La consommation de boissons sucrées est associée à un sur risque d’obésité et de diabète de type 2. On imagine donc que les boissons édulcorées, dites light, moins caloriques, réduisent ce risque. Mais cela n’a jamais été formellement démontré. Et plusieurs études plaident une association positive entre consommation de light et risque de syndrome métabolique, surpoids ou diabète de type 2 (1). Aujourd’hui l’analyse de la cohorte française E3N vient relancer le débat (2).
«Dans cette cohorte très bien suivie, on retrouve plus d’apparition de diabète de type 2 chez les grandes consommatrices des boissons sucrées mais aussi de boissons light. Et ceci après divers ajustements et en partie indépendamment du poids », résume la Dr Françoise Clavel-Chapelon (Inserm U1018, équipe nutrition, hormones et santé des femmes, Villejuif). Des mécanismes physiopathologiques plus complexes (modification de l’insulinémie, etc.) influent donc probablement le risque de diabète. Et la mise en œuvre d’études randomisées, seules à même de prouver ou réfuter l’implication causale entre consommation de light et risque de diabète de type 2, semble désormais indispensable.
Plus de 14 ans de suivi de près de 70 000 femmes.
La cohorte E3N, lancée en 1990, rassemble près de 100 000 enseignantes adhérentes de la MGEN. Après exclusion des questionnaires nutritionnels manquants ou incomplets (30 000 cas), des femmes déjà diabétiques (879 cas) et de celles ayant le plus haut ou le plus bas ratio apport/dépense énergétique (1 453 cas), 66 118 femmes ont été retenues pour l’analyse. Parmi elles, 1 369 sont devenues diabétiques entre 1993 et 2007.
Chez ces femmes, de 53 ans d’âge moyen à l’inclusion, pour la plupart de poids normaux (IMC 20-25 : 66 %, obèses : 3 %) la consommation moyenne de boissons était respectivement de 328 ml/semaine (1,6 verre) en boissons sucrées et de 566 ml/semaine (2,8 verres) en boissons light. Or, comparativement aux non consommatrices, les femmes dans le plus haut quartile de consommation de boissons sucrées (› 359 ml/semaine) mais aussi de boissons light (› 603 ml/semaine) ont développé significativement plus de diabète. Le risque est multiplié par 1,3 (1,05-1,71) pour les boissons sucrées et par 2,2 (1,6-3,1) pour les boissons lights. Alors que l’on n’observe pas de surrisque chez les adeptes des purs jus de fruits frais (pressés).
« Il s’agit de femmes éduquées, soucieuses de leur santé - on a très peu d’obèses - et d’un recueil de données de grande qualité. Or la relation reste vraie même quand on censure les 5 premières années de suivi pour écarter l’hypothèse d’une cause inverse. Les femmes en prédiabète étant susceptibles de privilégier les lights, souligne le Dr Clavel. Le surrisque reste significatif après de multiples ajustements (âge, énergie totale absorbée, etc.) et ne peut être totalement expliqué par l’IMC. Les boissons lights ont même un effet plus péjoratif que les boissons sucrées. On a un surrisque de 60 % de diabète pour une consommation de 1,5 l/sem de boissons lights par rapport à une même consommation de 1,5 l/sem de boissons sucrées. Enfin l’analyse suggère que l’impact des boissons lights est d’autant plus marqué en absence de surpoids. » C’est pourquoi, « dans l’attente d’autres données - analyses sur d’autres cohortes, essais randomisés, études fondamentales… que nous appelons de tous nos vœux - il semble prudent d’arrêter de promouvoir les boissons lights, aujourd’hui largement préconisées en remplacement des boissons sucrées. »
(1) R Dhingra et coll. Circulation 2007;116:480-8; PL Lutsey et coll Circulation 2008;117:754-61, JA Nettelton et coll. Diabetes Care 2009;(32)4:688-94.
(2) G Fagherazzi, A Vilier, D Saes Sartorelli et coll. Consumption of artificially and sugar-sweetened beverages and incident type 2 diabetes in the E3N-EPIC cohort. Am J Clin Nutr 2013; doi : 10.3945/ajcn.112.050997
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