DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA LÉSION de la moelle épinière, responsable de tétraplégie (dans 1/3 des cas) et de paraplégie chez les patients, reste l’un des grands défis non résolus de la médecine.
Le meilleur espoir pour réduire les séquelles neurologiques du traumatisme médullaire porte sur la prévention de la « lésion secondaire ». Durant les 24 premières heures après le traumatisme, il survient notamment une nécrose hémorragique progressive qui agrandit nettement le volume de tissu neural initialement détruit.
De précédentes études ont montré que l’apparition de canaux calcium sur les cellules endothéliales capillaires, favorisée par la protéine SUR1 (Sulfonylurea Receptor 1) qui est encodée par le gène Abcc8, joue un rôle important dans la nécrose hémorragique progressive.
Dans une nouvelle étude, l’équipe du Dr J. Marc Simard (Université du Maryland, Baltimore, États-Unis) a tout d’abord étudié des échantillons tissulaires de moelle épinière provenant de patients décédés après une lésion médullaire traumatique récente (n = 7), ainsi que des échantillons médullaires de rats et de souris soumis expérimentalement à une lésion médullaire. Elle a pu constater que le profil régional et cellulaire de la transcription du gène Abcc8 après la lésion médullaire est similaire chez les humains et les rongeurs, avec une augmentation des taux d’ARNm Abcc8 et de protéine SUR1.
Prévention de la lésion hémorragique progressive.
Ils ont ensuite montré, chez le rat et la souris, qu’en inhibant l’expression du gène Abcc8 au moyen d’un ADN antisens administré en intraveineux pendant vingt-quatre heures en commençant quinze minutes après la lésion médullaire, il est possible de prévenir la nécrose hémorragique progressive et de réduire le volume des lésions (à un quart ou un tiers du volume observé chez les témoins), ce qui se traduit par une bien meilleure fonction neurologique chez les rongeurs. Aucun effet néfaste de l’ADN antisens n’est observé.
Ces effets bénéfiques de l’inhibition du gène Abcc8 sont associés à la prévention de la mort nécrotique des cellules endothéliales capillaires.
Ils ont aussi confirmé que le traitement par glibenclamide, un médicament inhibant les transporteurs ABC tels que la protéine SUR1, réduit de façon similaire le volume des lésions après la lésion traumatique chez le rat.
« La possibilité d’administrer un antisens-Abcc8 pour réduire l’expression de novo du canal calcium-ATP régulé par SUR-1, couplé à l’administration du glibenclamide pour bloquer les canaux déjà exprimés après la lésion, est une stratégie prometteuse pour prévenir les séquelles dévastatrices du traumatisme médullairechez l’homme », concluent les chercheurs.
« C’est la première démonstration chez l’homme que le mécanisme faisant intervenir le canal SUR1 est actif chez les patients victimes de lésion médullaire », déclare au « Quotidien » le Dr Simard. « C’est aussi la première démonstration que l’inactivation du gène encodant la protéine SUR1 (Abcc8) a un effet bénéfique après la lésion médullaire, ajoute-t-il. Enfin, nous avons démontré qu’un petit oligodésoxynucléotide (antisens contre l’ARNm Abcc8) peut être administré pendant seulement une brève période et qu’il cible sélectivement les cellules endothéliales capillaires et les empêche de se rompre et de saigner. »
Des essais cliniques.
« Prévenir la nécrose hémorragique progressive, le mécanisme le plus destructeur de la lésion secondaire après un traumatisme médullaire, avec ce simple traitement pourrait avoir un impact immense pour améliorer l’évolution des patients atteints de lésion médullaire. » Puisque les antisens administrés pendant vingt-quatre heures sont sûrs et bien tolérés, le Dr Simard estime que des essais cliniques pourraient débuter sans trop tarder.
Cette approche thérapeutique pourrait aussi s’appliquer pour le traumatisme cérébral et l’AVC. « Bien qu’ils aient été découverts dans la lésion médullaire, ces mêmes mécanismes sont en jeu également dans la lésion cérébrale traumatique et l’AVC, selon de récents travaux », laisse entrevoir le Dr Simard.
Science Translational Medicine, 21 avril 2010, Simard et coll.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024