Le Quotidien : Qu’est-ce que les gènes NTRK ?
Les gènes NTRK interviennent physiologiquement dans l’embryogenèse. Retrouvés mutés dans environ 1 % des cancers, ces trois gènes NTRK (Neurotrophic Tyrosine Receptor Kinase 1, 2 et 3) codent pour trois protéines TRK différentes (Tropomyosin Receptor Kinase A, B et C). La fusion d'un gène NTRK avec un autre gène est à l'origine d’une protéine de fusion anormale, comprenant des parties enzymatiques du gène NTRK, et qui constitue un oncogène. C’est un oncogène classique, capable d’activer la prolifération cellulaire. Cependant, le partenaire de la fusion, le gène NTRK, est extrêmement variable d’un cancer à l’autre et donc très difficile à détecter.
Ces gènes de fusion sont rencontrés dans deux cas de figure très différents :
- Les cancers très rares dans lesquels les gènes de fusion sont toujours exprimés, comme les fibrosarcomes infantiles, les cancers néonataux, des tumeurs rénales rares de l’enfant, les cancers du sein sécrétoires, des glandes salivaires... Dans ce cas, une fois le cancer rare identifié par l’anatomopathologiste, la recherche du gène de fusion est assez simple.
- Tous les cancers, les plus fréquents, recèlent un petit sous-groupe (représentant 0,2 % à 0,9 % d’entre eux) portant une de ces fusions NTRK. Variables dans leur structure, ils sont rares et donc difficiles à détecter. Ils nécessitent des techniques de biologie moléculaire très sophistiquées, éventuellement après une phase d’enrichissement par immunohistochimie (IHC).
Le problème n’est donc pas les cancers très rares où la mutation est très fréquente mais les cancers fréquents où la mutation est très rare.
Quels tests de détection utiliser ?
Il existe plusieurs tests de fiabilité et performances variables. La technique la plus simple est l’IHC. Elle permet de détecter une des trois protéines TRK, mais dont la présence ne signifie pas l'existance d'une translocation (caractéristique de la protéine de fusion anormale), qu'il faut ensuite aller chercher par une technique de biologie moléculaire plus performante. Si l’IHC n’est pas très coûteuse, sa sensibilité et sa spécificité de détection ne sont pas parfaites. De même, l’hybridation in situ en fluorescence (FISH) ne suffit pas non plus pour détecter les cancers avec fusion NTRK. La technique de référence est le séquençage de nouvelle génération (Next Generation Sequencing ou NGS), notamment le séquençage de l’ARN. Cependant, elle n’est techniquement pas à la portée de tous les laboratoires. De plus, s’agissant d’un test hors nomenclature partiellement remboursé, il faut d’abord repérer le patient, en échec aux traitements classiques, susceptible d’en bénéficier. Ainsi, la stratégie en deux temps, consistant à commencer par l’IHC puis à recourir si besoin au NGS, est financièrement raisonnable mais mobilise plus de ressources.
Quels sont les traitements actuellement disponibles ?
Il existe deux inhibiteurs des récepteurs TRK : le larotrectinib (Vitrakvi) et l’entrectinib (Rozlytrek). Tous deux approuvés par la FDA aux Etats-Unis, l’entrectinib est accessible en France grâce à un essai clinique et le larotrectinib dispose d’une ATU de cohorte. Ce dernier a été homologué en septembre par l’agence européenne du médicament et est en procédure d’évaluation par la Haute Autorité de Santé (HAS).
Comment la HAS va-t-elle pouvoir évaluer ces thérapies sans précédent ?
Nous n’avons pas l’histoire naturelle de cette maladie, ni de standards pour ces sous-groupes moléculaires tumoraux jusqu’alors mélangés à d’autres sous-types. L'amélioration du service médicale rendu n’a donc pas de sens, et il n’y a pas vraiment de moyen de faire une étude randomisée… De plus, il s’agit d’une nouvelle forme d’oncologie, très transversale, où c’est l’anomalie moléculaire qui oriente la décision thérapeutique quel que soit l’organe d’origine du cancer.
Pourtant, quelle est l’efficacité de ces traitements ?
Le service médical rendu par ces traitements est remarquable car ils procurent des taux de reponse élevés dans tous les sous-types histologiques : 70 % des patients traités ont une régression volumétrique majeure de leur maladie, avec des durées de réponse prolongées (supérieures à 20 mois) et une médiane de survie sans progression autour de 20 mois. C’est une révolution majeure pour ces patients qui bénéficient dorénavant d’une solution thérapeutique efficace, avec très peu de toxicités.
D’autres molécules se développent-elles ?
Il existe des inhibiteurs des récepteurs TRK de 2e génération (LOXO-195, TPX-105), déjà en essai clinique, qui bloquent certaines des mutations de résistances observées chez les patients en rechute à un inhibiteur de 1re génération (entretinib et larotrectinib). Ils peuvent permettre à ces patients en échec de répondre à nouveau.
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