €)
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