« CHEZ MOI, il n’y a plus que moi », chantait il y a longtemps Gilbert Bécaud. C’est tout à fait la thématique de ce livre. L’homme (et la femme, bien sûr) s’est pris en charge, il est devenu autonome. Mais sous cette charge, il a l’air bien courbé. Il est sa propre référence, « I, me and myself ». C’est exaltant, jouissif, il décide de ses plats, de ses plaisirs, de sa vie.
Pourquoi est-il si insatisfait alors ? Ni la consommation infinie, ni son ordinateur de poche, qui contient un univers virtuel, ne semblent l’apaiser. Il connaît la fameuse « fatigue d’être soi » décrite par Alain Ehrenberg, le vide lui pèse, paradoxalement.
Faut-il mettre en cause, comme le fait l’auteur, « l’individualisme libéral et compétitif » ? Elle confesse qu’il convient à certains mais épuise les autres. Ils se réveillent d’un mauvais cauchemar. « À l’épreuve de la réalité, le grand rêve n’a pas tenu. Nous sommes confrontés à la violence de la lucidité rétrospective : non, tout n’est pas possible, tout ne peut être permis. »
On le voit, ce rêve foudroyé, c’est celui d’un homme hyperperformant, assumant sans aucune difficulté l’existence et ses choix. Pourtant, la pub nous avait dit que « tout était possible sans efforts » et les livres promettaient une acquisition immense de savoirs... pour les nuls ! On nous a trompés d’autant plus qu’on se faisait des illusions sur tout.
C’est aussi, dit Catherine Ternynck, par appauvrissement des liens familiaux, en particulier ceux de la transmission, des ascendants et à nos descendants, que nous nous étiolons, nous érodons et, à la mort du jour, dans les draps de l’ennui, on se retrouve seuls.
Christianisme plus psychanalyse, on attendait plus de ce binôme doltoïen en matière curative. La déploration de la toute-puissance des marchés et la nostalgie liée à la fuite des vieilles valeurs ne sont pas d’une stupéfiante nouveauté, mais on trouvera de quoi s’étonner dans sa déploration de l’enfant-roi et les fantômes incestueux qui l’accompagnent. Il faut donc conseiller ce livre, car lui n’est pas bâti que sur du sable.
Catherine Ternynck, « l’Homme de sable », Seuil, 248 p., 19 euros.
* DDB, 2007, prix du Furet et de « la Voix du Nord ».
DJ et médecin, Vincent Attalin a électrisé le passage de la flamme olympique à Montpellier
Spécial Vacances d’été
À bicyclette, en avant toute
Traditions carabines et crise de l’hôpital : une jeune radiologue se raconte dans un récit illustré
Une chirurgienne aux nombreux secrets victime d’un « homejacking » dans une mini-série