Les mécanismes impliqués dans la régulation de la triglycéridémie sont complexes et restent, pour certains, encore inexpliqués. Le Pr Philippe Moulin, de la Fédération d’endocrinologie diabétologie, maladies métaboliques et nutrition et Inserm UMR CARMEN 1060 (Lyon) les a passés en revue lors d'une conférence plénière aux Journées francophones de nutrition (JFN, Montpellier, 30 novembre, 2 décembre 2016). « Il s’agit d’un équilibre complexe entre la synthèse des triglycérides d’origine intestinale où des mécanismes restent non élucidés au niveau de l’entérocyte, résume-t-il, la production des lipoprotéines de très basse densité (Very Low Density Lipoprotein) au niveau de l’hépatocyte, la lipolyse des triglycérides contenus dans ces lipoprotéines et leur épuration hépatique ».
Hypertriglycéridémie, facteur plutôt que marqueur de risque cardiovasculaire
À propos du risque lié à l’hypertriglycéridémie, pendant longtemps celle-ci a été considérée comme non athérogène, face à un HDL-cholestérol reconnu comme puissant facteur de risque cardiovasculaire. Ce point de vue est désormais remis en cause et le rôle pro-athérogène des hypertriglycéridémies ressort depuis quelques années au travers de recherches génétiques qui vont toutes dans la même direction. En considérant différents gènes impliqués dans la variation des taux de lipides sanguins, « on obtient une relation étroite entre variabilité de la triglycéridémie et complications cardiovasculaires, poursuit-il. Même en ajustant à l’expression d’autres variants génétiques capables d’influencer les taux de LDL-cholestérol et de HDL-cholestérol, cette relation reste forte ». Ceci a été établi lors d’une étude majeure ayant inclus près de 190 000 personnes de différentes ethnies. 12 loci liés aux taux de lipides sanguins ont été identifiés comme associés à la survenue de complications cardiovasculaires (1). Ceci a très élégamment été démontré dans une étude prospective (2), où une série de polymorphismes génétiques (ApoC3, Apo A5, LPL) a été identifiée comme infléchissant la triglycéridémie. De façon systématique, les sujets porteurs de ces variants génétiques en cause dans une triglycéridémie basse avaient une probabilité moindre de complications cardiovasculaires ou ischémiques. « L’ensemble de ces données suggèrent qu’être hypertriglycéridémique est potentiellement pro-athérogène, estime le Pr Moulin, avec un effet-dose certain. Après ajustement global, y compris sur le diabète, l’obésité ou la consommation d’alcool, la relation est amortie mais persiste ».
En somme, les déterminants génétiques conditionnant la triglycéridémie seraient intimement liés aux maladies cardiovasculaires, contrairement à ceux impliqués dans les fluctuations des taux de HDL-cholestérol. Pour le Pr Moulin la chose est entendue : « la littérature récente confirme d’une part que le HDL est bien un excellent marqueur de risque cardiovasculaire mais n’est plus un facteur causal établi de risque ».
Bien que les essais randomisés montrant un bénéfice cardiovasculaire de la réduction des triglycérides soient rares, de nouvelles molécules abaissant les taux de triglycérides sont en cours de développement, en phase 3. Il s’agit de nouveaux fibrates et, pour les hypertriglycéridémies sévères, d’ARN antisens abaissant l’apo C3.
(1) Nature Genetics 2013;45:1274–83
(2) The Lancet 2014;384(9943):626-35
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