LA DÉNOMINATION des luxations invétérées de l’épaule n’a jamais été précise et définitive. La terminologie rencontrée dans la littérature est assez polymorphe, incluant les termes de luxations « anciennes », « vieilles », « méconnues », « chroniques », « fixées », « négligées » , « irréductibles », ou « invétérées », terme le plus couramment consacré, issu étymologiquement du verbe latin « veterare » qui signifie enraciner avec le temps, conserver longtemps .
La définition est classiquement celle d’une luxation non réduite après la troisième semaine. Ce délai correspondant schématiquement au moment où les chances de réduction orthopédique s’amenuisent très fortement.
Les luxations antérieures.
Elles représentent la forme la plus rare, touchant volontiers des patients âgés. Elles sont dans la majorité des cas, traumatiques. Le diagnostic de luxation initiale peut passer inaperçu, notamment dans un contexte psychiatrique ou gériatrique malgré des aspects cliniques et radiographiques caractéristiques connus de tous. La douleur initiale, intense au moment du traumatisme, va très rapidement diminuer sans s’estomper totalement. La limitation des amplitudes articulaires passe au premier plan : la mobilité globale reste limitée en abduction et en rotation interne. Bien que la plainte principale soit un déficit fonctionnel, la luxation devient parfois assez bien tolérée avec le temps, ce qui explique d’ailleurs la méconnaissance fréquente de la lésion.
Le diagnostic est évident dès l’imagerie standard. Le scanner est indispensable car il permet d’appréhender le siège exact et l’étendue des lésions osseuses de passage antérieur. L’état de la coiffe des rotateurs doit être objectivé par IRM ou arthro-scanner si un geste prothétique est envisagé chez ce sujet âgé.
Les luxations postérieures.
Elles sont déjà un peu plus fréquentes, touchant des adultes d’age moyen. Elles résultent de la méconnaissance de la lésion initiale dans près de deux tiers des cas, malgré des circonstances souvent évocatrices, car elles sont souvent postconvulsives, donc volontiers bilatérales. Une luxation postérieure peut être également méconnue chez un polytraumatisé grave, du fait de l’importance des multiples lésions associées qui viennent accaparer toute l’attention initiale des équipes médicales multidisciplinaires.
En raison de l’adaptation fonctionnelle de l’articulation scapulo-thoracique, la flexion active peut être relativement conservée autour de 90°. En revanche, le blessé n’a plus de rotation externe passive ou active, signe pathognomonique.
Le traitement est souvent décevant.
Plus particulièrement pour les luxations postérieures, l’imagerie peut être trompeuse sur la radiographie de face, à tort, considérée comme normale en cas de lecture rapide, non attentive. La face doit être impérativement complétée par des incidences de profil, comme le profil axillaire ou le profil de Lamy. Le scanner est indispensable pour préciser la profondeur et l’étendue de l’encoche antéro-interne, dépistée sur le profil axillaire et apprécier le capital osseux résiduel glénoïdien pour appréhender les possibilités thérapeutiques chirurgicales, codifiées selon l’étendue de cette encoche.
Que la luxation invétérée soit antérieure ou postérieure, les chances de succès d’une réduction orthopédique s’amenuisent rapidement après la troisième semaine. Lors de la tentative de réduction, le risque de fracture de l’extrémité supérieure de l’humérus devient majeur en raison de l’ostéoporose, aggravée par la non utilisation du membre. Les propositions thérapeutiques vont de l’abstention simple (solution parfois de sagesse), à l’arthroplastie totale de l’épaule, anatomique, voire inversée, en passant par un spectre étendu d’autres alternatives chirurgicales. Ces dernières recouvrent divers gestes chirurgicaux de concepts parfois fort éloignés les uns des autres, visant à obtenir une stabilisation chirurgicale après réduction obtenue, la plupart du temps, par une voie d’abord antérieure delto-pectorale.
En fait, le meilleur traitement de ces luxations est préventif : les reconnaître au stade aigu. Penser à rechercher une limitation de la rotation externe active comme passive permet facilement de déceler une luxation postérieure dont les signes fonctionnels sont frustes et déroutants.
D’après la conférence d’enseignement SOFCOT 2010 du Pr Eric Vandenbussche (hôpital européen Georges Pompidou, Paris).
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