DE NOTRE CORRESPONDANTE
LE NIH américain a lancé en 2007 un vaste projet multicentrique, dénommé Human Microbiome Project, qui vise à caractériser le microbiote humain dans plusieurs sites du corps (bouche, gorge, nez, peau, tube digestif, tractus urogénital féminin) avec plusieurs prélèvements au cours du temps, afin de mieux comprendre la relation entre la maladie et les changements du microbiote humain.
Une étude sur le microbiote vaginal est publiée par Gager et coll. « Cette étude est une première phase qui porte sur des femmes en bonne santé ; dans une seconde phase nous examinerons des femmes qui ont développé une vaginose bactérienne », précise le Dr Jacques Ravel (université de Maryland à Baltimore) qui a co-dirigé l’étude.
De précédents travaux reposant sur des prélèvements vaginaux uniques avaient montré que les populations bactériennes sont dominées par des bactéries productrices d’acide lactique, lesquelles servent à créer un environnement acide limitant la croissance des pathogènes. Ces populations peuvent être regroupées en cinq communautés distinctes ; la prévalence de ces groupes varie selon les ethnies.
Gager et coll. ont examiné les échantillons vaginaux de 32 femmes en bonne santé, auto-prélevés deux fois par semaine pendant quatre mois (soit 1 000 échantillons). Ces femmes maintenaient un journal quotidien de leurs activités et de leur hygiène et ce journal était envoyé chaque semaine au coordinateur de l’étude.
Les chercheurs ont utilisé une approche génomique pour caractériser la composition du microbiote vaginal au cours du temps chez ces femmes en bonne santé.
Des variations considérables
1) « Le principal résultat est que le type et l’abondance des microbes trouvés dans le vagin peut varier considérablement sur de courtes périodes chez certaines femmes, tout en restant constant chez d’autres femmes. Par exemple, trois jours après un prélèvement, la composition du microbiote peut être différente à 99 %, mais chez certaines femmes elle ne change pas. Nous avons pu montrer que ces changements coïncident souvent mais pas toujours avec les règles et l’activité sexuelle. Donc, le microbiome vaginal est particulier à une femme, ou éventuellement à un groupe de femme », explique le Dr Ravel.
2) Certaines communautés bactériennes apparaissent plus stables que d’autres.
3) La fonction de chaque communauté bactérienne est probablement maintenue dans de nombreux cas en dépit des changements de sa composition. Les chercheurs ont examiné au cours du temps le métabolome de chaque communauté bactérienne chez 5 femmes : la production des métabolites, par exemple l’acide lactique, reste souvent inchangée.
Des implications
1) Un changement dans les communautés bactériennes n’indique par forcement une pathologie et peut être normal. Cela renforce la notion que pour diagnostiquer correctement une vaginose bactérienne, une seule analyse à un moment donné est clairement insuffisante ; un examen répété pourrait conduire à une baisse de leur diagnostic.
2) « Une autre implication majeure est que nous allons pouvoir commencer à évaluer comment ce changement peut prédire une susceptibilité et un risque vis-à-vis de l’infection », laisse entrevoir le Dr Ravel.
3) Enfin, cela pourrait conduire à une médecine plus individualisée avec une prise en charge personnalisée de l’écosystème. « En comprenant les différences dans les types de bactéries trouvées chez les femmes, et comment celles-ci peuvent changer au cours du temps, on pourrait développer différents types de probiotiques qui seraient plus efficaces pour couvrir la diversité des femmes trouvées dans la population générale », explique le Dr Larry Forney (université d’Idaho) qui a co-dirigé l’étude.
Très complexe
« Le microbiome vaginal est bien plus complexe et divers qu’on ne l’imaginait, concluent deux éditorialistes, les Drs Witkin et Ledger (Weil Cornell Medical college, NY). Dans un contexte hétérogène de normalité, si l’on veut parvenir à déterminer les conditions qui prédisposent les femmes à développer une infection des voies génitales, il faudra probablement explorer un volume important de données. »
Gajer et coll., Witkin et coll. Science Translational Medicine, 2 mai 2012.
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