Romans policiers

L’œuvre au noir... et rouge

Par
Publié le 18/04/2017
Article réservé aux abonnés
L-Attends-moi au ciel

L-Attends-moi au ciel

L-Haute Voltige

L-Haute Voltige

L-La Daronne

L-La Daronne

L-Bronx

L-Bronx

L-Chaos

L-Chaos

L-Au coeur de l'été

L-Au coeur de l'été

L-En lieux sûrs

L-En lieux sûrs

Argentin installé en Espagne, Carlos Salem surprend avec des polars hors normes (« le Plus Jeune Fils de Dieu »). « Attends-moi au ciel » (1) ne déroge pas, qui montre la métamorphose d’une épouse oisive et bigote, au seuil de la cinquantaine, en femme fatale et meurtrière… après la mort de son mari. Un roman placé sous le signe de la fantaisie et de l’immoralité, soutenu par une vraie intrigue criminelle et de nombreuses péripéties.

Avec « Bronx - La petite morgue » (2), Laurent Guillaume, ex-flic de la BAC et des Stups, a réussi son coup, qui était de rendre hommage à l’âge d’or du pulp américain. Toutes les figures du roman hard boiled y défilent, les frères irlandais gangster et flic, la blonde fatale, la prostituée au grand cœur, les policiers véreux et autres rois de la pègre. Les thèmes et les lieux mythiques aussi, qui nous immergent dans la Grosse Pomme pourrie des années 1950.

Un premier roman vendu dans 35 pays avant parution et en cours d’adaptation pour une série TV : tel est l’heureux sort de « Ragdoll » (3), du Britannique Daniel Cole. Le titre vient de la découverte d’un « cadavre » recomposé à partir de six victimes démembrées et assemblées par des points de suture. Une poupée de chiffon qui appelle six autres victimes annoncées, parmi lesquelles l’inspecteur qui dirige l’enquête. Un polar sanguinolent à souhait, qui repose sur les personnalités déroutantes du flic et de sa coéquipière.

« En lieux sûrs » (4) est le 13e roman de l’Américain Linwood Barclay publié en français, la plupart des précédents ayant été des best-sellers. On y retrouve les héros de « Cette nuit-là », son premier succès (2009), parents d’une adolescente qui, vingt ans après sa mère, met le pied dans un piège fatal. Jusqu’où les Archer iront-ils pour sauver leur enfant ? Un suspense millimétré, avec des personnages auxquels on s’identifie aisément et de l’humour, même dans les scènes de meurtre.

Retrouvailles

Les héros récurrents répondent toujours présents. Ainsi du Dr Kay Scarpetta, le médecin légiste créé par Patricia Cornwell dans « Postmortem », qui vit sa 24aventure dans « Chaos » (5), avec ses acolytes habituels. Elle est confrontée à un danger invisible et redoutable.

La policière Louise Boni, imaginée par l’Allemand Oliver Bottini (après « Meurtre sous le signe du zen »), aussi forte tête que fragile, revient dans « Au nom des pères » (6) et elle ira jusqu’en Croatie pour conclure une enquête sur une famille d’apparence tranquille menacée par un mystérieux inconnu.

L’île de Sandhamn a été popularisée par la Suédoise Viveca Sten, qui en a fait le berceau des enquêtes de l’inspecteur Thomas Andreasson et de l’avocate Nora Linde. « Au cœur de l’été » (7) se déroule lors de la fête la Saint-Jean. Wilma, la fille de Nora, disparaît, et le cadavre d’un garçon de 16 ans est retrouvé sur la plage.

Quatrième opus de la série Karl Kane, initiée avec « les Chiens de Belfast », « Au scalpel » (8) confronte le détective privé imaginé par l’Irlandais Sam Millar au monstre qui a assassiné sa mère lorsqu’il était enfant. Cela, alors qu'il recherche une adolescente séquestrée avec une autre proie moins innocente qu’il y paraît. Un récit brutal, éclairé par un humour grinçant.

Écoutes et filatures

Ancien capitaine de police à la Brigade criminelle de Paris, Hervé Jourdain (« le Sang de la trahison ») peut se targuer d’être le premier à décrire, dans « Femme sur écoute » (9), le bâtiment ultrasécurisé qui abritera aux Batignolles les « Seigneurs du 36 ». L’auteur nous emmène dans le monde de la nuit du Triangle d’Or de la capitale, où se côtoient touristes friqués, prostituées de luxe et hommes de pouvoir. Avec, au centre du récit, une strip-teaseuse et escort girl dont on découvre la vie intime au travers des écoutes téléphoniques dont elle est victime.

« Haute Voltige » (10) est certes un roman policier avec tous les ingrédients que l’on attend. C’est aussi un étonnant livre romanesque et un roman d’aventures dont on dévore les 600 pages sans coup férir. Il est signé Ingrid Astier, l’auteure des fameux « Quai des enfers » et « Angle mort ». Impossible à résumer, le livre met en scène des personnages à fleur de peau, qui tous poursuivent une quête personnelle. Parmi eux Ranko, un homme traumatisé par la guerre en ex-Yougoslavie et fasciné par la beauté qui, depuis les toits, s’empare des œuvres d’art.

Hannelore Cayre vient d'être couronnée pour « la Daronne » (11). Elle y met en scène une honorable mère de famille –  elle traduit de l’arabe, au noir, les écoutes téléphoniques pour les Stups – qui franchit un jour la ligne jaune en détournant une grosse quantité de cannabis. Sans une once de culpabilité. Avocate pénaliste de profession, l’auteure sait parfaitement comment fonctionnent la police et la justice. Un régal.

« Les Bras cassés » (12), de Yann Le Poulichet, et « Je m’appelle Birdy » (13), de Franco Mannara, n’ont rien en commun sinon d’être des polars pour le moins déjantés. Le premier raconte comment trois compères un peu menteurs, un peu dragueurs, un peu voleurs, qui jouent les détectives amateurs, vont être poursuivis par des tueurs serbes, des producteurs télé véreux et des flics en préretraite. Dans le second, c’est le guitariste d'un groupe de rock underground (Franco Mannara a créé le groupe Spoke Orkestra) qui prend en filature, pour le compte d’un privé, la jeune Birdy, fille de bonne famille tombée dans les ténèbres de la nuit parisienne et des circuits fascisants.

(1) Actes Sud, 325 p., 22 €
(2) French Pulp, 241 p., 18,99 €
(3) Robert Laffont, 454 p., 21 €
(4) Belfond, 425 p., 21,90 €
(5) Les Deux Terres, 427 p., 21,90 €
(6) L'Aube, 388 p., 23 €
(7) Albin Michel, 409 p., 22 €
(8) Seuil, 283 p., 20 €
(9) Fleuve, 524 p., 20,50 €
(10) Gallimard, 600 p., 21 €
(11) Métailié, 172 p., 17 €
(12) Denoël, 281 p., 17,90 €
(13) Calmann-Lévy, 412 p., 19,90 €

Martine Freneuil

Source : Le Quotidien du médecin: 9573