Vieilles lunes et éternels combats

Sans dieux et sans libéralisme

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Publié le 11/04/2016
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Idées-Penser l'Islam

Idées-Penser l'Islam

C'est à partir des questions de la journaliste algérienne Asma Kouar sur l'Islam que cet essai est conçu. Le philosophe a à cœur de dire et de démontrer qu'il a lu de près le Coran, qu'aucun hadith ne lui a échappé, et nous acceptons volontiers son ironie.

Il est bien vrai qu'on a lourdement insisté sur le fait que l'Islam était une religion de paix et de tolérance et que les musulmans n'étaient pas tous des terroristes (c'est ce que Freud nomme une dénégation en forme d'aveu). Mais l'auteur de « Cosmos » sort ses sourates.

Extrayons-en quelques-unes, en sachant qu'il y en beaucoup de cet acabit : « Exterminez les incrédules jusqu'au dernier » (VIII) ; « Tout juif qui vous tombe sous la main, tuez-le » (Al-Sîra, II, 56-60) ; « Tuez les polythéistes partout où vous les trouvez » (XVII, 58), etc., etc.

C'est l'occasion pour l'auteur de redire que toutes les religions sont totalitaires, intolérantes et que les gens de Dieu ont souvent massacré au nom de leur Dieu. Il met « On a tué Charlie » suivi d’« On a vengé le prophète » sur le même plan que le « Tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens » de l'histoire catholique.

Si, plus loin, il nuance son propos en distinguant un bon Islam de celui des fanatiques et des terroristes, c'est pour conclure finalement que cette religion comporte le meilleur et le pire, mais que « le pire de l'Islam ne doit pas être décrété comme ne relevant aucunement de l'Islam ». Dont acte.

Par ailleurs, l'idée, maintes fois répétée dans cet essai, selon laquelle la France serait devenue la cible des musulmans à cause des guerres, des bombardements en Irak, Libye et Afghanistan, une façon indirecte donc de justifier les attentats, ne tient pas la route. Les morts de « Charlie » paient pour le soi-disant blasphème à l'égard du prophète, ceux du Bataclan sont le résultat de la haine du mode de vie occidental.

Mais comme en psychanalyse, le véritable objet est déplacé. Ce qui irrite le plus Michel Onfray, ce ne sont pas les croyances religieuses ou l'Islam – il a si longtemps ferraillé contre eux –, c'est l'incurie d'un président qui, au soir du vendredi 9 janvier, « décrétait une manifestation, une de plus ».

C'est aussi, remontons un peu plus avant dans le temps, la conversion de la France et des socialistes à l'unique libéralisme, opérée en 1983 par un certain François Mitterrand. On est alors en droit de se demander ce qui, de l'horreur terroriste ou de l'enfermement dans la doctrine libérale, est le mal le plus grand.

« Penser l'Islam », Grasset, 180 p., 17 €.

André Masse-Stamberger

Source : Le Quotidien du médecin: 9487