Au cours de l'épidémie d'infection par le virus Ebola qui a eu lieu entre 2018 et 2020 en République démocratique du Congo, la survie moyenne des patients a été améliorée par un large recours aux anticorps monoclonaux. Selon des données publiées dans The Lancet Infectious Diseases, ces nouveaux traitements seraient toutefois associés à une immunité à long terme plus faible, par rapport à celle observée chez des patients non traités, ce qui augmente le risque de réinfection. Ces résultats, qui ne remettent pas en cause l’intérêt de ces traitements en phase aiguë, sont importants pour informer et suivre les patients sortis des centres de traitement.
Ce travail a été mené par un le groupe d'étude Vainqueurs d'Ebola, avec un financement de l'ANRS-MIE, de l'Inserm et de l’Institut pour la recherche et le développement à partir d'une cohorte prospective de 787 patients ayant survécu à une infection par le virus Ebola, confirmée par PCR.
Un quart des patients séronégatifs
Ces survivants ont été suivis pendant 12 à 38 mois, avec des visites médicales programmées au bout d’un, trois, six, 12,18 et 38 mois. Les données concernant la prise ou non d'anticorps monoclonaux étaient disponibles pour 358 survivants de la cohorte. Certains malades ont bénéficié d'un des traitements autorisés dans le cadre d'une épidémie : ansuvimab (Ebanga, Ridgeback Biotherapeutics), le cocktail d'anticorps REGN-EB3 développé par Inmazeb, le Zmapp (Mapp Biopharmaceutical) ou le remdesivir.
Près d’un quart (24 %) des survivants traités était séronégatif à leur sortie du centre de traitement. De manière générale, les marqueurs de l'efficacité de la réponse immunitaire (concentration en anticorps dirigés contre des nucléoprotéines virales ou contre la protéine VP-40) avaient tendance à diminuer de façon linéaire avec quelques fluctuations dans l'ensemble de la cohorte, mais de façon plus prononcée chez les patients traités.
Les anticorps dirigés contre les glycoprotéines spécifiques du virus, en particulier, baissaient très rapidement. « Nous avons aussi constaté que ces mêmes patients, lors du pic de leur infection, requéraient un plus grand nombre de cycles de PCR pour que la présence de virus ne soit détectable », précisent les auteurs, signe que la charge virale était moins élevée chez ces patients et le risque de sévérité plus faible. Les chercheurs indiquent en outre que ces phénomènes étaient plus marqués chez les patients masculins.
Des rechutes et encéphalites
Les survivants qui ont reçu de l'ansuvimab avaient une probabilité de 53,6 % d'être séropositifs au bout de 36 mois, des chiffres qui s'élevaient à 73,5 %, 76,8 % et 78,5 %, respectivement pour le REGN-EB3, le remdesivir, et le Zmapp. À titre de comparaison, 95,6 % des survivants de la cohorte Postebogui (non traités) étaient séropositifs au bout de 36 mois de traitement. La diminution des anticorps anti-Ebola était la plus rapide chez les patients traités par ansuvimab, mais la différence n'était pas statistiquement significative. Au sein de leur cohorte, les auteurs ont relevé un cas de rechute chez un patient traité par anticorps monoclonal, ainsi que deux cas de décès causés par une méningite. Des traces du virus ont été retrouvées dans le liquide céphalorachidien d'un de ces deux patients. « La diminution rapide de l'immunité dirigée contre le virus favorise son maintien dans des sites immunologiquement préservés », préviennent les auteurs.
Ces résultats « indiquent que les anticorps monoclonaux ont un effet négatif sur la production d'anticorps dirigés contre Ebola par les survivants, ce qui augmente le risque de réinfection ou de réactivation de l'infection », déduisent les auteurs. Ils préconisent de procéder à un suivi sérologique de survivants traités, afin de décider s'il est nécessaire de les vacciner pour améliorer leur immunité. Il reste toutefois « crucial de conduire davantage de recherches sur l'impact des traitements par les anticorps monoclonaux » dans le contexte d'épidémie d'infections par le virus Ebola, insistent les auteurs.
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