La néophobie est à l’origine d’un changement de comportement alimentaire. Lorsqu’elle se déclare, les enfants se mettent à trier les aliments mélangés. Ils les examinent, sentent, les refusent ou les recrachent. Ils grimacent, refusent d’ouvrir la bouche ou détournent la tête. Pour aider l’enfant à passer cette phase, plusieurs mesures sont conseillées. Il faut notamment le familiariser avec l’aliment : au moins cinq expositions sont souvent nécessaires pour le lui faire accepter. Le contexte de présentation doit également être chaleureux et rassurant. Et les parents doivent donner l’exemple, en consommant de nouveaux aliments régulièrement.
Des troubles exacerbés
Chez les enfants qui souffrent de handicap, la néophobie peut-être davantage marquée. Dans le cas de l’autisme par exemple, la néophobie peut interférer avec le processus de sociabilisation. Les troubles du spectre autistique (TSA) sont caractérisés par des altérations des interactions sociales, de la communication ainsi que par un répertoire d’intérêts et/ou d’activités restreintes, voire stéréotypées. Certains comportements problématiques peuvent toucher la sphère de l’alimentation. Ces derniers seraient, d’ailleurs, plus fréquents au sein de la population autistique que dans d’autres pathologies et chez les enfants typiques (Dominick, 2007).
Quand un TSA est présent, la phase de néophobie a tendance à se prolonger. La sélection des aliments est également plus intense. « Les TSA s’accompagnent de difficultés de communication, d’interaction sociale, d’une hyper (ou d’une hypo) sensibilité aux réactions, mais aussi, aux goûts et aux textures. Ces enfants sont très sensibles au contenu de leur assiette et à leur environnement, tels que les odeurs ou les bruits trop importants (à la cantine, par exemple) », souligne Amandine Rochedy, maîtresse de conférence à Toulouse et chercheuse en sociologie sur les pratiques alimentaires des enfants et des adolescents en population générale et spécifique. « Quand un TSA est présent, le processus de néophobie se modifie. Elle peut être plus longue, plus intense ou les deux, mais elle peut également s’intensifier au cours du développement ou arriver plus tardivement », ajoute-t-elle.
Des difficultés spécifiques
En matière d’alimentation, les enfants ayant un TSA accumulent les difficultés : le passage aux aliments contenant des morceaux est souvent problématique, car ils présentent fréquemment des troubles oromoteurs [lire p. 9]. Ils éprouvent également des difficultés pour s’approprier les manières de table. « Les parents deviennent souvent des experts : ils se familiarisent avec la maladie de leur enfant. Ils ont une vision globale de ses pratiques alimentaires. Mais ils ne doivent pas rester seuls », note Amandine Rochedy. L’accompagnement par des professionnels de santé, capables d’aider l’enfant différent à mieux intégrer l’acte alimentaire, est indispensable.
« Quel que soit le handicap (autisme, trisomie, prématurité, maladies génétiques syndromiques…), lorsque la relation avec l’acte alimentaire se passe mal — durant la petite enfance et parfois dès les premières heures de vie — le tout-petit grandit en ayant l’impression que l’alimentation est une contrainte. Notre rôle, et celui des parents, est d’accompagner l’enfant pour que cela devienne un plaisir. Il faut le laisser maître de ses expériences orales en le laissant, par exemple, sentir et toucher les aliments contenus dans son assiette », indique Laure Soulez Larivière, diététicienne et orthophoniste.
Il ne faut pas non plus avoir peur de leur apporter de la nouveauté. « Certains enfants ayant un TSA ne mangent que deux ou trois types d’aliments : la monotonie les rassure et le moindre changement les inquiète. Les parents ne doivent pas hésiter à diversifier le contenu de l’assiette, même si les nouveaux aliments ne sont pas consommés immédiatement », rappelle-t-elle. Ainsi, de façon progressive, le répertoire alimentaire s’élargit jusqu’à atteindre l’équilibre.
Dans l’intervalle, une supplémentation vitaminique peut être nécessaire pour les enfants dont l’alimentation est très restreinte. 75 à 80 % des enfants passent par une phase de néophobie alimentaire. Cette étape est souvent prononcée chez les enfants présentant un TSA, mais elle n’est pas universelle : certains ne l’expérimentent jamais.
Exergue : « Le tout-petit grandit en ayant l’impression que l’alimentation est une contrainte »
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