C’EST PEUT-ÊTRE bien l’outil qui faisait défaut aux urgences hospitalières que viennent d’évaluer des chercheurs de Bordeaux. Ils montrent la valeur d’un test sanguin qui permettra de préciser le degré de gravité d’un traumatisme crânien léger. Il s’agit du dosage d’une protéine produite par les astrocytes en réponse à un stress, S100-B. Des travaux antérieurs avaient permis de former des espoirs sur son dosage en urgence. Cela demandait à être confirmé. Emmanuel Lagarde (INSERM U897), Régis Ribereau-Gayon (Centre hospitalier de Bordeaux) et coll. publient leurs résultats dans «Annals of Internal Medicine».
S100-B, dans les 6 premières heures.
L’étude prospective a été réalisée auprès de 2 128 patients consécutifs vus au CHU de Bordeaux entre décembre 2007 et février 2009. L’enrôlement était réalisé sur le diagnostic traumatisme crânien léger (score de Glasgow entre 13 et 15). Pour 1 560 d’entre eux ont été réalisés un scanner cérébral et un dosage de S100-B, dans les 6 premières heures. L’objectif principal était de juger la place diagnostique du dosage sanguin en se concentrant sur sa valeur négative et son ratio de probabilité de négativité.
Les scanners ont révélé des lésions intracrâniennes chez 7 % des patients (n = 111), il s’y associait un taux médian de S100-B de 0,46 µg/l. Chez les autres patients au scanner normal, le dosage montrait une médiane de 0,22 µg/l. Avec une limite fixée à 0,12 µg/l, les lésions cérébrales ont été confirmées grâce au scanner avec une sensibilité de 99,1 % et une spécificité de 19,7 %. La valeur prédictive négative du dosage était estimée à 99,7 %. Le ratio de probabilité de résultat positif était de 1,24 et celui de résultat négatif de 0,04. Les auteurs ajoutent que parmi les 292 patients dont le test biologique était considéré comme négatif, un seul avait un scanner positif (les suites ont été simples). À part ce cas, ils considèrent donc que chez un patient au dosage de S100-B négatif le risque de survenue d’une complication du traumatisme crânien mineur peut être quasiment exclu.
Valeur prédictive négative à 99,7 %.
Ce constat offre une réponse à un débat sur la décision de réaliser un scanner cérébral dans ces situations. Cet examen est certes considéré comme la référence en matière de recherche de lésions mettant potentiellement en jeu la vie des patients. Cependant il est aussi considéré comme onéreux, inconstamment disponible (6 heures d’attente, parfois), révélant des lésions parlantes dans moins de 10% des cas et exposant le patient à une irradiation 100 fois supérieure à celle de la radiographie classique. Ce point prend une résonance toute particulière lorsqu’il s’agit d’enfants.
Le dosage de S100-B permet de contourner ces obstacles, par sa disponibilité, son délai de réponse d’une heure environ, son faible coût estimé à 15 euros et son excellent taux de faux négatifs. Cette protéine de 21 kDa se lie spécifiquement au calcium des cellules gliales. Elle était considérée jusqu’à présent comme un marqueur pronostique des traumatismes crâniens sévères. Le travail français confirme l’extension de son champ d’application aux formes légères.
L’équipe juge que l’étude compte au nombre de ses limitations une restriction aux patients n’ayant pas de lésions autres que crâniennes. L’idée était de ne pas risquer de perturber le dosage de la protéine. Autre limite, tous les patients ont été recrutés dans un seul et même service d’urgence. En outre, 44 % des patients avaient plus de 65 ans, ce qui constitue en soi un facteur de risque de complications. Dès lors, les chercheurs pensent nécessaire de réaliser des études prenant en compte les classes d’âge, notamment les enfants afin de réduire les irradiations.
Les services d’urgence français reçoivent annuellement environ 100 000 traumatisés crâniens dont 90 % sont considérés comme légers. Ces nombres donnent une idée de l’intérêt du dosage de la protéine S100-B tant du point de vue clinique que de celui des dépenses de santé.
Annal of Emergency Medicine, 26 septembre 2011.
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