C’est un peu l’effet « gueule de bois ». Reçus sous la bannière commune de l’intersyndicale Action Praticiens Hôpital (APH), plusieurs leaders hospitaliers ont eu l’impression d’avoir été entendus par Geneviève Darrieussecq, mais sans aucun engagement sur le fond des dossiers en jachère. Pourtant, le temps presse : à cause de la valse des ministres à Ségur, aucune réunion n’avait eu lieu avec le ministère depuis février dernier…
La Dr Anne Wernet, secrétaire générale d’APH, est restée sur sa faim. « La ministre arrive tout juste. Elle n’a pas encore pris connaissance des dossiers » Le Dr Jean-François Cibien, président de cette intersyndicale, n’a pas perçu non plus d’engagement précis, sauf concernant la hausse des astreintes des PH, déjà promise mais mise entre parenthèses avec la dissolution. Une réunion sur ce sujet brûlant aura lieu fin novembre. S’il comprend « la situation financière compliquée du pays », le Dr Cibien entend en tout cas relancer le dialogue social avec la tutelle. Nombre de sujets sont sur la table : réévaluation des grilles pour les derniers échelons, décompte du temps de travail, carrières des hospitalo-universitaires, Padhue…
Sur le volet de la psychiatrie publique, la Dr Marie-José Cortes, présidente du Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH), a ressenti « une pointe d’agacement » chez la ministre, qui a reconnu le manque de psychiatres. La grande cause nationale sur la santé mentale sera-t-elle un effet d’annonce ? À ce stade, l’accès aux soins et l’offre de soins n’ont pas été abordés, s’inquiète la syndicaliste qui déplore l’absence de concertation entre Matignon et les représentants de terrain.
Un médecin ou une infirmière qui quitte l’hôpital à cause de mauvaises conditions de travail ne revient jamais
Pr Rémi Salomon, président de la conférence des présidents de CME
Les représentants de la gouvernance hospitalière ne sont pas non plus très à l’aise, à l’image du Pr Rémi Salomon, président de la conférence des présidents de CME, qui a rencontré la ministre à deux reprises cette semaine. Il lui a fait savoir la « vive inquiétude des directeurs d’hôpitaux vis-à-vis du PLFSS ». Malgré un hôpital qui s’efforce de redresser la tête et réouvre des lits, il craint un retour en arrière si un effort conséquent n’est pas réalisé pour améliorer l’attractivité des personnels soignants et médicaux. « On ne peut pas imposer davantage de productivité dans les hôpitaux parce que sinon les gens vont partir, explique-t-il. Or, un médecin ou une infirmière qui quitte l’hôpital à cause de mauvaises conditions de travail ne revient jamais. »
Inquiétude aussi des libéraux
Du côté de la médecine de ville, MG France comme la CSMF, reçus séparément, saluent « l’écoute attentive et amicale » de Geneviève Darrieussecq. Mais « il n’y a eu aucune annonce ni révélation », plaisante la Dr Agnès Giannotti. La présidente du syndicat de généralistes a évoqué le risque de non-recours aux soins pour les patients en cas de baisse du taux de remboursement des consultations par la Sécu. « La ministre affirme que cela n’est pas encore arbitré mais c’est ce qu’on nous dit tout le temps », déplore la généraliste parisienne.
Actualité oblige, un autre sujet a été évoqué : les offensives des parlementaires pour réguler la liberté d’installation. « La ministre nous a demandé de trouver des solutions », glisse le Dr Franck Devulder, patron de la CSMF, qui défend des « mesures de régulation incitatives ». Cela passe par exemple à ses yeux par la création de terrains de stages ambulatoires ou l’incitation énergique des médecins retraités à reprendre une activité. « Si on n’a pas de mesures beaucoup plus fortes, on aura moins de médecins en cumul car on arrive à une génération de médecins à plus faible effectif », alerte le Dr Devulder.
Ce vendredi, tous les syndicats de praticiens libéraux mais aussi les représentants des étudiants et internes ou encore le collectif « Médecins pour demain » ont paraphé un communiqué commun expliquant que « la contrainte et la régulation sont de fausses solutions aux effets pervers ». Selon le Dr Devulder, Geneviève Darrieusssecq a assuré « qu’elle ne sera(it) pas la ministre qui mettra à mal la liberté d’installation ».
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