L’immunothérapie par cellules CAR-T (ou CAR-T cells) affiche des résultats préliminaires encourageants contre le glioblastome dans deux petites études publiées dans Nature Medicine et The New England Journal of Medicine. Chaque équipe a mis au point une nouvelle technique dont le but est de dépasser l’échappement tumoral rencontré dans l’évolution de ce cancer cérébral de mauvais pronostic : des cellules CAR-T bivalentes double cible et des cellules CAR-T capables de reconnaître aussi deux types de récepteurs mais en s’inspirant de la technique des anticorps bispécifiques. Autre point commun : les deux méthodes utilisent la voie intrathécale et non la voie intraveineuse standard.
La technique des cellules CAR-T repose sur l’utilisation du système immunitaire du patient, dont les cellules T ont été prélevées puis reprogrammées pour reconnaître des antigènes tumoraux. Cette technique s’est révélée un succès dans les cancers hématologiques (en particulier les leucémies et lymphomes) mais se heurte à l’hétérogénéité tumorale des glioblastomes et d’autres cancers solides. De plus, les glioblastomes, caractérisés par un fort taux de récidive, ont la capacité d’échapper au système immunitaire. La médiane de survie d’un glioblastome récurrent est moins d’une année.
Une thérapie ciblant l’EGFR et l’IL13Rα2
L’équipe de l’Université de Pennsylvanie explique ce 13 mars dans Nature Medicine avoir traité dans un essai de phase 1 les six premiers patients avec des cellules CAR-T bivalentes. Cette immunothérapie « double cible » est dirigée contre deux protéines fréquemment retrouvées dans les cancers cérébraux : le récepteur EGFR, présent dans 60 % des glioblastomes, et l’interleukine IL13Rα2, exprimée dans plus de 75 % de ces cancers.
L’imagerie par IRM réalisée 24 à 48 heures après l’injection a révélé une régression de la taille tumorale chez les six patients. Un phénomène qui s’est maintenu plusieurs mois chez quelques-uns d’entre eux. L’effet indésirable le plus sévère est la neurotoxicité, liée à la voie d’administration, qui a été rapportée par l’ensemble des patients, mais qui a pu être prise en charge.
Ces premières données sont encourageantes mais nécessitent un suivi plus long afin de déterminer la dose optimale, l’efficacité et la sécurité. « Ces résultats nous donnent de l’énergie, et nous sommes pressés de continuer notre essai pour mieux comprendre comment cette thérapie CAR-T double cible affecte un échantillon plus large de personnes avec un glioblastome récurrent », s’enthousiasme le Dr Donald O’Rourke, neurochirurgien et directeur du centre d’excellence sur le glioblastome au Centre contre le cancer Abramson (Philadelphie), l’auteur senior de l’étude.
Une régression quasi complète chez un patient
Dans la seconde étude, les résultats sont plus spectaculaires. L’équipe du Mass General Cancer Center expose les résultats de l’essai de phase 1 Incipient mené chez trois patients. Les chercheurs ont testé ici la technique appelée des cellules CARv3-TEAM-E T. Ce produit cible à la fois le récepteur EGFR muté tumoral et le récepteur sauvage EGFR, via la sécrétion de molécules anticorps engageant les cellules T (dites Team).
L’équipe avait précédemment testé une thérapie CAR-T ciblant l’EGFRIII muté, mais avec des effets limités. Le récepteur sauvage d’EGFR est exprimé dans plus de 80 % des cas. « Notre approche combine ici deux formes de thérapie, ce qui nous permet de traiter le glioblastome d’une façon plus large et potentiellement plus efficace », décrit le Dr Bryan Choi, neurochirurgien au Mass General cancer Center et premier auteur.
Durabilité de la réponse
Quelques jours après l’injection, les trois patients âgés de 74, 72 et 57 ans, tous en récidive après radiothérapie et chimiothérapie, ont répondu avec une forte diminution tumorale, avec pour l’un d’entre eux, le plus jeune, une régression quasi complète. La tolérance était correcte, même si tous ont eu de la fièvre et un état mental altéré après l’injection intrathécale.
Malgré cette réponse remarquable, une progression a été observée chez deux patients, en raison de la persistance limitée des cellules CAR-Team, un seul patient n’en a pas eu pendant plus de six mois.
« Notre travail à ce jour montre des signes comme quoi nous progressons, mais il y a encore beaucoup à faire », déclare la Dr Elizabeth Gerstner, neuro-oncologue au Massachusetts General Hospital et co-autrice de l’étude. L’équipe travaille maintenant à définir des stratégies pour prolonger la réponse et envisage de tester des injections répétées de CAR-Team ou un préconditionnement par chimiothérapie.
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