Développement de nouvelles techniques

Chirurgie mini-invasive des hémorroïdes

Publié le 14/10/2022
La prise en charge chirurgicale de la maladie hémorroïdaire s’est aujourd’hui profondément transformée, avec le développement des techniques mini-invasives. Quelles sont les évolutions apportées par ces nouvelles techniques chirurgicales ?
Dévascularisation et mucopexie d’une pathologie hémorroïdaire interne : aspect avant et après

Dévascularisation et mucopexie d’une pathologie hémorroïdaire interne : aspect avant et après
Crédit photo : DR

Très fréquente, la maladie hémorroïdaire altère la qualité de vie des patients de façon majeure. Sa prise en charge est donc essentielle et dans un premier temps médicale. En effet, la régulation du transit et les divers topiques, crèmes ou suppositoires, sont utiles pour atténuer des saignements, voire un prolapsus minime des hémorroïdes internes. Les antalgiques et les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont très efficaces sur les douleurs des thromboses.

Mais la prise en charge peut aussi être instrumentale, pour traiter les saignements et/ou le prolapsus. En France, nous disposons de la photocoagulation infrarouge et de la ligature élastique. Ces gestes généralement indolores sont réalisés en consultation, souvent en plusieurs séances. Les complications sont rares si les contre-indications sont respectées, notamment les troubles de l’hémostase et/ou de la coagulation, une immunodépression sévère et/ou un antécédent de radiothérapie pelvipérinéale. Cependant, les patients doivent être avertis de la possible survenue retardée de douleurs, de saignements, voire de rares infections.

La chirurgie ouverte

L’hémorroïdectomie tripédiculaire « ouverte », selon la technique de Edward Milligan (1886-1972) et Clifford Morgan (1901-1986), est réalisée en Europe depuis un siècle. Elle consiste à réséquer le tissu hémorroïdaire, sous anesthésie au bloc opératoire, dorénavant en hospitalisation ambulatoire. Elle présente l’avantage de traiter en un temps les saignements, le prolapsus des hémorroïdes internes et les thromboses, voire les marisques séquellaires, des hémorroïdes externes. De plus, le taux de récidive est faible. Les inconvénients sont la nécessité de réaliser des soins locaux et une longue durée de cicatrisation. En outre, les patients sont souvent asthéniques et douloureux. Ils ont donc un arrêt d’activité de deux à trois semaines, ce qui est une véritable contrainte.

Les premières techniques mini-invasives

Nous disposons maintenant de techniques chirurgicales dites mini-invasives. Elles sont également réalisées sous anesthésie, au bloc opératoire, en ambulatoire.

La première de ces techniques, la plus médiatisée, a été proposée en 1998 par le Dr Antonio Longo (Sicile) : l’anopexie agrafée. Elle repose sur la résection d’une partie de la paroi du bas rectum, à l’aide d’une pince dédiée, permettant de lifter les hémorroïdes internes dans le canal anal. En Amérique du Nord, le Dr Kazumasa Morinaga a proposé en 1995 une technique consistant à repérer à l’aide d’un doppler les artères à visée hémorroïdaire de la paroi du bas rectum, afin de les ligaturer et ainsi dévasculariser le réseau hémorroïdaire interne en aval. Cette technique a été améliorée par l’ajout de mucopexies. Largement pratiquée aujourd’hui, elle a une efficacité similaire à l’anopexie de Longo, tout en étant moins morbide. En effet, il a été reproché à l’anopexie des complications, certes rares mais graves (fistules rectovaginales, cellulites pelviennes, etc.). Avec ces deux techniques, les patients ont moins de douleurs qu’après hémorroïdectomie. De surcroît, il n’y a pas de plaies externes (voir figure), donc pas de soins locaux. Cela permet de réduire l’arrêt d’activité à moins d’une semaine.

Une voie en plein essor

D’autres techniques mini-invasives sont venues enrichir l’offre thérapeutique. Ainsi, la radiofréquence, proposée en 2002 par le Dr Pravin Gupta (Inde), et de l’hémorroïdoplastie laser, mise au point en 2007 par le Dr Ahmet Fatin Karahaliloglu (Turquie). L’objectif est de détruire le tissu hémorroïdaire interne. Là encore, il y a peu de douleurs postopératoires et pas de plaies externes.

Pour finir, les radiologues ont apporté leur contribution avec l’embolisation des artères hémorroïdaires. Elle semble utile en cas de saignements pour lesquels la chirurgie ne paraît pas appropriée.

L’inconvénient avec ces techniques est le taux de récidive de la maladie hémorroïdaire, évalué autour de 20 à 30 % au cours de la décennie suivant le geste. Néanmoins, la perspective de douleurs moindres et d’une reprise d’activité plus rapide explique l’engouement qu’elles suscitent. Il s’agit d’un véritable changement de paradigme ! Il convient maintenant de préciser la place de ses diverses techniques dans l’algorithme thérapeutique. D’après Confucius, « ce n'est pas grave si vous avancez lentement, du moment que vous ne vous arrêtez pas ».

À nous de jouer !

Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph, Institut Léopold Bellan
(1) van Tol RR et al. Colorectal Dis 2020 Jun;22(6):650-62.
(2) Ng KS et al. Ann Coloproctol 2020;36:133-47.
(3) Aibuedefe B et al. Int J Colorectal Dis 2021;36:2041-9.

L’équipe du service de proctologie médico-chirurgicale, sous la direction du Dr Vincent de Parades

Source : lequotidiendumedecin.fr