Au Centre Pompidou

Matisse, l'équilibre du dessin et de la couleur

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Publié le 27/10/2020
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Au Centre Pompidou, « Matisse, comme un roman », selon la formule d’Aragon, Martin Barré, l'un des peintres abstraits les plus importants de la seconde moitié du XX e siècle, et la lauréate du prix Marcel Duchamp 2020, Kapwani Kiwanga.
« La Tristesse du roi », 1952

« La Tristesse du roi », 1952
Crédit photo : SUCCESSION H. MATISSE/CENTRE POMPIDOU/PH. MIGEAT

Pour Matisse (1869-1954), « l’importance d’un artiste se mesure à̀ la quantité de nouveaux signes qu’il aura introduit dans le langage plastique ». Avec plus de 300 œuvres, en provenance essentiellement du Centre Pompidou, des musées Matisse du Cateau-Cambrésis et de Nice et du musée de Grenoble, l'exposition suit pendant 50 ans le peintre, sculpteur, dessinateur et graveur dans un parcours chronologique en 9 séquences – chaque fois il se renouvelle.

Louis Aragon questionne : « Où marquer le commencement ? » pour cet artiste impressionné par Cézanne, voulant trouver « une écriture pour chaque objet », après avoir étudié aux Beaux-Arts dans les ateliers de Bougereau et Gustave Moreau. Avec un chromatisme agressif, il s’inscrit dans la lignée du néo-impressionnisme de Signac, qui marque ses années fauves (1904-1905) à Collioure. Gertrude Stein lui achète son premier tableau.

À l’aube de l’art moderne, avec les influences des primitifs, de la sculpture africaine, des mosaïques byzantines et du cubisme, il marque un intérêt pour le décoratif, et il n’y a aucune perspective ni grille de lecture dans « les Aubergines ». Retour sur la famille lors des années de guerre, avec la série sur les fenêtres. « Porte-fenêtre à Collioure » (1914), avec sa grande bande noire, est son tableau le plus abstrait. En 1918, remise en question avec es paysages et es « Odalisques », figures dans des espaces décoratifs qui questionnent le volume et la planéité, alors qu’il déménage à Nice et qu’il est apprécié des critiques et des collectionneurs.

Le voyage aux États-Unis et à Tahiti dans les années 1930 et la commande murale de « la Danse » par le Dr Barnes et celle des illustrations des « Poésies » de Mallarmé marquent une étape radicale. En 1941, après une opération, il se considère en sursis, ce sera des « années ardentes » marquées par « la Blouse roumaine », icône de la France libérée, les « Intérieurs de Vence » et les gouaches découpées de « Jazz ».

La chapelle dominicaine du Rosaire de Vence, réalisée à près de 80 ans, est pour lui son « chef-d’œuvre », une œuvre d’art totale, avec la conception de l’architecture, des décors, des vitraux, des objets et vêtements liturgiques. L’aboutissement des recherches de toute une vie menées autour de l’équilibre du dessin et de la couleur. Les papiers découpés des « Nus bleus » et de « la Tristesse du roi » en seront le point d’achèvement.

Et aussi

La rétrospective consacrée à Martin Barré (1924-1993) au Centre Pompidou montre une œuvre singulière, faite de lignes, grilles et figures couleurs, qui cherche à révéler l’espace plutôt qu’à produire des formes. Une ligne radicale qui transforme l’espace sous l’effet de sa trajectoire réalisée au tube puis à l’aérosol, à laquelle succèdent des séquences de quadrillages répétitives – l’une d’elles a servi de prétexte à̀ la pièce de Yasmina Reza, « Art », qui remettait en cause l’art contemporain. Son abstraction géométrique questionne cependant le traditionnel rapport figure-fond.

À voir encore au Centre Pompidou, « Flowers for Africa », de l'artiste et anthropologue franco-canadienne Kapwani Kiwanga, lauréate du prix Marcel Duchamp 2020.Elle analyse la disposition des compositions florales lors des événements diplomatiques liés à l’indépendance des pays africains et en fait des témoignages de ces moments historiques qui révèlent une vision géopolitique.

 

 

 

 

 

 

 

 

Matisse jusqu’au 22 février ; Martin Barré et Kapwani Kiwanga jusqu’au 4 janvier. centrepompidou.fr

Caroline Chaine

Source : Le Quotidien du médecin