« Si je perdais le procès, j'arrêtais de travailler » : en conflit pendant 4 ans avec sa caisse, une généraliste raconte son combat

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Publié le 26/08/2019

Crédit photo : Phanie

Le Dr Véronique Möller, généraliste à Magny-les-Hameaux (Yvelines), sort d'une procédure de quatre ans avec sa caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM), qui s'est conclue cet été par une victoire pour ce médecin. Qui avoue au « Quotidien » ce 26 août ne « pas bien réaliser » que tout est enfin terminé.

Retour sur cette affaire aux multiples rebondissements. Le 18 juillet, le Conseil d'État publie une décision où il n'admet pas le recours de la caisse face au médecin généraliste. Cet arrêt vient clore une procédure marathon commencée en juillet 2015, lorsque le Dr Möller est convoquée pour un entretien confraternel car sa prescription d'arrêts de travail en 2014 est beaucoup trop élevée : 6 170 IJ pour une moyenne de 2 544 en Île-de-France.

Après avoir refusé la mise sous objectifs, le médecin est mis sous accord préalable du 15 mars au 14 mai 2016. Décidée à saisir la justice, la généraliste demande au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision de mise sous accord préalable, rejetée en mai 2017. Saisie, la cour administrative d'appel confirme le rejet de la demande du Dr Möller.

C'est donc devant le Conseil d'État que la procédure se poursuit. Et le 26 avril 2018, la Haute Juridiction est favorable à la requête du médecin, annule l'ordonnance de la cour administrative d'appel, et y renvoie l'affaire. La cour d'appel donne cette fois-ci raison au médecin. C'est donc au tour de la CPAM de former un recours devant le Conseil d'État, le 17 janvier 2019. Recours définitivement rejeté par les juges du Palais-Royal le 18 juillet.

Soutien des patients

« Cette affaire m'a pris beaucoup de temps, entre la constitution du dossier, les recherches, les différentes audiences auxquelles j'ai voulu assister… C'était un stress permanent ! Je m'étais dit que si je perdais le procès, j'arrêtais de travailler », confie la généraliste, qui exerce à mi-temps. De nombreux patients lui ont apporté leur soutien, tout comme d'autres confrères qui ont fait l'objet de ciblages, ainsi que le Dr Patricia Lefébure, élue FMF à l'URPS Ile-de-France. 

Installée depuis 2010 à Magny-les-Hameaux, le Dr Möller a auparavant remplacé pendant 15 ans dans la commune, qu'elle connaît bien. « Le bassin de population est plutôt ouvrier, avec beaucoup de troubles musculo-squelettiques, de dépression. À l’inverse, la commune voisine de Saint-Rémy-lès-Chevreuse a plus une population de cadres, des confrères me disent qu'ils prescrivent moins d'arrêts. Notre activité représente juste ce qui se passe dans la société. Faire de la prévention serait plus efficace que de taper sur les médecins », explique-t-elle.

La généraliste a demandé un recours en indemnisation d'un peu plus de 61 000 euros. Outre l'aspect financier, elle souhaiterait surtout qu'à terme, la mise sous accord préalable d'un médecin ne soit plus possible.

Petite souris coincée

À moins d'un recours devant la justice européenne, cette procédure est désormais close. Les ennuis du Dr Möller avec sa caisse sont-ils pour autant terminés ? Rien n'est moins sûr. Malgré ses explications, la médecin a de nouveau été ciblée par sa CPAM, qui a une nouvelle fois pointé une trop grande prescription d'arrêts de travail, notamment pour accidents du travail, sur une nouvelle période d'avril à juillet 2018. « On m'a dit de faire un effort pour diminuer le nombre d'arrêts de travail. J'ai alors pris la décision de fermer pendant deux mois cet été pour éviter de me faire taper sur les doigts, car comme d'autres médecins sont en congés et que je consulte sans rendez-vous, des patients seraient immanquablement venus me voir pour ce motif. Je reprends lundi prochain mais cela m'angoisse, je me sens comme une petite souris, coincée. J'ai l'impression que quoi que je fasse, cela n'ira pas », indique le Dr Möller.

Contactée, la CPAM des Yvelines n'a pas répondu à nos questions.


Source : lequotidiendumedecin.fr