DE NOTRE CORRESPONDANT
ON ESTIME que le mécanisme central de la déminéralisation consécutive aux traitements par les corticoïdes est une apoptose des ostéocytes (Silverman et coll., 2009). Les bases physiopathologiques de l’ostéonécrose de la tête fémorale sont moins claires. Il semble toutefois exister une contribution ischémique, même si l’on ignore si celle-ci est causale ou secondaire aux lésions du lit vasculaire. Mais il est intéressant de noter que l’ostéonécrose est un phénomène relativement marginal dans les adénomes sécréteurs d’ACTH. Ce qui a amené à se demander si l’hormone corticotrope pourrait avoir un rôle protecteur contre l’ostéonécrose liée aux glucocorticoïdes. L’existence de récepteurs (MC2R) à l’ACTH sur les ostéoblastes et le fait que leur activation favorise la prolifération de ces cellules tend à renforcer cette conception, et conduit à penser que l’ACTH pourrait exercer une régulation directe de la masse osseuse, sans passer par le circuit classique des cibles endocrines.
Pour tester l’hypothèse d’un rôle préventif de l’hormone corticotrope vis-à-vis de l’ostéonécrose, les Américains ont administré à des lapines du dépomédrol seul ou associé à de l’ACTH (0,2 µg/kg/j de cosyntropine) en injection sous-cutanée. Les animaux étaient sacrifiés à J24. La seule différence observée entre les deux groupes à l’examen des têtes fémorales était un aspect mité de l’os chez les lapines traitées par la seule méthylprednisolone (MPL), par rapport aux animaux avec ACTH associée. L’absorptiométrie biphotonique (DXA) quantitative et le marquage à la tétracycline ont, pour leur part, objectivé une élévation de 10 % et 30 %, respectivement (différence statistiquement non significative), de la densité osseuse au niveau de la tête fémorale chez les animaux ayant reçu l’ACTH, par rapport à ceux ayant reçu uniquement de la MPL.
La répétition du test à la tétracycline avec des doses plus importantes (10 mg/kg) met en évidence une réduction de 50 % de la surface nécrotique au niveau de la tête fémorale dans le groupe MPL + ACTH par rapport au groupe MPL seule. Cette observation s’accompagne d’une augmentation significative de l’expression de l’ARNm du VEGF au niveau de la moelle osseuse des animaux MPL + ACTH à la PCR quantitative. Ce qui suggère que l’ACTH soutient l’activité ostéoblastique au travers de l’expression du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire.
Les auteurs confirment cette hypothèse par une étude réalisée ultérieurement sur des cellules stromales de moelle osseuse de souris et sur des cellules souches mésenchymateuses (CSM) humaines. La PCR quantitative appliquée aux cellules murines indique que l’ACTH stimule l’expression de plusieurs marqueurs de la maturation ostéoblastique, et que cette action s’exerce au-delà de 28 jours de culture, ce qui suggère que les effets de l’hormone se manifestent (en tout cas chez la souris) à un stade relativement tardif de la différenciation ostéoblastique. Les études faites avec les CSM humaines confirment les observations chez la souris : l’ACTH induit ainsi une surexpression des gènes COLLAGEN type1, RUNX2 et VEGF. L’équipe de M. Zaidi a, en outre, pu vérifier que le VEGF stimulé par l’addition d’ACTH était majoritairement sécrété par les ostéoblastes, et non par les monocytes.
Ces travaux démontrent, de manière convaincante, que l’administration d’ACTH réduit l’ostéonécrose expérimentale de la tête fémorale induite chez le lapin par l’injection d’acétate de méthylprednisolone. Les études in vivo indiquent que l’hormone corticotrope exerce cette action en favorisant la sécrétion de VEGF tandis que les études in vitro montrent que l’ACTH soutient la maturation et la survie des ostéoblastes au travers de la sécrétion de VEGF par ces cellules, via le récepteur MC2R de l’ACTH. Les auteurs en concluent qu’il est possible d’envisager l’utilisation de cette hormone pour prévenir l’ostéonécrose de la tête fémorale, une complication redoutable des traitements corticoïdes au long cours.
M Zaidi, HC Blair et coll. ACTH protects against glucocorticoid-induced osteonecrosis of bone. Proc Natl Acad Sci USA (2010) Publié en ligne.
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