Juin 2019. Après de longs mois d’un travail inédit, de formalités administratives, d’une logistique sans précédent, cinq détenues du quartier des longues peines de la maison d’arrêt des Baumettes, à Marseille, se produisent dans le Centre chorégraphique national Pavillon Noir d’Aix-en-Provence, puis au Festival Montpellier Danse.
Leur chorégraphie s’appelle « Soul Kitchen », d’après la chanson des Doors, et est signée… Angelin Preljocaj. Le chorégraphe français d’origine albanaise qui a créé « le Parc » pour l’Opéra de Paris, « la Stravaganza » pour le New York City Ballet, « Roméo et Juliette », avec le dessinateur Enki Bilal, pour le Ballet de l’Opéra de Lyon, « le Voyage d’hiver » pour la Scala de Milan, « Blanche Neige » et « les Nuits » pour sa compagnie, les Ballets Preljocaj, et tant d’autres chorégraphies cultes. Et qui, entre deux tournées avec ses danseurs, va se produire dans des lieux moins institutionnels, dont les maisons d’arrêt.
Un jour, il a lancé l'idée d’organiser un atelier de danse dans une prison de femmes, afin de tenter de redonner une autre vie à ces corps privés de liberté, d’espace vital, ankylosés, et dont tous les sens sont entravés. Cinq femmes, qui n'avaient jamais dansé auparavant, se sont accrochées à ses exigences de chorégraphe, partant de zéro pour aboutir à un résultat époustouflant. Il est dommage que le spectacle n’ait pas été capté, mais on en voit des bribes dans le documentaire réalisé par Valérie Müller.
La plus belle expérience
Filmé pendant les quatre mois de préparation, gestation, répétition et éclosion de « Soul Kitchen », « Danser sa peine » montre le long cheminement de Sylvia, Sophia, Malika, Esther et Lili, aussi attachantes les unes que les autres. Cela n’a pas été un long fleuve tranquille : remise en question de son propre corps, de son ego, de son rapport aux autres. Mais in fine une expérience qu’elles décrivent toutes comme la plus belle de leur vie. Même si après la lumière il a fallu rentrer dans l’ombre, leur existence a été bouleversée.
Si le mérite des détenues est immense, il faut tirer son chapeau à Angelin Preljocaj d’avoir eu cette idée humanitaire et d'avoir mené à bien ce projet avec une patience de fourmi et la détermination qu’on lui connaît, grâce aussi à l’administration pénitentiaire, qui a soutenu ce projet fou.
Le documentaire montre aussi la réalité d’une maison d’arrêt, ici loin du cliché des prisons sombres et surchargées, et permet de comprendre tout ce que la privation de liberté implique, y compris dans l’épanouissement du corps. Une leçon d’humanité et de rédemption.
France 3, jeudi 26 mars, 23h25
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