Par le Pr Michel Faure*
L’ACNÉ est androgénodépendante. Un traitement hormonal de l’acné féminine se conçoit même en l’absence d’hyperandrogénie biologique. Les traitements hormonaux de l’acné sont, d’une part les contraceptions estroprogestatives (OP) à activité antiandrogénique, d’autre part les antiandrogènes vrais. Ces derniers (acétate de cyprotérone, spironolactone) sont à réserver aux acnés associées à un hirsutisme, aux acnés sévères et aux acnés tardives si la contraception antiandrogénique n’est pas suffisante. La spironolactone (hors AMM) peut également représenter une alternative aux OP antiandrogéniques, en cas de contre-indication aux estrogènes et chez l’adolescente en l’absence de désir de contraception.
Rappelons d’abord que les progestatifs sont capables de se fixer aux récepteurs aux androgènes (AR) et, selon le progestatif, d’exercer un effet agoniste ou antagoniste. La plupart des progestatifs ont ainsi un effet androgénique. C’est ainsi que les contraceptions progestatives sont toutes potentiellement androgéniques. Quant aux OP, leur effet androgénique ou antiandrogénique potentiel est la résultante de : (1) l’effet antiandrogénique antigonadotrope de l’OP, (2) l’effet antiandrogénique (élévation de la SHBG) de l’estrogène et (3) l’effet propre périphérique du progestatif après fixation aux récepteurs AR. La plupart des OP (voie orale, patch, anneau) sont ainsi androgéniques et responsables d’acné. En revanche, l’acétate de cyprotérone (CPA), l’acétate de chlormadinone (CMA), le dienogest, la drospirénone et le norgestimate sont antiandrogéniques. Il s’agit d’OP dits de 4e ou de 3e génération (norgestimate). Les indications de ces OP en cas d’acné sont le désir de contraception chez les femmes acnéiques et la prise en charge des acnés dites légères ou discrètes.
Quant à l’amélioration clinique de l’acné sous OP, quelques rares études seulement répondent aux critères scientifiques actuels de validation thérapeutique (double aveugle, randomisation, contre placebo). Elles concernent l’association triphasique à base de norgestimate (3e génération), les associations EE 20 γ + lévonorgestrel 100 γ (2e génération), EE 30 γ + acétate de chlormadinone 2 mg (4e génération) et EE 20 γ + drospirénone 3 mg, 24/4 (4e génération).
Éviter les contraceptions hormonales androgéniques.
Dans la prise en charge d’une acné on évitera les contraceptions hormonales androgéniques, et l’on privilégiera certes les OP avec progestatif dit antiandrogénique. Ils correspondent cependant à des OP dits de 4e ou même de 3e génération, pour lesquels le risque d’accident vasculaire thrombotique, essentiellement lors de la première année de contraception, est plus important que sous OP de 2e génération. Il est donc essentiel de ne pas conseiller, même en cas d’acné, un OP de 3e ou 4e génération en première intention. En cas de première prescription d’une pilule du fait de l’acné, on aura recours à l’association de 2e génération EE 20 γ + lévonorgestrel 100 γ (Leeloo, Lovalulo par exemple), seule association avec progestatif non antiandrogénique qui a montré qu’elle pouvait améliorer l’acné. En cas de non-réponse, le « switch » pour un OP antiandrogénique ne se fera qu’en deuxième intention, après un an de contraception.
L’association EE 35 γ + lévonorgestrel 100 γ + CPA 2 mg (Diane 35 et copies) est à part. Il s’agit d’une association OP antiandrogénique (donc antiacnéique) qui n’a d’AMM que comme antiacnéique. Elle a depuis plusieurs années, depuis la commercialisation des autres OP de 4e génération, tous les inconvénients de ces OP (les risques thrombotiques) sans avoir leur avantage (l’AMM en contraception). De plus et enfin, les études comparant les effets sur l’acné de ces OP à Diane 35 n’ont pas montré de supériorité de Diane 35. Il n’existe ainsi aucune raison logique de prescrire actuellement cette association en cas d’acné.
Pour résumer.
En cas d’acné sous contraception hormonale, on conseillera tout d’abord un changement de contraception pour un OP dit antiandrogénique, en l’absence de contre-indication bien sûr. Il s’agira des associations EE (ou E2) + drospirénone (Jasmine, Jasminelle, Yaz, Yaz continu), dienogest (Qlaira), acétate de chlormadinone (Belara) ou norgestimate (Triafemi, Tricilest). Ces OP ont tous une AMM en contraception.
En cas de mise sous contraception du fait de l’acné (acné féminine de l’adolescence, acné tardive après 20 ans, soit acné discrète ou moyenne, soit acné sévère justifiant la prise d’isotrétinoïne) d’une acnéique sans contraception , le « choix » est limité à l’association EE 20 γ + lévonorgestrel 100 γ. En cas d’ « échec », le recours à un OP antiandrogénique aura lieu dans un second temps.
Ainsi, le recours à une contraception hormonale adaptée concerne d’une part la prise en charge de l’acné de l’adolescente, d’autre part celle de l’acné féminine tardive. Dans ce cas, il ne s’agit plus de traiter l’acné par cures d’antiacnéiques, mais d’envisager un traitement de fond de la femme à tendance acnéique : traitement topique seul (BPO et/ou rétinoïde) ou associé à une contraception antiandrogénique, si elle est possible, et, en cas d’échec, adjonction d’antiandrogène (CPA 25 mg ou 50 mg), ou recours à la spironolactone.
Oui, la contraception hormonale a bien toujours une place dans la prise en charge de l’acné féminine.
*Professeur des universités, praticien hospitalier, université Claude-Bernard, hôpital Edouard- Herriot, Lyon.
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