Incontinence anale

Quel risque avec les rapports sexuels anaux ?

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Publié le 20/10/2020
Selon une vaste enquête menée auprès d’hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, la sexualité anale n’est pas associée à un risque accru d’incontinence anale, exception faite de certaines pratiques marginales qui doivent être considérées comme à plus haut risque.
8 % d'incontinence anale chez les HSH

8 % d'incontinence anale chez les HSH
Crédit photo : Phanie

L’incontinence anale toucherait de 5 à 12 % de la population générale selon les scores utilisés, particulièrement des femmes ménopausées, ayant des antécédents de constipation ou d’accouchements traumatiques. Un trouble dont elles ne se plaignent généralement pas spontanément et sur lequel elles sont rarement interrogées car l’incontinence anale reste un sujet tabou pour les patients comme pour bon nombre de praticiens.

« L’impact potentiel de la sexualité anale sur la continence anale est quant à lui très mal connu, alors que cette question est récurrente notamment sur les blogs », note le Dr Aurélien Garros, hépato-gastroentérologue au centre hospitalier St-Joseph-St-Luc à Lyon. L’analyse de la littérature fait état de quatre études aux résultats discordants, notamment en raison d’une évaluation mal systématisée de l’incontinence anale et du caractère flou des questions sur les pratiques sexuelles.

« Pour mieux évaluer les liens entre sexualité anale réceptive et incontinence anale, nous avons saisi l’opportunité de l’enquête menée tous les deux ans par Santé publique France sur la santé sexuelle des hommes ayant des rapports avec des hommes (HSH), poursuit le Dr Garros. Pour faire ce travail nous avons ajouté une seule question  : “Avez-vous eu des fuites involontaires de selles au cours du dernier mois ?” » (1).

Des conseils de prévention

Principal enseignement de l’analyse des quelque 20 000 réponses : la prévalence de l’incontinence anale chez les HSH est globalement de 8 %, et n’est donc pas plus élevée que dans la population générale. Ce chiffre augmente toutefois en fonction de la fréquence des rapports sexuels anaux, passant de 5 % en l’absence de rapports au cours du dernier mois à 13 % en cas de rapports pluri-hebdomadaires. De plus, certaines pratiques sexuelles exposent à un risque accru : le « fist-fucking » et le « chemsex », pratique qui consiste à avoir des rapports sexuels sous l’emprise de drogues et qui est en expansion dans certains groupes d'HSH. « Toutefois, les hommes adeptes du « fist-fucking » ont recours à des lavements quotidiens pour assurer la vacuité du rectum, ce qui limite le risque d’incontinence », précise le Dr Garros, qui souligne également, l’impact délétère de la précarité sur ce risque.

« Il s’agit de la première étude à grande échelle qui permet de distinguer l’impact de différentes pratiques sexuelles sur le risque d’incontinence anale chez les HSH, note le Dr Garros. Ces résultats pourraient conduire à des conseils de bonne pratique de la sexualité anale, tels que l’éviction ou la limitation des pratiques à haut risque et le recours à des lubrifiants ».

Les données font défaut chez les femmes

Une autre enquête est envisagée chez les femmes, chez lesquelles on observe une augmentation très nette de la sexualité anale réceptive, qui est passée de 14 % dans les années 1970 à 53 % en 2019 selon une enquête de l’IFOP. Ce projet se heurte pour l’instant à un problème de financement.

« En attendant, rien n’empêche de questionner les femmes sur des éventuels troubles de la continence anale, dont le diagnostic se fait à l’interrogatoire », rappelle le Dr Garros.

D’après un entretien avec le Dr Aurélien Garros, centre hospitalier St-Joseph-St-Luc, Lyon.
(1) Étude soumise à publication, réalisée avec Santé publique France, le Groupe de recherche en colo-proctologie de la Société nationale française de colo-proctologie (GREP) et les Sciences économiques et sociales de la santé et traitement de l’information médicale (SESSTIM).

Dr Isabelle Hoppenot
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Source : lequotidiendumedecin.fr