Pourquoi la ville n'imite pas l'hôpital en matière de prescription de biosimilaires ? Les acteurs hospitaliers ont en effet bien joué le jeu. La substitution s'opère en effet très rapidement dès la mise sur le marché d'un biosimilaire. En témoigne la montée en puissance des biosimilaires du trastuzumab. En six mois, ils ont conquis 50 % de parts de marché. Le processus devrait s'accélérer avec l'arrêté du 29 mai dernier qui a inscrit l'adalimumab après l'insuline glargine et l'étarcercept dans le dispositif d'intéressement des établissements prescrivant des biosimilaires délivrés en ville. Cette pénétration à grande vitesse des biosimilaires s'explique notamment par les politiques d'appels d’offres. Un marché peut être accordé à un seul fournisseur. En témoigne les taux de pénétration des biosimilaires de l'anti-TNF infliximab et du traitement d'oncologie et ceux du rituximab qui atteignent 90 % à l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP). Des résultats très loin de ceux observés en ville où la progression est beaucoup plus lente. « À peine plus d'1 patient sur 10 est traité par des médicaments biosimilaires », souligne Pascal Brière, président de Biogaran (Les Échos du 16 juillet 2019). À la différence de l'hôpital, les acteurs ne bénéficient pas d'incitatif financier. Comment alors changer la donne ?
Rôle accru du pharmacien d'officine
Pascal Brière suggère de miser sur le pharmacien d'officine. Son rôle vient d'être reconnu dans la Ma Santé 2022 avec l'octroi de nouvelles missions dans la vaccination et le suivi des patients. Quant à la Fédération internationale de la pharmacie, elle appelle sans réserve à la substitution des médicaments biosimilaires par les pharmaciens qui ont joué un rôle moteur dans la sensibilisation des patients aux génériques. Ils en ont tiré à l'époque de nombreux bénéfices mais pas seulement financiers.
Cible, les médecins libéraux
L'assurance maladie opterait plutôt en faveur des médecins libéraux. En cas de succès, s'opérait un changement à 360 degrés. Dans son livre Etienne Noguez, Des médicaments à tout prix (Voir Décision & Stratégie Santé N° 310), raconte comment les spécialistes ont fait la preuve d'une forte résistance. C'était alors un moyen de conserver une clientèle exigeante , « d'affirmer ou de reproduire la hiérarchie médicale ». L'époque n'est plus la même. Dans ses propositions pour 2020 sur l'évolution des charges et produits, l'idée serait d'étendre à la médecine de ville le dispositif d'intéressement des établissements prescrivant des biosimilaires. Les spécialistes seraient en priorité visés. Trois médicaments biologiques ont été sélectionnés. Concernant l'étanercept, le dispositif serait réservé aux seuls rhumatologues, à l'origine de près de 40 % des prescriptions. Selon les calculs de l'assurance maladie, dans le cas d'une conversion de 50 % des prescriptions vers les biosimilaires, une économie de 21,2 millions d'euros serait réalisée. 30 % seraient reversées aux rhumatologues ayant modifié leur pratique, soit 6,4 millions d'euros. Le bénéfice net s'élèverait donc à 14,8 millions d'euros, soit 70 % du montant total d'économies. La même opération serait réalisée avec l'adalimubab prescrit dans les rhumatismes inflammatoires et les MICI. Cette fois, outre les rhumatologues, le dispositif serait également proposé aux gastro-entérologues. Le gain net attendu atteint 32,5 millions d'euros.
Le bénéfice espéré sera en revanche nettement plus faible avec la follitropine alfa, une hormone utilisée dans la stimulation ovarienne. Les gynécologues obstétricaux et médicaux seront les seuls concernés. Le bénéfice devrait s'établir à 1,6 million d'euros.
Une ligne de front est donc tracée entre les défenseurs des pharmaciens et ceux qui parient sur les spécialistes libéraux. Au final, les ventes de biosimilaires en ville vont-elles enfin s'envoler en 2020 ?
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