Sur l’archipel des Canaries, en randonnée

Tenerife, version plein air

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Publié le 02/06/2016
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Tenerife-La Laguna

Tenerife-La Laguna
Crédit photo : PHILIPPE BOURGET

TENERIFE 214-Le pic du Teide

TENERIFE 214-Le pic du Teide
Crédit photo : PHILIPPE BOURGET

Tenerife 003-Massif de l'Anaga

Tenerife 003-Massif de l'Anaga
Crédit photo : PHILIPPE BOURGET

Puerto de la Cruz, un matin de printemps. La mer d’écume et les nuages bas ne disent rien de bon. Dans cette station balnéaire historique de Tenerife, sur la côte nord, les hôtels old fashion du centre-ville distillent une atmosphère surannée plutôt agréable. Les commerces ouvrent à pas comptés, les cafe con leche coulent doucement des percolateurs et quelques touristes – en majorité espagnols – promènent leur chien sur le front de mer. Rien à voir avec l’ambiance anglo-saxonne et la vie nocturne survoltée de Playa de las Americas ou de Los Cristianos, les spots touristiques du sud de l’île.

Dans le bus qui grimpe les versants de l'Orotava, fief de la banane canarienne, la niebla (brume) se fait menaçante et enveloppe la forêt de pins. Jusqu’à ce que le ciel se déchire, à l’entrée de la caldeira de Las Cañadas. Sous un ciel soudain azur, la pointe acérée du Pico del Teide, volcan éteint et point culminant de l’Espagne (3 718 m), domine un décor lunaire de lave et de concrétions. Magnifique ! Il en est souvent ainsi à Tenerife, île où les alizés butant sur la côte nord laissent volontiers le cœur volcanique libre de tout nuage. Pour mieux apprécier ce paysage, cap sur une marche de 6 heures. Depuis l’hôtel Parador, à plus de 2  000 m d’altitude, le chemin trace son sillon dans la dépression volcanique, au milieu des rochers figés. À mesure que le GR 131 grimpe le rebord de la caldeira, le panorama s’élargit sur la plaine de rocaille, la végétation rase, le volcan gris aux pentes ravinées.

Mer… de nuages

Sur la ligne de crête, à 2 400 m d’altitude, un autre spectacle nous attend : celui de la mer de nuages couvrant la partie du sud de l’île. L’impression d’être au-dessus du monde. La descente par le GR jusqu’au village de Vilaflor, 10 km plus bas, est comme un livre ouvert sur la nature canarienne. La plongée dévoile les ravins secs, que l’on nomme ici barrancos. Puis l’étage forestier, pins canariens et sapins conquérants. Enfin les champs de lave noire, où l’on repose ses pieds d’une marche sur des cailloux ailleurs très acérés. Les premières cultures en terrasses signent l’arrivée à Vilaflor, où de délicieux fumets de queso asado con morcilla (fromage rôti et saucisse) s’échappent de l’unique auberge du centre du village.

Tout autre est le paysage offert par le massif de l’Anaga, à l’extrême nord-est de l’île. En direction de ces confins où peu de touristes s’aventurent – c’est l’intérêt de la région  –,  nous traversons La Laguna. Le centre ancien de cette localité des hauteurs regorge de bâtiments à balcons de bois et de palais au style colonial des XVIe, XVIIe et XVIIIe. Alignés le long de rues au cordeau, ils témoignent de la prospérité de cette ville, ancienne capitale de l’île et qui demeure son cœur culturel et universitaire. Classé au patrimoine mondial par l’Unesco, La Laguna est encore peu visitée.

Villages blancs oubliés

Mais revenons à l’Anaga. Ici, point de montagnes arides comme dans le Teide. Les pluies du large verdissent ce massif abrupt qui plonge dans l’océan, s’ouvrant sur des villages blancs oubliés, tels Taborno, Las Carboneras, Valle Brosque… Ce territoire d’à peine 8 000 habitants, parc rural naturel déclaré en 2015 Réserve mondiale de la Biosphère, n’a été relié par des routes au reste de l’île que dans les années 1950. Encore difficilement accessible, il est couvert d’une forêt de lauriers et de magnifiques cardones, les fameux cactus candélabres.

Un bout du monde dans lequel la randonnée prend des allures de petite aventure. Ainsi de l’itinéraire qui relie les villages d’Afur et de Taganana. En 4 petites heures, le chemin dévale des vallons secs, se joue de reliefs aigus, rejoint un torrent côtier… avant de parvenir à l’océan, bordé de falaises vertes et noires. La suite du parcours jongle avec la paroi rocheuse, en surplomb de la mer. Jusqu’à ce qu’apparaissent, au loin, les maisons blanches à toits plats des hameaux de Taganana, dominées par des pics aux allures de pains de sucre. Cela vaut bien un arrêt final au cœur de ce village rural, développé autour de son église à petit clocher du XVIe. Un verre de blanc Tacoronte (le vin de l’île est excellent), un peu de fromage de chèvre, une tartine de gofio (pâte à base de céréales)… : oui, Tenerife mérite mieux que son image de resort balnéaire pour Nord-Européens fatigués.

Philippe Bourget
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Source : Le Quotidien du médecin: 9501