Âgé de 69 ans, Daniel Rondeau est homme multitâche. Écrivain à l’origine d’une trentaine d’ouvrages (romans, essais politiques et littéraires, récits autobiographiques, livres de voyage et portraits de villes méditerranéennes), il a été journaliste (« Libération », « l’Express », « le Nouvel Observateur »), éditeur (il a créé les éditions Quai Voltaire et a dirigé la collection « Bouquins »). Il a été ambassadeur de France à Malte de 2008 à 2011, puis, pendant deux ans, délégué de la France auprès de l’Unesco.
Déjà Grand Prix de littérature Paul Morand de l’Académie française en 1998 pour l’ensemble de son œuvre – et après que sa candidature pour siéger à ladite Académie a été repoussée à deux reprises –, il a donc reçu le prix censé couronner « le meilleur roman de l’année » (au 3e tour, avec 12 voix contre 11 pour Yannick Haenel et « Tiens ferme ta couronne »).
« Mécaniques du chaos » (1) « représente la somme de tous mes engagements littéraires et personnels depuis plusieurs années », a déclaré le lauréat. Il ne faut pas hésiter à s’engager dans les rouages de ce roman ambitieux et ample, construit comme une mécanique de précision et dans lequel évoluent de nombreux personnages, en Afrique et en Europe, tous plus ou moins connectés. Daniel Rondeau a tissé une toile ténue, où chacun et chaque acte interagissent avec les autres, avec au cœur de l’histoire la préparation d’un attentat islamiste en France et comme fil rouge le narrateur, un archéologue français spécialiste de l’Antiquité, confronté à la déraison du monde actuel.
D’une tour de la Défense à une banlieue parisienne mafieuse, de Somalie en Éthiopie, de Libye en Algérie, d’Égypte en Turquie et Tunisie…, se croisent ou se frôlent une boat-people, un chef de milice esclavagiste, un diplomate turc, un caïd salafiste, un flic antiterroriste, une barbouze de haut vol, un slameur rêveur, entre autres. Entre leurs souvenirs, leurs rêves et la réalité, ils sont embringués dans une folle farandole qui les dépasse et qui laisse le lecteur à bout de souffle. Un thriller géopolitique dans lequel Daniel Rondeau noue et dénoue l’écheveau du chaos contemporain, où affairisme, politique et religion s’interpénètrent.
Des hommes hors du commun
Aussi prisé que le prix du Roman de l’Académie française (et doté comme lui de 10 000 €), le prix Jean Giono consacre un auteur et un livre à mille lieues des précédents. « La Nostalgie de l’honneur » (2) est en effet le premier livre de Jean-René Van der Plaetsen, 55 ans, journaliste au « Figaro » depuis près de trente ans, actuellement directeur délégué de la rédaction du « Figaro Magazine ».
Également en lice pour les prix Renaudot et Interallié, « la Nostalgie de l’honneur » retrace le parcours de son grand-père maternel, le général d’armée Jean Crépin, héros de la deuxième guerre mondiale, gaulliste de la première heure, qui combattit aussi en Indochine puis en Algérie. Au-delà de la biographie, Jean-René Van der Plaetsen rend un hommage personnel, avec souvenirs et anecdotes vécues, à un homme qu’il a côtoyé et écouté jusqu’à sa mort en 1996, à 88 ans ; jusqu’à envisager lui-même une carrière militaire (il a été chasseur alpin et envoyé à ce titre au Liban en tant que Casque bleu). Et le livre, bien sûr, est une réflexion sur cette valeur en voie de disparition, le sens de l’honneur.
Un autre récit parfaitement inactuel, qui nous conduit au monastère de Sarrance, dans les Pyrénées françaises, à la rencontre d’un moine prémontré de 75 ans, vient d’être couronné du prix Roger Nimier. « Des Âmes simples » (3) est le deuxième livre de Pierre Adrian, 26 ans, qui a déjà reçu l’année dernière, pour « la Piste Pasolini », le prix des Deux-Magots et le prix François Mauriac de l’Académie française.
Le livre brosse le portrait de frère Pierre, un homme énigmatique et lumineux, qui depuis un demi-siècle fait office de curé pour les 17 églises de la vallée d’Aspe. Il témoigne de ces « vies minuscules », ces hommes et ces femmes que le religieux croise sur le chemin de Compostelle ou à la rencontre desquels il va sans relâche sur les chemins escarpés, simplement pour les écouter et les assister, qu'ils soient croyants ou pas, parce qu'« on ne peut plus faire comme si les gens avaient la foi ».
(1) Grasset, 458 p., 22 €
(2) Grasset, 240 p., 19 €
(3) Éditions des Équateurs, 176 p., 18 €
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