DÉCIDÉMENT, les pistes pour dépister ce « tueur silencieux » qu’est le cancer de l’ovaire s’avèrent bien décevantes. Alors que les critères cliniques ne permettent de dépister qu’un cancer sur 100 femmes atteintes selon une étude parue dans le « Journal of Clinical Investigation » (voir le « Quotidien » du 1er février 2010), un essai américain randomisé sur plus de 78 200 femmes montre qu’une intervention annuelle associant un dosage du CA-125 et une échographie pelvienne n’améliore pas la mortalité spécifique. Pire, il serait à l’origine de complications parmi les femmes faussement positives. Ce travail présenté au congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) s’intègre dans le programme de recherche américain sur le dépistage de cancers fréquents, prostatique, pulmonaire, colorectal et ovarien (PLCO Cancer Screening Trial).
Entre novembre 1993 et juillet 2001, ce sont 78 216 femmes âgées de 55 à 74 ans qui ont été incluses dans l’étude à partir de 10 centres américains pour un suivi maximal de 13 ans (médian à 12,4 ans, 10,9-13,0). Les participantes ont été randomisées soit dans le groupe intervention (n = 39 105), soit dans le groupe prise en charge habituelle (n = 39 111). Un toucher vaginal avec examen bimanuel était effectué en routine chez une forte proportion des femmes des deux groupes. Dans le groupe intervention, après l’évaluation initiale à l’inclusion, les examens étaient effectués une fois par an, pendant cinq ans pour le dosage du CA-125, pendant trois ans pour l’échographie pelvienne par voie vaginale.
Suivi intra-individuel du CA125.
Si un peu plus de cancers de l’ovaire ont été diagnostiqués dans le groupe intervention (212 versus 176), il apparaît que la mortalité n’est pas améliorée de manière significative (118 décès dans le groupe intervention, soit 3,1 pour 10 000 personne-années, versus 100 décès dans le groupe témoin, soit 2,6 pour 10 000 personne-années). En revanche, la morbidité parmi les faux positifs du groupe intervention n’est pas négligeable. Sur les 3 285 femmes fausses positives, 1 080 se sont vues proposer une intervention chirurgicale, souvent dans le cadre du diagnostic, avec, pour 163 d’entre elles, la survenue d’au moins une complication grave (15 %). La mortalité toutes causes confondues (hormis par cancer de l’ovaire, du poumon ou colo-rectal) n’était pas différente entre les deux groupes.
Les chercheurs expliquent leurs résultats par le fait que le seuil de détection de l’échographie n’est pas suffisamment performant pour dépister les tumeurs à un stade très précoce. Certaines études suggèrent en effet que pour avoir une efficacité tangible sur la mortalité, il faudrait être en mesure d’identifier de très petits cancers, bien plus petits que la limite actuelle des 10 cm3 pour les ultrasons. De même pour le CA 125, il faudrait pouvoir baisser le seuil en dessous des 35 UI/ml pour garantir un diagnostic précoce, mais au prix de nombreux faux positifs. À ce sujet, la piste du suivi longitudinal proposé par certains pourrait s’avérer intéressante, avec comme signe d’alarme les variations du marqueur au cours du temps chez un même individu.
Congrès de l’ASCO et JAMA, 8 juin 2011, volume 305, n° 22, 2 295-2 303.
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