Les prothèses articulaires se sont imposées comme un immense service rendu au patient en termes de récupération d’une autonomie fonctionnelle. Cependant, la survenue d’une infection périprothétique constitue une complication dévastatrice difficile et coûteuse à traiter, voire comportant, dans certains cas extrêmes, un risque mortel ou d’amputation, plus particulièrement pour les prothèses de genou.
L’infection survient dans 0,5 % à 2 % des cas et peut représenter un quart des ré-interventions prothétiques. Tous les patients ne sont pas égaux face à ce risque, et de nombreux facteurs de risque ont été identifiés. Ils méritent une attention particulière lors de la consultation pré-opératoire, car ils orientent la décision thérapeutique.
Certains facteurs de risque sont modifiables...
80 % des candidats aux arthroplasties présentent au moins un facteur de risque d’infection, dont les plus fréquents sont l’obésité, l’anémie, la malnutrition et le diabète.
• L’obésité. Avec un taux d’infection proche de 5 % chez les obèses et de 10 % chez les obèses et diabétiques, l’intervention est contre-indiquée en cas d’obésité morbide (BMI› 40).
• L’anémie. La cause doit être recherchée et traitée en préopératoire.
• La dénutrition. L’optimisation du statut nutritionnel réduit le risque infectieux.
• Le diabète. Le risque est multiplié par 4, en particulier si le diabète est déséquilibré.
• La polyarthrite rhumatoïde et ses traitements. Le risque augmente avec la durée d’évolution de la maladie, son absence de contrôle, l’utilisation des anti-TNFα ou d’une corticothérapie› 10 mg/j.
• L’intoxication tabagique. Le risque est doublé chez les fumeurs mais réversible en cas de sevrage pré et postopératoire.
• Anticoagulants efficaces péri-opératoire. L’indication est à évaluer au cas par cas.
• Le niveau socio-économique. Plus il est bas, plus la fréquence des pathologies associées augmente.
• Une mauvaise hygiène corporelle.
• L’alcoolisme. Une baisse de consommation est recommandée.
• La prise de drogues IV. Le taux d’infection est important (25 %) et l’indication difficile. Il faut distinguer les anciens toxicomanes de ceux non sevrés ou à risque de rechute important.
• Le VIH. Sous trithérapie efficace, il n’y a pas de surrisque. Le traitement antirétroviral ne doit pas être interrompu.
• Une infection bactérienne à distance (cutanée, urinaire, digestive, pulmonaire, dentaire…). Le dépistage et le traitement de ces foyers infectieux permettent de limiter le risque d’infection secondaire par diffusion hématogène ou par contiguïté.
• Les infections buccodentaires. Le dépistage est systématique avant une arthroplastie. Chez le sujet avec prothèse, l’antibioprophylaxie n’est plus indiquée en cas de geste buccodentaire.
• Des lésions cutanées. L’évaluation de la qualité des cicatrices, lymphœdème, trophicité, vascularisation reste subjective mais essentielle. Les foyers infectieux évolutifs (érysipèle, ulcère ou folliculite) sont une contre-indication à l’intervention tant qu’ils ne sont pas cicatrisés.
...D’autres non
L’évaluation des facteurs de risque non modifiables aide à déterminer le profil de risque infectieux du patient.
• L’âge. Le risque augmente jusqu’à 6 ans puis diminue au-delà.
• Le sexe. Les hommes sont plus sujets au risque infectieux.
• La prédisposition génétique.
• Les antécédents locaux chirurgicaux. Ils majorent le risque d’infection. Toute reprise d’arthroplastie étant suspecte d’infection, il est prudent de réaliser une documentation microbiologique.
• Les antécédents infectieux sur le site opératoire. Le taux d’infection est augmenté de façon inversement proportionnelle à l’intervalle libre. Une arthroplastie peut être réalisée, idéalement 2 ans après la guérison de l’infection, en prenant soin de réaliser des prélèvements bactériologiques peropératoires, une synovectomie complète et de prolonger l’antibiothérapie peropératoire jusqu’aux résultats microbiologiques définitifs.
• Une colonisation urinaire. Une bactériurie asymptomatique augmente le risque infectieux, mais son traitement ne modifie pas le taux d’infection de prothèse. Le dépistage des colonisations urinaires avant arthroplastie n’est plus recommandé.
• Le portage nasal du Staphylococcus aureus. Il augmente le risque d’infection du site opératoire mais sans preuve d’efficacité de la décontamination en orthopédie.
• L’immunodépression due aux maladies chroniques. Les patients hémodialysés, greffés rénaux, cirrhotiques, néoplasies.
Impact sur la décision chirurgicale
Le dépistage des facteurs de risque débute lors de la consultation pré-opératoire, puis s’organise de façon multidisciplinaire, de façon à définir un profil de risque d’infection propre à chaque patient. S’agissant d’une chirurgie fonctionnelle non urgente, la période pré-opératoire est idéale pour évaluer et corriger les facteurs de risque modifiables et faire que le patient soit opéré dans les meilleures conditions physiologiques possibles.
Le patient doit être sensibilisé au risque infectieux, son dépistage et sa prévention afin de l’impliquer, l’éduquer et le responsabiliser. Un contrat de perte de poids ou de sevrage tabagique, par exemple, peut être proposé avant d’envisager une intervention.
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