La mise à l’insuline des diabétiques de type 2 (DT2) est fréquente : environ 100 000 par an en France, soit plus de 600 000 en tout, soit environ 20 % de l’ensemble des DT2. Mais cela ne débouche pas nécessairement sur un bon contrôle glycémique, et peut s’accompagner, chez certains, d’une prise de poids et d’hypoglycémies.
Après la basale qui, associée à la metformine, est le schéma initial habituel, l’intensification passe classiquement par l’ajout d’une insuline rapide avant un des repas, (surtout le petit-déjeuner). Le passage à 2 puis 3 rapides (basal bolus) est un aboutissement thérapeutique fréquent, avec ses contraintes inhérentes et parfois plus de prise de poids et d’hypoglycémies chez certains patients.
Quelle alternative a-t-on ? Associer des antidiabétiques oraux : les sulfamides sont peu indiqués, les inhibiteurs de la DPP4 ont des effets sur le poids et la réduction des hypoglycémies, mais modestes. Si nous en disposions, les inhibiteurs des transporteurs SGLT2 ont montré des résultats prometteurs dans le cadre d'une telle association. Enfin, l’association d’une basale et d’un arGLP1 est de plus en plus étudiée et pratiquée.
Illustration prometteuse de cette dernière pratique, l’étude DUAL VII porte sur des patients atteints de DT2 non contrôlé par l'insuline basale, chez lesquels une insuline prandiale peut être instaurée. L'objectif est d'évaluer l'efficacité et l'innocuité de l'initiation de l'association insuline degludec - liraglutide à taux fixe (IDegLira), par rapport à un schéma basal bolus (BB), associant insuline glargine (Glar U 100) et aspart ≤ 4 fois par jour.
Cet essai de phase 3b réunit des DT2 insuffisamment contrôlés (profil assez répandu en termes d’IMC, équilibre et ancienneté de diabète, hommes et femmes ) sous glargine (IGlar U100) 20-50 UI/j et metformine. Les patients ont été randomisés soit pour IDegLira ou soit pour BB.
Moins d'hypoglyécémies, perte de poids
Résultat, l'HbA1c a diminué, de 8,2 % à 6,7 % sous IDegLira comme sous BB (différence de traitement estimée à - 0,02 %). Ceci confirme la parfaite non-infériorité de IDegLira par rapport au BB. 70 % des patients sous DegLira et 67 % sous BB ont atteint une d'HbA1c < à 7,0 %.
Le nombre d'épisodes d'hypoglycémie symptomatique grave ou confirmée était plus faible avec DegLira qu'avec BB : RR = 0,39 ; [0,29 ; 0,51]. Le poids a diminué sous DegLira quand il a augmenté sous BB : différence - 3,6 kg [- 4,2 ; - 2,9].
La baisse des glycémies à jeun était similaire. Sur le profil glycémique de 24 heures, les glycémies du dîner et du coucher étaient significativement plus faibles avec le BB. Enfin, la dose quotidienne totale d'insuline était plus faible sous IDegLira (40 UI) qu'avec le BB (84 UI au total, dont 52 basales).
Au total, chez les patients atteints de DT2 non contrôlé sous glargine U 100 et metformine, le traitement par DegLira induit des baisses d'HbA1c comparables au BB, mais avec des taux d'hypoglycémie inférieurs et une perte de poids, versus une prise de poids sous BB.
« Indéniablement cette association de GLP1 quotidien (liraglutide) et d'une basale (dégludec) est très remarquable, commente le Pr Serge Halimi (Grenoble). Rappelons en effet que, si l'on considère le critère atteinte des objectifs HbA1c (<7%) sans prise de poids et sans hypos, la différence est encore plus en faveur de DegLira. Cette association répond ainsi à nombre des problèmes posés par la mise à l’insuline des DT2 mais attention : il s’agit ici de patients en échec de basale uniquement ! »
En effet DegLira répond aux besoins d’une partie des DT2 seulement : ceux chez qui la prise de poids, les HbA1c, sont loin des objectifs, malgré de fortes doses d’insuline et la contrainte de deux (basal plus) à quatre injections par jour (basal bolus). Et qui souffrent d'hypoglycémies bien entendu.
« Plus précisément, la question est : à qui faut-il réserver cette association DegLira, puisqu’il faut éviter le recours trop systématique à des traitements non nécessaires et fort coûteux ? souligne le Pr Halimi. C’est à nous de mieux définir le profil patient type pour éviter la systématisation de ces schémas et puisque les DT2 sont très nombreux – et majoritairement – mis à l’insuline par les médecins généralistes. À nous d’interagir avec eux pour éviter une trop forte pression sur les prescriptions. »
Professeur émérite, Université Grenoble-Alpes, Grenoble
Efficacy and Safety of IDegLira Versus Basal-Bolus Insulin Therapy in Patients With Type 2 Diabetes Uncontrolled on Metformin and Basal Insulin: The DUAL VII Randomized Clinical Trial. Diabetes Care 2018;41:1009–1016
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