« Les Français, les Anglais, les Allemands, les Russes, les Chinois ont une langue à eux. Et nous en avons une aussi à nous, le langage des signes ! Et nous devons en être fiers ! » Ces mots prononcés en 1912 par Ernest Dusuzeau, militant sourd français de la Belle Époque, illustrent bien l’importance qu’a la langue des signes dans l’histoire des sourds. Une histoire certes silencieuse, mais riche d’événements et d’évolutions quant à la place accordée aux personnes sourdes dans la société.
« La surdité n’est pas uniquement un sujet lié au handicap, loin de là, explique Yann Cantin, historien spécialiste du sujet, commissaire de l’exposition. C’est pourquoi nous avons souhaité aborder cette histoire en parlant de celle de la langue des signes, du Moyen Âge à nos jours. Une langue qui nous fédère et nous rassemble, tout en nous permettant de comprendre le monde et d’être en lien avec les entendants. »
Parcours chronologique
Alors que le XVIIIe Congrès mondial de la Fédération mondiale des sourds se déroulera à Paris, du 23 au 27 juillet (2), l'exposition est construite de façon chronologique, autour de grandes thématiques : éducation, art, vie sociale, vie associative et personnalités incontournables… On apprend ainsi que la langue des signes n’a pas été créée par l’abbé de l’Épée au XVIIIe siècle, mais qu’elle est apparue bien plus tôt. « Les recherches conduites depuis quarante ans dans le domaine de l’histoire des sourds nous ont permis de faire de belles découvertes, détaille Yann Cantin. On sait par exemple aujourd’hui que le pape Innocent III, aux alentours de 1200, avait autorisé les sourds à se marier, à condition qu’ils puissent faire un geste mimant le "oui". »
Depuis, les rebondissements ont été nombreux, et la reconnaissance de la personne sourde comme citoyenne à part entière n’a pas toujours été simple. « Au XXe siècle, l’eugénisme a évidemment laissé des traces : entre 1933 et 1945, près de 25 000 sourds ont été stérilisés en Allemagne », ajoute l'historien.
Perpétuelle évolution
Parallèlement, bien que parfois malmenée, la langue des signes continuait d’être un ciment pour la communauté sourde. Une langue en perpétuelle évolution, qu’il a fallu faire connaître, promouvoir et défendre, année après année. Une histoire qui est donc contée tout au long de l’exposition, avec précision, exemples et anecdotes. « Le militantisme pour la langue des signes n’a pas toujours été bienvenu, raconte encore Yann Cantin. Ainsi, durant la période que nous avons baptisée "le Déni" (de 1920 à 1970), les sourds se rencontraient au sein des associations sportives : c’est cela qui a sauvé la langue des signes ! »
Après cette période de rejet est venue la période du « Réveil sourd », de 1970 à 2005 – l'année où la langue de signes a été reconnue dans la loi comme une langue à part entière. Une étape incontournable de cette aventure qui continue de s’écrire, et dont la première partie mérite incontestablement d’être découverte au Panthéon.
(1) Exposition organisée en partenariat avec l’association des Amis de l’abbé de l’Epée, l’Institut national de jeunes sourds de Paris (INJS) et IVT-International Visual Theatre, www.paris-pantheon.fr
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