Sur la vaste scène bastillane, un spectacle venu du Festival de Salzburg, au décor impressionnant et très intelligemment utilisé malgré une surcharge d’accessoires qui frise parfois le bric-à-brac : « les Maîtres Chanteurs de Nuremberg », le plus long des opéras de Wagner, un retour très attendu après 27 ans d’absence.
Il y a plusieurs raisons pour ne pas laisser passer cet excellent spectacle signé du metteur en scène norvégien Stefan Herheim. D'abord parce que l’unique comédie de Wagner, qui compte énormément de personnages, de figurants et de choristes, est rarement montée, même sur les scènes allemandes. Mais surtout parce qu'Herheim donne à voir l’œuvre telle qu’elle est dans sa germanité au meilleur sens du terme. Pas besoin d’y ajouter allusions ou uniformes nazis pour faire passer le message, qui est clair : Wagner a voulu exalter son amour pour le Saint Art Allemand et l’a fait magistralement, certes en près de cinq heures de musique, mais avec le théâtre le plus intelligent et savoureux.
La réalisation musicale est aussi digne d'éloges. Avec l’Orchestre de l’Opéra de Paris et ses chœurs en état de grâce, sous la direction à la fois légère, transparente et tendue de Philippe Jordan. Et les quatre rôles les plus importants parfaitement tenus, avec le formidable Hans Sachs de Gerald Finley, Brandon Jovanovich dominant le rôle écrasant de Walther, Bo Skovhus (que l’on retrouvera en mai-juin dans le « Lear » de Reimann) dans une forme olympienne en Beckmesser et l’Eva de Julia Kleiter. À ne pas manquer.
Un attelage contestable
À Garnier on donne dans l’expérimental ! Le projet de confier au metteur en russe Dmitri Tcherniakov, trublion célèbre mais jamais meilleur que dans l’opéra russe, le doublé « Iolanta » et « Casse-Noisette » de Tchaïkovski, flanqué pour ce dernier de trois chorégraphes (ils étaient cinq dans le projet d’origine). Ces deux œuvres ont été créées le même soir de décembre 1892 au théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg et, Tcherniakov l’affirme après avoir examiné les archives, elles sont de la même veine, même si l’usage leur a confié des destinées séparées.
« Iolanta », qui conte la destinée de la fille du roi René de Provence, née aveugle et guérie par amour, commence à quitter son statut de rareté du répertoire et c’est heureux, car c’est un petit bijou. Sa représentation, passée à la moulinette Tcherniakov, c’est-à-dire transposée à l’époque de sa création dans un salon bourgeois, avec une direction d’acteurs millimétrée et virtuose, est saisissante.
Mais Tcherniakov y enchaîne brutalement le ballet « Casse-Noisette » grâce à un artifice : l’on y retrouve les mêmes personnages dans les mêmes costumes. À vouloir faire se ressembler deux ouvrages si dissemblables, on leur fait perdre leur spécificité. On assiste, un peu amusé d’abord puis vite lassé, à une mouture très superficielle du ballet. Les danseurs du BOP font de leur mieux (Marion Barbeau très émouvante, Stéphane Bullion méconnaissable et perruqué, Nicolas Paul, Alice Ravenaud), les chorégraphes (Édouard Lock, Sidi Larbi Cherkaoui, Arthur Pita) aussi, mais la mise en abyme fait long feu. On n'absorbe pas un chef-d’œuvre aussi populaire dans une idée aussi étroite.
La direction musicale d’Alain Altinoglu, plutôt lyrique dans « Iolanta », déçoit dans « Casse-Noisette ». On ne s’improvise pas aussi vite chef d’orchestre de ballet, il s’agit d’un emploi bien particulier. Superlative en revanche la distribution russe de « Iolanta », vraie raison de voir ce spectacle hybride : Sonya Yoncheva est bouleversante dans le rôle-titre et on peut admirer aussi la basse Alexander Tsymbalyuk (Roi René), le jeune ténor Arnold Rutkowski (Vaudémont) et Vito Priante (le médecin Ibn-Hakia).
« Les Maîtres Chanteurs » jusqu’au 28 mars (à 17 h 30), diffusion sur France Musique le 30 avril à 19 h 30. Tchaïkovski jusqu’au 1er avril (à 19 heures), sur France Musique le 26 mars à 19 heures Tél. 0892.89.90.90, www.operadeparis.fr.
DJ et médecin, Vincent Attalin a électrisé le passage de la flamme olympique à Montpellier
Spécial Vacances d’été
À bicyclette, en avant toute
Traditions carabines et crise de l’hôpital : une jeune radiologue se raconte dans un récit illustré
Une chirurgienne aux nombreux secrets victime d’un « homejacking » dans une mini-série