Force est de constater qu’il n’existe pas actuellement de politique de santé commune en Europe, ni d’harmonisation des différents systèmes de santé européens, que ce soit en matière d’organisation, de moyens, de financement ou de résultats.
Les États membres de l’Europe n’ont pas davantage fait montre de leur volonté, ou de leur capacité, à formuler une réponse européenne aux crises sanitaires frappant leurs territoires – et ce d’autant moins qu’ils ne disposent pas de budgets propres, et se refusent à abandonner leurs prérogatives nationales en la matière.
Un vrai schisme s’est ainsi fait jour entre les partisans d’une organisation fédérale de la santé en Europe, et les défenseurs d’un repli de chaque État sur ses propres frontières.
Comment s’étonner dès lors que la santé n’apparaisse dans les préoccupations des citoyens européens que loin derrière le chômage, la situation économique, la sécurité et l’immigration ?
Il est donc plus que temps de créer, non pas une Europe idéale, mais une Europe utile et vécue comme telle par chaque citoyen, dans laquelle la santé serait enfin perçue comme aussi primordiale à défendre que ces acquis européens que sont la libre circulation, l’Euro et plus encore, la préservation de la paix pour nous et nos enfants
Les gouvernements sont naturellement réticents à l’idée de renoncer à leur souveraineté en matière budgétaire et sociale, au profit d’une Europe le plus souvent considérée comme intrusive, et alors même qu’une gouvernance économique renforcée de cette dernière impacterait les budgets sociaux nationaux.
Et pourtant, les grands choix européens, en matière d’économie, d’environnement, d’enseignement, d’immigration ou de service public impactent nécessairement tous les systèmes de santé nationaux.
Une saine émulation et des positions communes
Il suffit pour s’en convaincre de se pencher sur les travaux menés par les instances médicales européennes – et, en particulier, sur les partages d’expériences réalisés lors des séminaires de l’EANA. Des échanges qui permettent de mesurer l’impact de la transposition nationale des directives européennes sur le secteur de la santé au sein de chaque pays, mais également de comparer les différents systèmes nationaux de ces derniers.
Cela crée une saine émulation entre les différents États, dont chaque système de santé présente des atouts et des points forts qui, s’ils étaient repris et harmonisés dans un ensemble cohérent, ferait une organisation globale séduisante – mêlant, par exemple, une formation et un niveau de protection sociale français, une organisation de terrain germanique, des résultats luxembourgeois, un suivi de formation continue anglosaxon, la souplesse des pays du nord de l’Europe en vue d’une plus grande réactivité vis-à-vis des nouvelles technologies… Liste très loin d’être exhaustive !
La connaissance de chaque organisation sanitaire nationale permet, en outre, de dégager des positions communes sur de grands sujets – tels le périmètre des métiers, l’intelligence artificielle, la circulation de l’information, la formation initiale et continue, la recertification, etc.
La démographie des États membres de l’Europe elle-même – qui fait de cette dernière un bloc de toute première importance – et nos systèmes actuels – combinés à cette démographie – devraient nous permettre de jouer un rôle de premier ordre, notamment en matière de données médicales… Mais, pour l’heure, l’absence de coordination européenne sur ces sujets ne nous a pas permis d’occuper la place incontournable qui devrait être la nôtre.
L'harmonisation des statuts et des formations reste à faire
La libre circulation des individus – patients comme professionnels de santé – se heurte toujours à des barrières techniques qui devraient appartenir au passé ; le contenu de la formation initiale n’est toujours pas équivalent d’un État à l’autre ; il n’y a toujours aucune harmonisation des statuts des médecins au travers de l’Europe – harmonisation qui passera obligatoirement par celle des statuts de médecins à l’intérieur de chaque pays ; le nombre et le contour de chaque spécialité, médicale ou paramédicale, doivent toujours être définis…
Alors, oui, les chantiers sont immenses… mais oui l’enjeu est majeur ! Créer, enfin, un véritable système de santé européen… Un projet dans lequel la place des organisations européennes de terrain devra être centrale, car elles seules peuvent porter la parole unanime et défendre les prises de position consensuelles des professionnels concernés, au sein de chaque pays, sur des thématiques communes essentielles.
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