L'empirisme, c'est justement de distinguer la pensée et la réalité. Nous pensions que la catastrophe était possible. Nous avions prévu le pire. « Mais quand il advient, il est encore pire que tout ce que nous avions imaginé : il est réel », dit l'auteur.
C'est ainsi que nous avions pensé, ou plutôt rêvé, la démocratie. Une heureuse multiplicité de peuples et de croyances, un élégant bouquet multicolore. Mais le fondamentalisme religieux et les massacres commis à Paris doivent nous dessiller les yeux. « Il y a désormais parmi nous des citoyens comme nous, au même titre et avec les mêmes droits que nous, qui refusent la liberté d'expression – sauf la leur –, la critique, la tolérance et, en fait, la liberté tout court, et sont prêts à imposer leur vision par le meurtre au nom de l'idéal religieux. »
L'empirisme consiste simplement à prendre en compte cette réalité : certains ont un idéal obscurantisme, intolérant, violent, totalement opposé aux règles de la démocratie. Prendre en compte et cesser de pleurnicher sur l'harmonie perdue.
Tout faux sur le populisme
On retrouverait le même idéalisme imbécile dans la manière de traiter le populisme, un sujet sur lequel nos politiques ont « tout faux ». Les populismes, d'extrême droite comme d'extrême gauche, touchent aujourd'hui presque tous les pays d'Europe, et presque partout ils sont traités par l'aveuglement ou le mépris. On les réduit en effet facilement à des humeurs de comptoir, au mécontentement de « petits blancs fachos ». Pourtant, de fines analyses (celles d'Yves Michaud par exemple) montrent que les idéologies sont sur des lignes de fracture précises et en même temps révèlent de curieuses alliances : un jeune chômeur du Nord et un riche retraité de la Côte d'Azur peuvent se retrouver dans la composition du FN. Plutôt que de considérer les fragments de l'électorat comme des parts à conquérir (ce que firent Sarkozy et Berlusconi), nos politiques devraient se souvenir de la mince victoire de Chirac le 21 avril 2002.
Avec un sain recul théorique, Yves Michaud s'en prend de manière générale aux idéalismes compassionnels qui prêchent pour un droit universel ou une générale volonté de paix (tel Emmanuel Kant), sans voir que dans l'ombre les tueurs guettent.
Un livre extrêmement rigoureux, qui refuse de prendre ce qui devrait être pour ce qui est, refuse de considérer des terrorismes comme des victimes et ne prend pas la paille des mots pour le grain des choses.
Stock, « Les Essais », 192 p., 18 €.
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