« QUARANTE ANS, c’est d’abord quelque chose d’extraordinaire, car on s’est toujours vécu comme une petite institution expérimentale, fragile et éminemment provisoire. Le fait de durer si longtemps, c’est déjà un étonnement majeur », déclare le Dr Marc Valleur, médecin-chef du Centre médical Marmottan, créé en juillet 1971 par le Pr Claude Olievenstein. Le fameux bâtiment de briques rouges du 17e arrondissement parisien fut le théâtre de la révolution thérapeutique en matière de prise en charge des toxicomanies. « L’esprit de Marmottan, c’est avant tout un style d’intervention très particulier, où l’accueil inconditionnel, l’accompagnement priment sur toutes les réponses techniques de la prise en charge », résume-t-il.
Évoluant au centre Marmottan depuis 1974, le Dr Valleur prend le relais du Pr Olievenstein en tant que médecin-chef de l’établissement à partir des années 1999-2000. « Lui succéder est à la fois simple et compliqué, car je suis son exact contraire », confie-t-il. « Olievenstein a été un pionnier qui a ouvert un champ. Moi je suis davantage quelqu’un qui structure ce champ et qui poursuit une réflexion clinique. » Ces dix dernières années, le centre a élargi son périmètre d’actions aux drogues légales, puis aux addictions sans drogue. « Il y a une évolution permanente du profil des consultants. C’est toutefois davantage un élargissement qu’une modification radicale de la base de patients », explique le Dr Valleur. « Ces dix dernières années ont également été marquées par l’installation de la substitution, qui a énormément changé le paysage de la toxicomanie et sa prise en charge », ajoute-t-il.
Durant la dernière décennie, le centre Marmottan a aussi beaucoup tangué. « Au moment des guerres de la substitution et du départ d’Olievenstein, nombreux sont ceux qui ont considéré que Marmottan était devenu caduque et qu’il fallait peut-être passer à autre chose. Autour de l’année 2000, l’idée de fermer le centre a été très forte chez certains politiques », raconte le Dr Valleur. « Nous avons mené un combat difficile, mais, au final, je pense que c’est le bon sens qui l’a emporté. Marmottan dérange toujours autant en 2011 et en même temps il rend des services. C’est probablement grâce à cela qu’il est toujours là », considère-t-il.
Approche multimodale.
« Marmottan est devenu une institution, à la base de tout le modèle de soins français en matière de toxicomanies. » Plus récemment, « le champ des CSAPA (centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) s’est construit en grande partie autour de l’influence de Marmottan », remarque le Dr Valleur. « On représente une forme d’approche humaine en face des formes standardisées de prise en charge des toxicomanies. Aujourd’hui, on s’aperçoit que c’est ce style d’approche qui est probablement le plus efficace », estime le médecin-chef. « Ainsi, quand on parle d’addictions avec les Nord-Américains, ils sont généralement d’accord sur l’importance de l’approche multimodale telle qu’elle est pratiquée ici (psychologique, sociale, éducative et psychiatrique) », poursuit-il.
Passé le cap des 40 ans, le Centre Marmottan se prépare à une cure de jouvence. « Nos bâtiments datent de 1936 et il va bien falloir les rénover. C’est un chantier extrêmement important, qui devrait s’étaler pendant au moins 3 à 5 ans », indique le médecin-chef. « Le futur Marmottan devrait être totalement rénové. Mon successeur pourra alors bénéficier de structures plus adaptées et aux normes de la médecine actuelle. »
L’autre enjeu pour Marmottan durant la nouvelle décennie qui s’ouvre reste encore et toujours un défi autant clinique que politique et social. « Nous aurons à élargir la réflexion sur les autres addictions. Cela implique à la fois de tenir compte des recherches les plus pointues en neurobiologie mais aussi de mesurer l’impact de cette réflexion sur les addictions à l’intérieur des sciences humaines et sociales », souligne le Dr Valleur. « Dans ce cadre-là, je pense que l’on trouvera le terrain naturel pour que le style clinique inauguré à Marmottan puisse perdurer », estime-t-il.
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