TOURISME - Le Nevada, de la Vallée de la mort à Las Vegas

L’Ouest, le vrai

Publié le 19/04/2012
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INTERMINABLE ruban d’asphalte tremblotant sous une chaleur de forge (50°C), la route US 50, « la plus solitaire d’Amérique », suit la trace de l’ancienne piste du Pony Express, où s’illustrèrent jadis William « Buffalo Bill » Cody et ses rudes cavaliers, qui transportaient les sacoches de courriers à travers l’Amérique sous les flèches d’Indiens vociférants. Aujourd’hui, l’US 50, qui traverse le centre du Nevada, n’est plus parcourue que par de rares routiers au volant d’énormes « trucks » et de voitures de tourisme.

Le long de la route, aux abords parsemés de rabbit bushes, buissons de petites fleurs jaunes aux senteurs agréablement aromatiques, très appréciés des Bugs Bunny locaux, apparaissent parfois au flanc d’une colline aride les vestiges d’une ville minière abandonnée avec son matériel rouillé, témoignage de l’époque héroïque des mines d’or et d’argent découvertes en 1859. Un temps quatrième producteur d’or du monde, le Nevada verra ses filons fabuleux s’épuiser à la fin du XIXe siècle, mais la découverte de gisements d’argent et de cuivre relancera l’économie au début du XXe.

Fantômes de l’Ouest, les petites villes, souvent séparées d’une centaine de kilomètres, se succèdent. Ambiance western garantie : une rue principale avec une station-service poussiéreuse, un drugstore décati avec machine à sous, une église et, un peu à l’écart entouré de mobile-home, l’inévitable maison close, puisqu’au Nevada la prostitution est légale, sauf à Las Vegas.

Mi-ville minière, mi-ville fantôme, la pittoresque Pioche (prononcer Pi-Hautche) doit son nom à un certain François Pioche, venu de San Francisco pour faire fortune. Sa Main Street fut le décor de nombreux règlements de compte, comme en témoigne Boot Hill, son cimetière local. Installé dans un ancien magasin, le Lincoln County Historical Museum raconte l’histoire de la ville et met en valeur les cultures indiennes de la région ainsi que la présence des travailleurs chinois lors de la construction du chemin de fer.

Non loin de Pioche, dans la Valley Of Fire, le musée Lost City, construit sur le site du Pueblo Grande, ancienne ville de briques de boue séchée, abandonnée aux alentours de 1150, retrace la culture des anciens Anasazis, disparus à l’arrivée des nouvelles tribus indiennes, Washoes, Païutes, Bannocks et Shoshones.

Ambiance western.

Avec le Cathedral Gorge State Park, on pénètre dans un monde étrange et silencieux et l’on ne peut être que saisi par l’atmosphère quasi magique de ses cathédrales de pierre, dressées comme des couteaux pointés vers le ciel, ses cheminées minérales, ses amas rocheux aux allures de vaisseaux fantômes.

Toujours sur la route 50, Ely (prononcer ii-lii) semble nettement plus animée que Pioche. Soixante-dix-neuf ans durant, la ville bénéficia des mânes de la riche mine de cuivre de Ruth, avant de péricliter après sa fermeture en 1980. L’attraction locale est sans conteste l’historique hôtel Nevada, avec sa façade ornée de fresques western évoquant les riches heures des hors-la-loi de l’Ouest sauvage. Voués au jeu et à la boisson, le hall et le rez-de-chaussée bruissent en permanence des cliquetis des machines à sous. Sous les lumières gueulardes des néons colorés, éclairant les murs ornés de trophées de chasse tête de bisons, de caribous, d’ours, de cornes de bœuf et de panoplies de carabines Winchester et de colts Frontier, de rudes gaillards et gaillardes du cru boivent comme des trous et fument comme des pompiers à mille années lumières du politiquement correct du reste de l’Amérique.

Le calme revient dans l’air pur et le silence du Great Basin National Park, où se trouve la Lehman Cave, Monument national depuis 1922. Ses grottes spectaculaires, dont les origines datent de 550 à 600 millions d’années, plongent dans les entrailles de la terre et offrent un spectacle unique de stalactites, stalagmites, colonnes et draperies calcaires aux formes fantastiques.

Symbole de la dernière ruée vers l’argent du Nevada, Tonopah, ville minière qui a connu en 1900 son heure de gloire et de prospérité : pas moins de 150 dollars (de l’époque !) furent extraits de sa mine, aujourd’hui transformée en vaste musée à ciel ouvert. Non loin de là, perdue dans les collines de la sierra, la ville fantôme de Rhyolite, dont témoignent seules les ruines d’une gare néo-espagnole et quelques cabanes de bois. Dans la petite ville de Beatty, au Stagecoach Sourdough Restaurant, l’Ouest, le vrai, resurgit de façon bon enfant avec des spectacles dînatoires où de paisibles commerçants, avocats, médecins ou employés de la ville, déguisés en farouches cow-boys armés jusqu’aux dents, font parler la poudre (à blanc) tout en dégustant d’énormes steaks et des épis de maïs gros comme le bras, pour la plus grande joie des touristes.

Entourée par les montagnes, la Death Valley se trouve en grande partie au-dessous du niveau de la mer. Immortalisé par Antonioni, Zabriskie Point offre un spectacle de décor lunaire coloré des plus saisissants. Enclume chauffée à blanc (on y frise souvent des températures de plus de 50 °C), la Vallée de la mort dispose de quelques oasis rafraîchissantes, comme l’étrange Furnace Creek Inn, mythique hôtel au luxe désuet, sorte de palmeraie à l’abri de la fournaise où, dans les années 1930, s’abritaient les amours adultères des stars d’Hollywood.

Le divertissement avant tout.

Cernée par les sables du désert de Mojave, Las Vegas n’a plus rien à voir, et depuis belle lurette, avec la ville tripot créé par le célèbre gangster mondain Bugsy Siegel. Exit l’ambiance crapuleuse de joyeux lupanar d’après-guerre, avec ses règlements de comptes sanglants entre mafieux. Si Vegas demeure la capitale du jeu, avec plus de 160 casinos où se pressent bon an mal an plus de 20 millions de touristes, la ville poursuit sa quête de la démesure grandiose, justifiant sa réputation de « capitale mondiale du divertissement ».

Si les hôtels-casinos genre Disneyland pour adultes, comme l’inénarrable et néomédiéval Excalibur, avec ses tours pointues et ses créneaux de carton-pâte, le Mirage et son décor de jungle avec pont de liane, le kitchissime Louxor et le non moins kitchissime Ceasar Palace, subsistent sur le Strip, l’artère centrale, la ville s’est transformée en une sorte de monde en bocal, avec d’époustouflantes reconstitutions des cités les plus célèbres d’Europe et d’Amérique. Aux côtés des gratte-ciels d’un Manhattan et de la statue de la Liberté, on tombe sur l’ahurissante reconstitution d’un Paris dominé par une tour Eiffel plus vraie que nature. On passe les Alpes d’un seul coup d’œil en tombant sur Venise et son campanile, la place Saint-Marc, le pont du Rialto et la façade du palais des Doges, qui abrite le Venetian, luxueux hôtel débordant de marbres et de dorures aux plafonds ornés de fresques néomichelangelesques, dont les fenêtres donnent sur des canaux où glissent d’authentiques gondoles.

Les restaurants les plus réputés, souvent étoilés Michelin, foisonnent, comme au célébrissime MGM Grand, où le restaurant de Joël Robuchon fait salle comble, avec des additions nettement plus douces que celles de Paris, ou le délicieux Picasso de l’hôtel Bellagio, l’un des meilleurs de la ville.

Pour se reposer les yeux et les oreilles, loin des néons scintillants et des cliquetis des slot machines, on retrouvera la magie du Wild West en survolant en hélicoptère les étendues désertiques et les plateaux rocailleux pour plonger dans les paysages vertigineux et les falaises orangées du Grand Canyon tout proche et se poser 1 000 m plus bas dans le silence minéral de ce lieu unique au monde.

JACQUES CHAMBAZ
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Source : Le Quotidien du Médecin: 9117