À Paris

La saison lyrique s'achève en beauté

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Publié le 01/07/2019
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Cl-Iphigénie H

Cl-Iphigénie H
Crédit photo : VINCENT PONTET/THÉÂTRE DES CHAMPS-ÉLYSÉES

CL-Madame Favart (L)

CL-Madame Favart (L)
Crédit photo : STEFAN BRION

La dernière production lyrique de la saison de l’Opéra de Paris au Palais Garnier (1), « Don Giovanni », de Mozart, était confiée à Philippe Jordan et au metteur en scène de théâtre belgo-néerlandais très en vogue Ivo van Hove. Pour cette coproduction avec le Metropolitan Opera, Van Hove a renoncé à toute extravagance et même opté pour un procédé qui a déjà fait de l’usage, situant l’action dans une Espagne mafieuse. La direction d’acteur suit fidèlement l’action en costumes de ville, dans un décor spectaculaire de Jan Versweyeld.

La seule réserve portera sur une distribution pas tout à fait à la hauteur des prétentions tarifaires de l’Opéra de Paris. Seule la Zerline d’Elsa Dreisig et l’Ottavio de Stanislas de Barbeyrac l’étaient. La très belle tenue de l’Orchestre, sous la direction très intense de Philippe Jordan, conférait son excellent niveau à cette représentation.

Sur la même scène, quelques jours plus tard, la soirée du Ballet de l‘Opéra de Paris consacrée à Mats Ek. Avouons une certaine déception face à une « Carmen » un peu datée et deux créations pas entièrement à la mesure de la réputation de cet excellent chorégraphe suédois.

Une mémorable Iphigénie

La sensation de cette fin de saison sera venue du Théâtre des Champs-Élysées, qui a repris la production d'« Iphigénie en Tauride » de Gluck réalisée par Robert Carsen pour le Lyric Opera de Chicago. L'œuvre, qui condense tous les ingrédients de la tragédie grecque, religion, sacrifice, barbarie, amitiés viriles, est une des plus belles réussites de l’opéra du XVIIIe siècle. Carsen en propose une vision sombre, dépouillée, très crédible, avec des éclairages virtuoses.

L’équipe de chanteurs était somptueuse, avec la prise de rôle époustouflante du mezzo-soprano Gaëlle Arquez, magnifique Iphigénie, et Stéphane Degout, Oreste d’immense tenue. Le chef allemand Thomas Hengelbrock dirigeait avec style et raffinement le Balthasar Neumann Chor & Ensemble. Une production qui restera mémorable sur la scène de l’Avenue Montaigne.

Le charme Offenbach

Le 7e Festival Palazzetto Bru-Zane à Paris aura quant à lui offert bien des découvertes. Notamment, à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Jacques Offenbach, la résurrection de « Madame Favart », en coproduuction avec l’Opéra Comique. Si Offenbach n’est jamais aussi bon que lorsqu’il brocarde la société et le pouvoir de son époque, avec « Madame Favart », il faisait en 1878 un retour au genre opéra comique, sur un livret de Duru et Chivot beaucoup moins mordant et concis que ceux du tandem Meilhac-Halévy.

L’œuvre est charmante, avec son propos historique et alambiqué (les démêlés de l’actrice Justine Favart avec le Maréchal de Saxe), mais un rien longuette. D’autant que la sociétaire de la Comédie-Française Anne Kessler, qui l'a mise en scène, n’a pas retranché une ligne des dialogues parlés. Mais elle a soigné la direction d’acteurs, la diction et la crédibilité.

La réalisation musicale était excellente, avec une distribution réunissant Anne-Catherine Gillet, Franck Leguérinel et Éric Huchet. Le chef Laurent Campellone se tirait habillement du piège acoustique inhérent à la fosse beaucoup trop sonore du théâtre, en dirigeant avec finesse, et sans couvrir les chanteurs, l’Orchestre de Chambre de Paris.

Autre découverte due à la fondation basée à Venise, l’opérette « Mam’zelle Nitouche » d’Hervé, donnée après une tournée française au Théâtre Marigny, avec la troupe spécialisée Les Frivolités Parisiennes. Dans une mise en scène de Pierre-André Weitz plutôt déjantée mais qui véhiculait trop de clichés pour rendre justice à une musique dont le charme mérite plus de tact.

(1) « Don Giovanni » jusqu’au 13 juillet, Mats Ek jusqu’au 14, www.operadeparis.fr

Olivier Brunel

Source : Le Quotidien du médecin: 9762