L'anti-PD1 pembrolizumab (Keytruda) a récemment bénéficié de plusieurs accès précoces dans les cancers du sein triple négatifs. Caractérisés par l'absence des récepteurs hormonaux (RH) et HER2, les cancers du sein triple négatifs (CSTN) représentent 15 à 18 % des cancers du sein, soit environ 9 000 nouveaux cas par an en France. Les patientes concernées sont souvent jeunes, puisque 40 % ont moins de 40 ans. Avec 30 % de récidive à trois ans après l’annonce du diagnostic, ces tumeurs font partie des plus agressives. En métastatique, la médiane de survie globale n’est que de 14 mois, sans évolution depuis 20 ans.
Disponible pour 40 % des patientes en première ligne métastatique
Dans l’étude de phase 3 Keynote-355 (1) menée chez 847 patientes avec un CSTN localement récurrent non résécable ou métastatique, non prétraité à ce stade, l’ajout de l’anti-PD1 à la chimiothérapie améliorait significativement la médiane de survie globale (SG) par rapport à la chimiothérapie seule (23 versus 16,1 mois), réduisant de 27 % le risque de décès. Quant à la survie sans progression, elle était prolongée de quatre mois (9,7 versus 5,6 mois), soit une diminution de 35 % du risque de progression. Néanmoins, ces bénéfices ne concernent que les tumeurs exprimant PD-L1 avec un CPS (Combined Positive Score) ≥ 10, qui représentent 38 % des CSTN métastatiques (environ 1 000 patientes annuellement en France).
Ainsi, le pembrolizumab associé à la chimiothérapie a obtenu le 19 novembre 2021 une autorisation de mise sur le marché (AMM) en première ligne métastatique, dans la population de patientes étudiées avec un CPS ≥ 10, puis une autorisation d’accès précoce le 4 novembre 2021.
Début juin, au congrès de l'American Society of Clinical Oncology (Asco), l'anticorps conjugué trastuzumab-déruxtécan (Enhertu) a également montré des résultats très positifs, même en cas de RH négatifs, chez les patientes exprimant faiblement HER2 (considérées comme HER2 négatives), mais prétraitées au stade métastatique.
« La stratégie repose actuellement sur le pembrolizumab (associé à la chimiothérapie) en première ligne en cas de CPS ≥ 10 ou la chimiothérapie seule si CPS < 10, puis l’anticorps conjugué arrivera derrière », résume la Dr Anne-Claire Hardy-Bessard de l'hôpital privé des Côtes d'Armor (Plérin). Aujourd’hui, le seul anticorps conjugué bénéficiant en France d’un accès précoce dans les CSTN est le sacituzumab-govitecan (Trodelvy).
Un accès pré-AMM au stade précoce
Chez 1 174 patientes en phase précoce, l’étude Keynote-522 (2) a évalué le pembrolizumab associé à une chimiothérapie en néoadjuvant (versus chimiothérapie-placebo), puis le pembrolizumab en monothérapie adjuvante (versus placebo) en postopératoire.
Le schéma intégrant le pembrolizumab améliore significativement la survie sans évènement à trois ans par rapport à la chimiothérapie néoadjuvante seule (84,5 versus 76,8 %), réduisant de 37 % le risque de progression (HR = 0,63, p < 0,001). « Cette stratégie thérapeutique, plus fréquente, concerne beaucoup plus de patientes et change les pratiques », relève le Pr Jean-Yves Pierga de l'Institut Curie (Paris). En effet, le bénéfice est observé cette fois-ci dans les CSTN de stades 2 et 3, quel que soit le statut PD-L1, soit potentiellement 6 800 patientes par an en France.
L’anti-PD1 a reçu une autorisation d’accès précoce le 17 mars dernier, avant même l’octroi de l’AMM le 24 mai dans cette indication (CSTN localement avancé ou de stade précoce à haut risque de récidive, quel que soit le statut PD-L1) et selon le schéma de l’étude.
D’après la conférence de presse du laboratoire MSD, le 16 juin 2022
(1) J. Cortes et al., Lancet 2020 Dec 5;396(10265):1817-1828
(2) P. Schmid et al., N Engl J Med 2022; 386:556-567
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