Le virus SARS-CoV-2 circulait en Italie bien avant la détection du « patient zéro » le 22 février dernier à Codogné. C'est ce que démontrent trois études transalpines qui ont remonté le temps : l'une sur les eaux usées où l’Institut supérieur de la santé a retrouvé des traces de coronavirus en décembre 2019 à Milan, Turin et Bologne ; une très récente ayant montré a posteriori qu'un petit garçon de 4 ans était positif au virus en novembre 2019 ; et une autre menée par l’Institut national de cancérologie de Milan qui est allée jusqu'à l'été 2019.
« Nous avons eu l'idée d'analyser des échantillons de sang prélevés en 2019 chez des volontaires inscrits dans un programme de recherche sur le cancer du poumon, explique le Pr Gabriella Sozzi, qui a dirigé l'étude à l'Institut de cancérologie. Nos résultats suggèrent d'appliquer cette méthode à la recherche sur les virus émergents et les pandémies car elle permet de dater leur apparition, leur mode de transmission et leur dynamique. »
Alerte clinique
C'est ainsi qu'une autre étude menée à l’université de Milan, publiée la semaine dernière dans la revue « Emerging Infectious Diseases », a analysé 39 échantillons d’écouvillons de patients prélevés entre septembre 2019 et février 2020. Les chercheurs ont diagnostiqué un petit garçon de 4 ans positif au SARS-CoV-2 en novembre 2019. L’enfant avait développé des symptômes similaires à ceux de la grippe et des éruptions cutanées typiques de la rougeole. Or les tests à l'époque avaient indiqué que le petit garçon n’avait pas contracté la rougeole.
Pourquoi les chercheurs ne sont-ils pas remontés jusqu'en 2018 ? « C’est en décembre 2019 et janvier 2020 que plusieurs généralistes et médecins hospitaliers ont commencé à observer des formes étranges de pneumonie interstitielle qui n’avaient rien à voir avec la grippe et les autres maladies d’origine respiratoires que l’on connaît », ajoute le Pr Gian Vincenzo Zuccotti qui a dirigé la récente recherche à l'université milanaise.
Pour le Pr Pierangelo Clerici, président de l’Association des médecins microbiologistes- infectiologues italiens, dater l’apparition du virus avant 2019 n’est pas simple : « Il faudrait récupérer des échantillons biologiques de patients chinois ou originaires du sud-est asiatique qui ont été examinés en milieu hospitalier pour une raison ou pour une autre à cette période. »
Une circulation silencieuse
Le virus a ainsi commencé à circuler en Italie d’abord avec quelques cas circonscrits, avant que des mini-clusters ne se multiplient. « Avant la première vague, le virus circulait silencieusement, il y avait probablement des asymptomatiques ou paucisymptomatiques, puis le virus s’est diffusé rapidement et les hôpitaux ont été saturés », note le Pr Zuccotti.
L’apparition du virus en Italie pose la question de la surveillance des virus émergents. Pour le Pr Pierangelo Clerici, « cette pandémie nous a appris qu’il faut organiser un système de surveillance douze mois sur douze (...). Les instituts de virologie de référence devront stocker tous les mois des échantillons biologiques de patients, même sains, susceptibles d'avoir été contaminés après un voyage à l'étranger. Nous devons anticiper les virus ».
Dispositifs de surveillance
Ainsi, quand peut-on supposer qu’il s’agit d’un nouveau virus ? Pour le Pr Clerici, « lorsque le virus s’attaque à toutes les tranches d’âge ». Faut-il renforcer les dispositifs de vigilance actuels ? « Les pandémies liées au saut d’espèce vont probablement nous accompagner, il faut les anticiper, indique l'infectiologue. Normalement les pandémies sont cycliques, elles éclatent plus ou moins tous les huit ans mais ce laps de temps s’est peut-être raccourci ». Pour dresser un tableau des virus émergents, le microbiologiste propose que l’OMS désigne deux centres de culture cellulaire par pays. « La culture cellulaire est la première étape pour connaître un virus (...), c’est la seule façon d’anticiper la diffusion des virus à grande échelle », préconise le Pr Clerici.
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