Alors que la barre des 21 000 décès et des 165 000 contaminations détectées a été franchie, l’Italie est prête à explorer toutes les pistes et à entendre tous les avis pour combattre l’épidémie de SARS-CoV-2.
Après avoir déjà autorisé quatre catégories d’essais cliniques - favipiravir (Avigan), tocilizumab, remdesivir et l’association lopinavir-ritonavir – l’Agence italienne du médicament (AIFA) a inséré un nouveau médicament dans sa liste officielle : l’héparine de bas poids moléculaire.
Les essais cliniques commenceront dans les prochains jours sur 300 patients hospitalisés dans quatorze centres hospitaliers italiens disséminés sur tout le territoire. Une dose journalière intermédiaire d’énoxaparine sodium biosimilaire (6000, 8 000 ou 10 000 UI selon le poids du patient) sera administrée par voie sous-cutanée à un groupe de cent patients. En revanche, le deuxième groupe sera soigné avec un dosage plus faible, l’équivalent de 4 000 UI habituellement utilisé en prévention des événements thromboemboliques.
Des éléments à l'anapath
Selon des anatomopathologistes italiens qui ont réalisé des prélèvements sur des patients décédés : « Le problème principal n’est pas le virus mais la tempête immunitaire qui détruit les cellules attaquées par le virus. Le problème est cardiovasculaire et non pas respiratoire. Les patients sont placés en soins intensifs pour des complications thromboemboliques, notamment (mais pas seulement) d’origine pulmonaire. Plusieurs patients décédés dont des quadragénaires, ont eu des poussées de fièvre importantes qui ont été mal soignées pendant 10 à 15 jours : l'inflammation a tout détruit et préparé le terrain pour la formation de thrombus », affirme l’équipe qui veut maintenant enquêter sur les décès de patients relativement jeunes et sains pour rédiger une carte d’identité de la maladie. L’idée est de réaliser un tableau pour chaque patient, des symptômes, des traitements administrés et éventuellement, des maladies ou complications pathologiques avant le décès pour dresser un historique de la maladie et comprendre les implications et complications du Covid-19.
Une réponse immunitaire qui stimule la coagulation
« L’altération de la coagulation et les complications thrombotiques jouent un rôle important, probablement essentiel, explique pour sa part le Pr Francesco Marongiu directeur de l’école de spécialisation en médecine interne de l’université de Cagaliari, impliqué dans les travaux sur l’héparine et le Covid-19. Nous pensons que les patients atteints de Covid-19 font une embolie pulmonaire, il se peut donc que la présence du virus déclenche une réponse immunitaire importante qui provoque la coagulation, notre objectif est de casser le cercle vicieux " réponse immunitaire-coagulation " avec un anticoagulant ».
Pour développer sa théorie, le Pr Marongiu s’est appuyé sur une étude publiée par des spécialistes chinois en février dernier dans la revue scientifique « Journal of thrombosis and haemostasis ».« L’étude chinoise décrit l’altération de la coagulation d’un groupe de 138 patients atteints de pneumonie déclenchée par le Covid-19, rapporte-t-il. Nous interprétons les résultats différemment. La présence du virus a pu déclencher une réponse immunitaire au niveau des cellules, je pense aux lymphocytes et aux monocytes qui libèrent lorsqu’ils sont stimulés localement, de grandes quantités de médiateurs de l’inflammation qui peuvent activer les processus de coagulation du sang ».
Des protocoles en Italie à base d'héparine
Sans attendre le feu vert de l’AIFA, plusieurs centres hospitaliers italiens ont déjà commencé à traiter quelques patients par héparine, comme l’hôpital de Pérouse en Ombrie qui a mis en place un protocole destiné aux malades à domicile placés en quarantaine. « Nous leur administrons une dose d’héparine en association avec l’hydroxychloroquine », explique le Pr Cecilia Becattini, médecin interniste et membre du comité scientifique de la Région de la Ombrie. À Milan, l’hôpital Niguarda a également lancé son propre protocole à base d’héparine depuis quelques semaines. « Cet anticoagulant peut effectivement empêcher le virus d’arriver aux cellules mais attention car ce médicament peut également avoir des effets secondaires importants », avertit le Pr Carlo Perno, virologue et directeur du laboratoire d’analyses de l’hôpital Niguarda.
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