Une étude observationnelle française réalisée à partir de la cohorte NutriNet-Santé montre une association probable entre augmentation de la part des aliments ultratransformés (plats préparés contenant des additifs, sodas…) et mortalité toutes causes. Cette étude est parue dans « JAMA Internal Medicine ».
« À notre connaissance, il s'agit de la première étude à avoir analysé le lien avec la mortalité », indique au « Quotidien » Mathilde Touvier, directrice de recherche à l’INSERM et co-auteur de l'étude. De précédentes études ont en revanche montré une augmentation du risque de maladies non transmissibles (hypertension, dyslipidémie, cancer, syndrome du côlon irritable…). Mathilde Touvier et son équipe ont notamment publié en 2018 une étude dans le « BMJ » suggérant un lien entre consommation d'aliments ultratransformés et cancer.
Des données d'une grande précision
Plus de 44 000 participants de plus de 45 ans ont été inclus entre 2009 et 2017. En moyenne, les aliments ultratransformés représentaient 14,4 % du poids total des aliments consommés et 29,1 % de l'apport énergétique total. Une consommation élevée de ces aliments était davantage retrouvée chez des individus jeunes, vivant seuls, ayant un indice de masse corporelle élevée, à faible niveau de revenu et d'études et ayant une faible activité physique.
« La force de NutriNet-Santé est de collecter des données d'une grande précision », souligne Mathilde Touvier. Les participants sont invités à trois reprises à fournir les informations sur leur consommation (boissons et alimentation) sur 24 heures, et ce tous les 6 mois. « Ils ont le choix parmi plus de 3 300 items. Pour les produits industriels, la marque des produits est indiquée, et les portions consommées sont quantifiées à partir de photos validées », détaille la chercheuse.
En éliminant autant que possible les facteurs confondants, les chercheurs ont estimé qu'une augmentation de 10 % de la part d'aliments transformés dans l'alimentation est associée à une augmentation de 14 % de la mortalité, et ce quel que soit le niveau de consommation initiale. « Nos données suggèrent une relation linéaire, dans la limite de l'intervalle étudié », précise Mathilde Touvier.
Objectif de réduction de 20 % entre 2018 et 2021
Cet effet délétère des aliments ultratransformés pourrait s'expliquer à la fois par leur moins bonne qualité nutritionnelle (plus de sucres et de gras, moins de fibres…), la présence d'additifs et de composés néoformés survenant au cours des procédés de transformation et le risque lié aux emballages (comme la présence de bisphénol).
« D'autres études observationnelles doivent être menées dans d'autres populations pour déterminer si ces résultats sont reproductibles ou non », insiste la chercheuse, précisant que les études expérimentales, sur l'effet cocktail des additifs par exemple, sont également essentielles pour comprendre les mécanismes sous-jacents.
« C'est seulement lorsque nous aurons plusieurs éléments concordants que nous aurons un niveau de preuve suffisamment solide », ajoute-t-elle. En attendant le principe de précaution est de mise : le volet prévention de la stratégie nationale de santé 2018-2022 a fixé un objectif de réduction de 20 % de la consommation d'aliments ultratransformés entre 2018 et 2021.
« Les études observationnelles sont fondamentales pour faire avancer les connaissances, la réalisation d'essais contrôlés randomisés n'étant pas envisageable d'un point de vue éthique pour étudier les effets à long terme des aliments ultratransformés », conclut la chercheuse, qui invite les professionnels de santé à promouvoir la participation à NutriNet-Santé auprès de leurs patients (www.etude-nutrinet-sante.fr).
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