Inquiet de l'arrivée plus rapide que prévu de la seconde vague de l'épidémie de coronavirus en France et estimant que la France ne l'a pas suffisamment anticipée, le président du Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) s'est livré à une sévère critique de la gestion de la crise sanitaire dans un entretien au Journal du dimanche. « Si rien ne change dans trois à quatre semaines, la France va devoir affronter pendant de longs mois une épidémie généralisée sur tout son territoire [...] avec un système de santé incapable de répondre à toutes les sollicitations », met en garde le Dr Patrick Bouet.
Le patron de l'Ordre regrette que les pouvoirs publics n'aient pas profité de l'accalmie, cet été, pour faire un « retour d'expérience » de la première période de la crise sanitaire (mars-avril, ndlr) et préparer un rebond épidémique. D'autant, selon lui qu'il était « clair que les gens allaient se relâcher pendant les vacances et que les contaminations estivales des littoraux nourriraient les Covid urbains de septembre ».
Le généraliste de Villemomble (Seine-Saint-Denis) redoute l'impact de la seconde vague et s'interroge sur la capacité des soignants à l'encaisser. « Ce qui nous attend est une épreuve. Les professionnels de santé, à l’origine du miracle du printemps, ne pourront pas pallier à nouveau les carences structurelles. Beaucoup sont épuisés, traumatisés », prévient-il.
La « technostructure » égratignée
Le patron de l'Ordre épargne Olivier Véran qui « fait de son mieux » mais met en cause la « technostructure du ministère de la santé », qui ne jure que par le plan blanc. Le Dr Bouet juge « urgent de créer un "comité de pratique", une sorte de pendant au conseil scientifique centré sur l’organisation, la logistique, le concret, et de le doter d'une déclinaison au niveau de chaque département ».
« Faute de quoi, c'est le Samu, et donc l’hôpital, qui devra à nouveau tout gérer, avec à la clé le même embouteillage qu'au printemps au 15 », déclare le Dr Bouet. Prédisant une « inégale répartition de la pression sur les cabinets de ville mais aussi le fait que des médecins libéraux soient privés d'accès à leurs patients dans les Ehpad », le président de l'Ordre réclame une meilleure coordination entre la médecine de ville et l'hôpital. « La majorité des malades du Covid n'iront pas à l'hôpital ! », argumente-t-il.
Généralistes submergés
Le Dr Bouet constate que les généralistes sont déjà « submergés par les demandes injustifiées de tests, de certificats pour le retour à l'école ou au travail après un Covid ». Il critique d'ailleurs ouvertement la stratégie de dépistage massive, élargie aux personnes sans prescription mi-juillet. « Le dépistage pour tous, sans ordonnance, a été une faute majeure », clame-t-il.
Le patron de l'Ordre a d'ailleurs proposé, après concertation avec les laboratoires de biologie et des acteurs de santé une nouvelle organisation du dépistage pour permettre un dépistage des cas prioritaires en 48 heures. Le ministre de la Santé doit présenter jeudi les modalités d'une nouvelle organisation du dépistage Covid, rendue notamment possible par l'arrivée prochaine des tests salivaires et antigéniques pour lesquels la HAS a rendu des avis favorables.
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