« PLUS LA consommation de cannabis est ancienne, plus le risque de troubles psychotiques est élevé », expliquent des psychiatres australiens dans une étude à paraître en mai*. Si l’association entre cannabis et troubles psychotiques était suspectée depuis plus d’une dizaine d’années, l’existence de biais méthodologiques ne permettait de conclure qu’avec réserve. L’équipe dirigée par le Dr John Mc Grath à l’université du Queensland s’est affranchie de nombreux facteurs confondants, en particulier génétiques et socio-économiques, en comparant des enfants issus de la même famille et d’âge très proche, selon qu’ils consommaient ou non de l’herbe. « Les jeunes adultes toxicomanes depuis au moins 6 ans étaient deux fois plus sujets aux troubles psychotiques, expliquent les auteurs. Le risque de présenter des scores élevés de délire, d’après l’échelle Peters et coll. Delusions Inventory, était quatre fois plus élevé. L’effet est dose-dépendant : plus la consommation est ancienne, plus le risque de troubles psychotiques est élevé ».
Les psychiatres du Queensland ont analysé les données de 3 801 jeunes adultes âgés de 21 ans, suivis depuis la naissance au sein de la cohorte The Mater-University Study of Pregnancy. Des visites de contrôle y étaient prévues aux âges de 5, 14 et 21 ans. Quatre groupes étaient constitués selon la durée de consommation de cannabis : non-usagers, ≤ 3 ans, 4-5 ans ou ≥ 6 ans. Au cours du suivi sur 21 ans, près de 228 paires d’enfants de la même famille ont été identifiées : 60 paires de frères, 65 paires de sœurs et 103 paires mixtes. Dans 83% des cas, il s’agissait du même père pour les deux grossesses. La différence d’âge maximal entre les enfants était de quatre ans. Pour chaque enfant, étaient recueillis le nombre d’années depuis la première prise et le score de délire.
Une association complexe.
L’étude australienne est la première à avoir comparé des individus de la même famille pour étudier l’effet du cannabis sur les troubles délirants. Cette analyse intrafamiliale a permis de contrôler de nombreux facteurs potentiellement confondants. Sur le plan génétique, les enfants partageaient le même héritage maternel, ainsi que paternel pour la plupart. De plus, comme la différence d’âge était très faible, il est probable que les facteurs socio-économiques du ménage étaient restés stables.
« La nature de la relation entre la psychose et le cannabis n’est pas simple, concluent des psychiatres australiens. Les sujets ayant eu précocement des hallucinations sont le plus souvent des consommateurs de cannabis réguliers et de longue date. C’est toute la complexité de l’association : les individus fragilisés, c’est-à-dire qui ont présenté des symptômes psychotiques isolés, sont plus enclins à consommer du cannabis, ce qui ne fait que contribuer à augmenter le risque de basculer vers un trouble caractérisé ». De plus, l’association était moins forte après ajustement selon les symptômes anxio-dépressifs, ce qui suggère également que l’anxiété et/ou la dépression pourraient médier les effets du cannabis sur la survenue des troubles psychotiques.
*Arch Gen Psychiatry, volume 67, numéro 5, 1er mars 2 010.
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