Une étude suggère pour la première fois que le triclosan pourrait avoir des effets néfastes sur la santé de l’intestin.
« L’exposition au triclosan, un agent antimicrobien largement utilisé, provoque une inflammation chronique de bas grade et aggrave la maladie inflammatoire chronique de l’intestin ainsi que le cancer du côlon dans des modèles souris », précise au « Quotidien » le Pr Guodong Zhang, chercheur à l’université du Massachusetts à Amherst (États-Unis) qui a dirigé l’étude publiée dans la revue « Science Translational Medicine ».
Un polluant
Le triclosan est une molécule de synthèse très largement utilisée en tant que conservateur et antimicrobien dans de nombreux produits cosmétiques et d’hygiène (dentifrices, bains de bouche, gels douche, déodorants, crèmes hydratantes…), et dans une moindre mesure dans des ustensiles de cuisine, des textiles et des jouets. Une étude américaine (NHANES 2003-2004) a montré que le triclosan est présent dans l’urine de 75 % de la population testée. Le triclosan figure parmi les 10 principaux polluants des rivières américaines.
Haixia Yang et coll. ont examiné si l’ingestion quotidienne de faibles doses de triclosan pouvait affecter la santé intestinale. Ils ont étudié cela chez des souris exposées pendant 3 semaines à de faibles doses de triclosan dans leur nourriture (10 à 80 ppm).
Leurs résultats montrent que cette exposition provoque chez les souris une inflammation systémique et colique de bas grade (pour une dose de 80 ppm) ; elle majore l’inflammation du côlon dans deux modèles murins de maladie inflammatoire chronique de l’intestin, ou MICI (à 10 et 80 ppm) et elle aggrave le cancer du côlon associé à la colite (notamment à 80 ppm). Ils montrent en outre que l’ingestion du triclosan (80 ppm, seule dose étudiée) modifie le microbiote des souris avec réduction des Bifidobacterium et perturbe la barrière intestinale via une baisse de l’occludine ; ceci favorise une translocation des produits bactériens de la lumière intestinale vers la circulation sanguine, et active le récepteur TLR 4 (Toll-like receptor 4) - un médiateur important des communications hôte-microbiote.
Un rôle du microbiote
Puisque le triclosan n’affecte pas les souris dépourvues de bactéries dans l’intestin, ni les souris génétiquement privées du TLR4, « cela prouve que le microbiote intestinal est requis pour les effets biologiques du triclosan, souligne le Pr Zhang. Mais nous ignorons quels sont les rôles fonctionnels précis du microbiome intestinal et quels types de bactéries sont en cause. »
Bien que cette étude se limite à des modèles murins, ces résultats plaident pour examiner plus amplement les effets du triclosan sur la santé humaine afin de ré-évaluer éventuellement la législation. En effet, indique le Pr Zhang, « de précédentes études ont montré qu'une voie d'exposition majeure au triclosan vient de l'usage des dentifrices. Dans nos études, nous avons mesuré (par LC-MS/MS) la concentration plasmatique du triclosan et de ses métabolites chez les souris exposées au triclosan, et nous avons constaté que les concentrations plasmatiques sont similaires à celles décrites chez des volontaires humains ». Il convient de souligner que le triclosan ne cause pas le cancer du côlon. Mais ces résultats, selon l’équipe, « suggèrent que les individus ayant une MICI et un cancer du côlon, ou prédisposés à ces maladies, pourraient être plus vulnérables aux effets nocifs du triclosan ».
Science Translational Medicine, 30 mai 2018, Yang et coll.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024