La représentation des drogues

Les Français sont moins permissifs et plus inquiets

Publié le 28/06/2010
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LES FRANÇAIS perçoivent les produits psychoactifs comme de plus en plus dangereux. C’est le premier enseignement de la comparaison de trois enquêtes* réalisées par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). En 2008, respectivement 92 et 89 % des sondés considèrent l’héroïne et la cocaïne comme des substances dangereuses dès la première prise, un pourcentage en légère progression.

Mais « le cannabis et le tabac enregistrent une grosse augmentation », souligne Jean-Michel Costes, directeur de l’OFDT. Entre 2002 et 2008, le pourcentage de Français qui estiment le tabac dangereux dès l’expérimentation est passé de 25 à 43 %, et le chiffre passe de 52 % à 62 % pour le cannabis. Des croyances erronées sont toujours associées à ce dernier, qui a été expérimenté par un Français sur cinq. Ainsi, 74 % des Français adhèrent à la « théorie de l’escalade », selon laquelle l’usage de cannabis conduit à consommer par la suite des produits plus dangereux. Et ils sont encore 29 % à le croire chez les usagers dans l’année.

Entre le tabac, le cannabis et l’alcool, lequel exerce la plus redoutable attraction ? Le tabac arrive en tête des produits dont il serait difficile de se passer quand on a commencé à en consommer, soit 49 % dans l’opinion en 2008, loin devant le cannabis (30 %) et l’alcool(21 %).

À noter que les Français adhèrent massivement aux mesures de santé publiques visant à contrôler l’offre de tabac et d’alcool. De même, ils plébiscitent et intègrent les messages de prévention. Et 87 % estiment qu’une femme enceinte ne doit pas continuer à boire de l’alcool de temps en temps. Ils restent également largement opposés à la mise en vente libre des produits illicites, avec 85 % de sondés contre le cannabis, soit 10 points de plus qu’en 2002. Et 69 % estiment que cette interdiction ne constitue pas une atteinte à la liberté individuelle.

Comme en 1999 et en 2002, les Français sont attachés aux mesures à caractère prohibitif. Et si 73 % d’entre eux approuvent les traitements de substitution, l’adhésion à cette stratégie de réduction des risques s’effrite. 82 % y étaient favorables en 2002. Quant à la mise à disposition de locaux et de matériel spécial pour les consommateurs d’héroïne, elle est rejetée par 73 % des Français. Sans surprise, les usagers sont plus libéraux.

Plus sévères pour les usagers.

« Les Français doivent savoir qu’une personne dépendante est malade », rappelle Etienne Apaire, président de la MILDT. Or, l’opinion se durcit, notamment vis-à-vis des consommateurs l’héroïne. Seulement 24 % des sondés estiment que les héroïnomanes consomment parce qu’ils sont malades, contre 51 % en 1999. En 1999, 59 % des Français pensaient que ces usagers de drogue consomment à cause de problèmes familiaux, contre 43 % seulement aujourd’hui. Enfin, 84 % jugent les héroïnomanes dangereux pour l’entourage, soit 10 points de plus qu’en 1999.

La consommation de psychotropes et les perceptions des populations varient d’un pays à l’autre. Ainsi, la consommation de cocaïne quadruple chez les Espagnols et les Anglais par rapport à la nôtre. Pour aller plus loin, la MILDT ambitionne de réaliser cette enquête sur les représentations, opinions et perceptions sur les psychotropes au niveau européen.

* Enquête sur les représentations, opinions et perceptions sur les psychotropes (EROPP), réalisée du 27 octobre au 25 décembre 2008. Les deux précédentes enquêtes remontent à 2002 et 1999.

CHRISTINE COINTE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8799