Mélanome métastatique

Enfin des solutions thérapeutiques

Publié le 12/02/2015
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Crédit photo : PHANIE

Des mutations du gène BRAF sont détectées dans plus de la moitié des mélanomes. Il s’agit majoritairement de la mutation V600E, à l’origine d’une activation permanente de la protéine correspondante, une kinase située en amont de la mitogen-activated extracellular-signal-regulated kinase (MEK) sur la voie des MAP-kinases, voie impliquée dans la progression du mélanome.

Le vémurafénib et le dabrafénib ciblent spécifiquement cette enzyme et inhibent sa fonction de façon très importante en cas de mutation du gène BRAF. Mais les patients sous anti-BRAF échappent au traitement en quelques mois. L’idée a donc été d’associer un anti-MEK à un anti-BRAF. Deux articles, parus fin 2014 dans The New England Journal of Medicine, témoignent de l’intérêt d’une telle combinaison.

Une des études compare l’association dabrafénib (anti-BRAF) – tramétinib (anti-MEK), au dabrafénib seul. Le taux de rémission est de 67 % en cas d’association, versus 51 % pour le dabrafénib. Les taux de survie globale à 9 mois sont respectivement de 85 % et 77 % (1).

La deuxième étude compare la combinaison vémurafénib – cobimétinib (anti-MEK), au vémurafénib seul. On observe un taux de réponse de 68 % en cas d’association versus 45 % en cas de vémurafénib seul. La survie à 9 mois est de 81 % versus 73 % (2).

Enfin, une troisième étude compare l’association dabrafénib – tramétinib au vémurafénib seul. La survie globale à 12 mois est de 72 % pour la combinaison versus 65 % pour l’anti-BRAF seul (3).

« Avec ces associations, explique la Pr Brigitte Dreno (Nantes), on espère réduire les phénomènes d’échappement au traitement. Mais cela ne va-t-il pas activer la kinase ERK, située en aval de MEK sur la voie des MAP kinases ? Pour le moment, on ne sait pas. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas oublier qu’il existe des effets secondaires qui ne sont pas anodins ».

Des résultats jamais vus en immunothérapie

Un autre concept de traitement est de bloquer, par des anticorps, l’inhibition des lymphocytes T par des immune checkpoint inhibitors, quel que soit le statut BRAF. Après la révolution de l’immunothérapie par l’anti-CTLA-4 (ipilimumab) en 2011, les immunothérapies de deuxième génération par les anti-PD-1, nivolumab et pembrolizumab, montrent des résultats jamais vus en immunothérapie.

Le pembrolizumab donne un taux de réponse de 35 %, une survie globale des patients à 18 mois de 62 %. Des chiffres nettement plus élevés qu’avec l’ipilimumab (taux de réponse à 3 ans = 22 %) et des effets secondaires moins importants.

Avec le nivolumab, le taux de survie est de 63 % à 1 an, de 48 % à 2 ans et de 41 % à 3 ans. Les réponses sont fréquentes et de longue durée (40 % de réponse, survie médiane non atteinte). Ces effets mis en évidence dans des essais de phase 1 ont été jugés suffisants pour justifier des ATU de cohorte pour ces deux médicaments en France.

Une avancée très récente concerne le nivolumab. En effet, les résultats d’une étude le comparant à la carbazine chez des patients porteurs d’un mélanome métastatique, montrent que le nivolumab est associé à une nette amélioration de la survie globale à 1 an (73 %, versus 42 % dans le bras carbazine) et un taux de réponse objective de l’ordre de 40 % dans le bras nivolumab (4). L’étude a été interrompue précocement pour raison d’avantage évident dans le bras nivolumab en analyse intermédiaire.

Les taux de survie globale avec la combinaison ipilimumab-nivolumab sont de 85 % à 1 an et de 79 % à 2 ans (5). Des études sont en cours pour savoir s’il est intéressant de combiner une thérapie ciblée avec un anticorps monoclonal.

« Aujourd’hui, conclut la Pr Dreno, on ne peut plus dire au patient qu’il n’existe pas de solution pour traiter le mélanome métastatique. On dispose d’approches thérapeutiques différentes très intéressantes : la combinaison anti-BRAF anti-MEK dans les mélanomes mutés BRAF – mais attention aux effets secondaires –, les anti-PD1 qui ne dépendent pas du statut BRAF et qui ont moins d’effets secondaires que la combinaison précédente et moins d’effets d’échappement ; l’association de deux anticorps mais en apprenant à gérer les éventuels effets secondaires ».

Entretien avec le Pr Brigitte Dreno, chef de service de dermato-cancérologie, CHU Nantes

(1) Long GV. NEJM 2014 Sep 29

(2) Larkin J. et al. NEJM 2014 Sep 29

(3) Robert C. et al. Ann Oncol 2014. 25,1–41

(4) Robert C. et al. NEJM 2014,Nov 16

(5) ASCO, juin 2014. Ipilimumab/Nivolumab Combination Achieves Long-Term Survival for Patients With Advanced Melanoma.

Dr Brigitte Martin

Source : Bilan spécialistes