Trois nouveautés

Une musique plus vivante que jamais

Par
Publié le 05/11/2018
Article réservé aux abonnés
Jazz-Riccardo Del Fra

Jazz-Riccardo Del Fra

Jazz-Snorre Kirk

Jazz-Snorre Kirk

Jazz-Makaya McCraven

Jazz-Makaya McCraven

Chicago ! La « Cité des vents », à la croisée des chemins musicaux : le blues avec l’arrivée des bluesmen de Delta du Mississippi dans les années 1940-1950 ; le jazz d’avant-garde avec les précurseurs de l’AACM (Association for the Advancement of Creative Musicians), créée en 1965, dont le fer de lance restera l’Art Ensemble of Chicago, initiateur de la Great Black Music.

Aujourd’hui, l’un des nouveaux espoirs de la scène locale s’appelle Makaya McCraven. Fils de Stephen McCraven (ex-accompagnateur d'Archie Shepp, Marion Brown, Sam Rivers ou Yusef Lateef), le batteur de 35 ans, né à Paris, élevé en Nouvelle-Angleterre, réside à Chicago depuis plusieurs années. Avec « Universal Beings » (International Anthem), il s'inscrit dans le désir d’ancrer de nouvelles formes de jazz, créées par une génération comprenant Shabaka Hutchings, Kamasi Washington et Robert Glasper, dans un esprit de revival, à travers une vitalité musicale retrouvée grâce au mélange des genres.

Ce double album, enregistré avec des jazzmen aussi différents que justement Shabaka Hutchings, la harpiste Brandee Younger, les contrebassistes Dezron Douglas (ex-Pharoah Sanders & Ravi Coltrane) ou Junius Paul (membre récent de l’ensemble de Chicago), est la parfaite illustration d’un travail collectif de recherches dynamiques, originales et surtout dans l’air du temps. Un jazz d’expérience, résolument actuel, généré par un aventurier.

Indémodable

Entré comme une étoile filante en tant qu’accompagnateur sur la scène européenne du jazz, le batteur et compositeur norvégien Snorre Kirk est rapidement parvenu à s’imposer comme un leader sérieux et respectueux d’une certaine tradition. Primé à plusieurs occasions dans les pays nordiques, il nous propose « Beat » (Stunt Records/Una Volta Music), enregistré à la tête d’un sextet qui n’est pas sans rappeler l’esprit des Jazz Messengers d’Art Blakey.

Huit compositions personnelles et une relecture (« Zanzibar », écrit par le tromboniste de l’orchestre de Duke Ellington, Juan Tizol) forment cet album, qui laisse beaucoup de place aux solistes et sent bon un jazz indémodable qui conserve toute sa vitalité. Snorre Kirk se produira à Paris à la Maison du Danemark le 15 novembre.

Le nom du contrebassiste italien Riccardo Del Fra restera attaché à la dernière période européenne du trompettiste Chet Baker, avec qui il a joué jusqu’à sa mort en mai 1988. Depuis, il s’est fait une solide réputation de leader et de pédagogue, comme responsable de la classe Jazz au Conservatoire national supérieur de musique (CNSM) de Paris, d’où viennent nombre de jazzmen des nouvelles générations.

Européen dans l’âme, il est ouvert sur le monde et le prouve avec « Moving People » (Cristal Records/Sony Music), une production particulièrement aboutie, lyrique et profonde. Elle réunit les Américains Kurt Rosenwinkel (guitare), merveilleusement inspiré, et Jason Brown (batterie), les Français Rémi Fox (saxes) et Carl-Henri Morisset, l’étoile montante du piano hexagonal, l’Allemand Jan Prax (saxes) et le Polonais Tomasz Dabrowski (trompette). Onze titres originaux (et une reprise de Thelonious Monk) à la fois mouvants et émouvants dans l’exigence et la perfection. Riccardo Del Fra sera les 29, 30 novembre et 1er décembre à Paris, au Sunside.

Didier Pennequin

Source : Le Quotidien du médecin: 9699