Deux textes à l'affiche à Paris

Nathalie Sarraute toujours présente

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Publié le 08/12/2016
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Théatre-Pour un oui

Théatre-Pour un oui
Crédit photo : BRIGITTE ENGUERAND

Au Théâtre de Poche Montparnasse (1), une comédienne qui a quitté la Comédie-Française il y a un an, Léonie Simaga, met en scène « Pour un oui ou pour un non », une pièce qu’elle avait déjà montée avec ses camarades du Français il y a quelques saisons. Elle a choisi deux comédiens au talent profond : Nicolas Briançon et Nicolas Vaude.

Dans un décor qui s’inscrit parfaitement sur la scène étroite, les deux interprètes jouent ces personnages qui, sous la plume de Sarraute, n’ont d’autre identité que H1 et H2. La pièce a été composée pour la radio, créée, si l’on s’en souvient bien, sur les ondes allemandes, et n’a été que tardivement portée à la scène en France. Depuis, au théâtre, avec Simone Benmussa, qui dirigeait Jean-François Balmer et Sami Frey, comme au cinéma-télévision, avec Jacques Doillon dirigeant Jean-Louis Trintignant et André Dussollier, on a revu souvent cet affrontement.

C’est une intonation qui lézarde une amitié qui remonte à l’enfance, c’est une petite phrase surinterprétée qui déchire les deux amis : « C’est bien ça ». Il suffit d’un blanc entre « bien » et « ça », un appui sur « ça » et le venin se répand. Il y a, pour les comédiens, une jubilation patente à jouer cette dispute douloureuse. Ils sont dans l’éclat de leur talent. Nicolas Briançon, d’une sobriété qui laisse tout sourdre, la violence, la cruauté, le désarroi. Nicolas Vaude, qui, les premiers jours, était un peu trop expressif, et immédiatement dans l’état qu’il doit trouver à la fin du parcours, est pourtant convaincant ! C’est cela, le grand art. Le plaisir. Et la jubilation des artistes est celle aussi des spectateurs : Nathalie Sarraute est maligne, comme le Malin ! Elle est diabolique, elle s’amuse.

Souvenirs

« Enfance », présenté au Petit-Montparnasse (2), c’est bien autre chose. Ce n’est pas un texte fait pour le théâtre. Ce sont de véritables souvenirs qu’une vieille dame de 85 ans remonte à la surface. Vingt mouvements dont Samir Saïd et Valérie Aubert ont retenu sept fragments. Il met en scène, elle joue.

C’est un travail remarquable de deux artistes qui ont notamment monté Bernanos avec beaucoup d’intelligence. Ils ont retenu des moments de gravité, de douleur, de souffrance d’une petite fille qui a une énergie profonde et se défend. On pourrait imaginer plus d’humour, mais, telle quelle, cette adaptation est très touchante et Valérie Aubert conduit la représentation avec une sensibilité moirée qui émeut.

 

(1) Poche-Montparnasse, à 19 heures du mardi au samedi, à 17 h 30 le dimanche. Durée 1 h 15. Jusqu’au mois de février 2017. Tél. 01.45.44.50.21, www.theatredepoche-montparnasse.com
(2) Petit-Montparnasse, le lundi à 19 h 30, le samedi à 14 heures, le dimanche à 17 heures. Durée 1 h 15. Jusqu’au 19 décembre. Tél. 01.43.22.77.74, www.theatremontparnasse.com

Armelle Héliot

Source : Le Quotidien du médecin: 9541