Apparemment, au Capitole rien ne change. Les distributions sont toujours de qualité, l’acoustique du théâtre superbe, le public fidèle et enthousiaste. Petit détail, mais d’importance pédagogique, le programme, bien aminci mais toujours aussi riche, est distribué gratuitement. Plus important, la direction artistique passe aux mains de Christophe Ghristi, qui a été très longtemps aux côtés de Nicolas Joel dans cette maison et à l’Opéra de Paris. Et l'on sait qu’il gardera à ce théâtre lyrique sa tradition de privilégier les chanteurs.
Si le répertoire y est roi, le Capitole sait aussi tirer parfois des œuvres rares de l’oubli. Comme « Tiefland » (Les Basses Terres), de l'Allemand Eugen d’Albert (1864-1932), créé à Prague en 1903. Dans un contexte pyrénéen catalan, l'opéra met en scène un petit chef local qui, pour se marier richement, sous-traite sa protégée à un berger naïf, lequel, une fois détrompé, prendra brutalement sa revanche.
Le livret s'inspire de « Terra Baixa », du poète et dramaturge catalan Angel Guimera. D’Albert, musicien allemand à la trajectoire européenne (né en Ecosse, il a étudié en Angleterre et à Vienne, où il a été élève de Liszt, puis a vécu en Allemagne), a vu dans cette pièce naturaliste tous les ingrédients de la modernité de l’époque (des similarités avec les intrigues de « Carmen », « Tristan », les opéras véristes italiens). Il en a tiré un formidable drame lyrique domestique à la hauteur de ceux de Janáček.
Si la musique subit indiscutablement les influences de Wagner et Massenet, son langage reste très personnel. C’est un opéra de premier plan, dont on peut s’étonner qu’il soit aussi peu joué hors des pays germaniques. Il demande un trio d’interprètes de format wagnérien, trio que le Capitole a su réunir. Markus Brück pour le rôle du mauvais Sebastiano, Meagan Miller pour Marta, la femme sacrifiée, et surtout le ténor autrichien Nikolai Schukoff, admirable dans le rôle du berger Pedro. L’Orchestre du Capitole a joué avec une tendresse particulière sous la direction de Claus Peter Flor cette enivrante musique qui, dans les conditions acoustiques exceptionnelles du Capitole, coulait comme un fleuve dans la salle.
Une impasse esthétique
On sera plus réservé sur la traduction théâtrale de l’œuvre par Walter Sutcliffe. Non que sa transposition au XXe siècle, avec télévision et téléphones portables, soit gênante, le drame gagnant en crédibilité à être actualisé. Mais la scénographie et les décors de Kaspar Glarner, poétiques au début pour l’acte dans la montagne, transportent, pour les actes au moulin, dans une esthétique de série télévisée qui n’est pas l’essence du théâtre lyrique. La référence au cinéma d’Almodovar est même revendiquée.
D’Albert et son librettiste se sont efforcés de gommer le folklore pour créer un drame universel. Plaquer par-dessus une autre esthétique les trahit. Malheureusement, une grande partie du public d'aujourd’hui souhaite ce mélange des genres et certains metteurs en scène surfent volontiers sur cette vague, qui n’est en rien un avenir pour l’opéra. Une impasse tout au plus.
– Sur France Musique le dimanche 22 octobre à 20 heures
– Prochains spectacles du Capitole de Toulouse : « Giselle » chorégraphie de Kader Belarbi, du 19 au 24 octobre ; « La Rondine », opéra de Puccini, du 17 au 26 novembre. Tél. 05.61.63.13.13, www.theatreducapitole.fr
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