Le Salon du livre de Paris est mort, vive Livre Paris, une 36e édition qui s'annonce avec la promesse d'« une programmation culturelle innovante et festive, accessible et qualitative », selon les mots de son président et président du Syndicat national de l’édition, Vincent Montagne. D'une durée identique (4 jours) mais avec des dates avancées d'une journée dans la semaine, le salon se veut à la fois « réinventé » et « réenchanté ». Les noctambules apprécieront le retour d'une nocturne le jeudi 17 mars jusqu'à 22 heures et l'ensemble du public les trois zones de détente réaménagées avec des bornes de livres audio ainsi que l'écran géant qui diffusera des informations live sur ce qui se passe au salon.
Livre Paris va offrir une programmation éditorialisée, en prise avec l'actualité et qui sera comme un fil rouge dans la manifestation, soit une vingtaine de rendez-vous sur le thème Résistance(s). Le salon inaugurera des promenades littéraires, baptisées « En marchant, en écrivant, ou les flâneries intérieures de l'édition », durant lesquelles des écrivains, historiens ou journalistes déambuleront entre les stands en discutant de la vie des livres.
À côté d'une Scène littéraire de plus de 400 m2 sur laquelle seront invités les plus grands auteurs nationaux et internationaux, une Scène sera spécifiquement consacrée à la bande dessinée et au manga, qui fera se rencontrer des scénaristes et dessinateurs de nombreux pays, un espace qui se veut festif, avec l'organisation de concerts et de cosplays (déguisements en personnages de BD, de mangas, de séries…).
Enfin, outre les Square Jeunesse, Culinaire et Savoir & Connaissances, Livre Paris va ouvrir un Square Religions, Culture et Société, qui a pour ambition de rassembler le point de vue des croyants de tous les horizons et d'interroger les enjeux des pratiques religieuses contemporaines.
Entre culture millénaire et modernité
Livre Paris n'a pas joué la facilité en invitant la Corée du Sud, dont la littérature, marquée par une culture millénaire comme par les traumatismes subis au siècle dernier, mais aussi fascinée par la modernité, est méconnue en France. La venue de 30 auteurs coréens et la traduction pour l'occasion de nombreux ouvrages en tous genres, contribueront à la faire apprécier.
La Corée est un des pays qui lit le plus au monde. La poésie y est toujours un genre prisé (l'homme de lettres et poète Ko Un, né en 1933, a été pressenti deux fois pour le prix Nobel de littérature). La fin de la colonisation japonaise en 1945 puis la guerre entre le Nord et le Sud de 1950 à 1953 (plus de deux millions de victimes) ont marqué le début de la littérature contemporaine coréenne, dite de division. L'essor économique dans les années 1970 a conduit beaucoup d'auteurs à prendre pour thématique la misère du peuple laissé en marge du progrès. Les nouvelles générations d'auteurs, quant à eux, « aiment à s'inspirer de la vie quotidienne pour critiquer la société avec une vivifiante légèreté, chère aux Coréens », ainsi que le souligne Jean-Luc Troula-Breysse dans « Livres Hebdo ».
Hwang Sok-yong (né en 1943), auteur de « Monsieur Han », est l'écrivain coréen le plus célèbre en Corée et le plus traduit, distingué par de nombreux prix littéraires asiatiques ; il est aussi connu pour avoir combattu les régimes autoritaires qui se sont succédés jusqu'à la fin des années 1990, jusqu'à connaître la prison, et pour militer pour la réconciliation des deux Corée. Deux de ses livres paraissent ce mois-ci, « l'Étoile du chien qui attend son repas » (Serge Safran) et « Toutes les choses de notre vie » (Philippe Picquier) : au début des années de dictature, un adolescent arrive avec sa mère dans l'immense décharge à ciel ouvert de Séoul, où près de deux mille foyers vivent en une société fortement hiérarchisée, où la moindre chose (travail, vêtement, nourriture, logement) provient des rebuts du monde extérieur ; un garçon un peu simplet lui fait découvrir les anciens habitants du site, ou plutôt leurs esprits bienveillants, lorsque l'île de la décharge était une terre vouée aux cultures agricoles et aux cultes chamaniques.
D'autres romans d'auteurs coréens invités à Livre Paris viennent de paraître en France. « Celui qui revient », de Han Kang (née en 1970), a pour thème l'errance d'un jeune garçon parmi les morgues improvisées de la ville de Gwangju, après la féroce répression menée par la junte militaire contre le mouvement étudiant démocratique en 1980 (Le Serpent à plumes).
« Les Nuits de sept ans », de Jeong Yu-jeong (née en 1966), montre les affres d'un homme souffrant d'une affection neurologique qui provoque des mouvements incontrôlables de sa main gauche, après que cette main a achevé une fillette qu'il avait blessée avec sa voiture ; le père de la victime cherche à se venger sur son fils (Decrescenzo éditeurs).
« Les Planificateurs », de Kim Un-su (né en 1972), nous entraîne à la Bibliothèque des chiens, où personne ne lit car elle est le trust le plus puissant de l'assassinat. Fort de son diplôme de Stanford, le fils adoptif du directeur fonde une entreprise de sécurité qui gagne vite des parts de marché face à la bibliothèque vieillissante (Éditions de l'Aube).
« La Baignoire », de Lee Seung-u (né en 1960), est un roman profondément lyrique où un homme, la trentaine bien avancé, mal marié, d'une situation honorable quoique menacée, revient dans l'appartement qu'il a partagé avec une jeune veuve rencontrée au cours d'un voyage d'affaires au Mexique, à la recherche de souvenirs que sa mauvaise conscience a relégués dans le marais de sa mémoire (Serge Safran).
« Le Phare », de Lim Chul-woo (né en 1954), fait suite au best-seller « Je veux aller dans cette île », où l'auteur racontait son enfance rude mais enchantée auprès de ses grands-parents ; désormais installé dans un faubourg misérable, à la périphérie de Kwangju, l'adolescent doit composer avec ses deux sœurs, dont l'une est retardée mentale, un père absent et une mère luttant au quotidien pour faire vivre sa famille (L'Asiathèque).
D'autres invités
Cette plongée dans la littérature sud-coréenne ne devra pas empêcher les visiteurs de Livre Paris d'aller à la rencontre de la littérature congolaise – et de ses 23 écrivains invités – à travers ses deux métropoles francophones : Brazzaville, la capitale politique, et Pointe-Noire, la capitale économique. Et encore de la ville de Constantine, représentée par 20 écrivains, actuellement Capitale de la Culture Arabe, dont le site unique au monde a fondé sa réputation de ville de résistance au cours des siècles et qui a donné à l'Algérie quelques-uns de ses auteurs les plus réputés.
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