L’arrivée du SARS-CoV-2 a suscité de fortes craintes dans le milieu sportif. Ce nouveau virus, de par son tropisme cardiaque, a la fâcheuse capacité d’induire une potentielle myocardite. Cette affection, majoritairement bénigne, peut se compliquer de troubles du rythme sévères, particulièrement lors d’efforts physiques intenses, pouvant aboutir à l’extrême à une mort subite. L’inquiétude fut donc d’assister sur les terrains de sport à une recrudescence de décès consécutifs à cette inflammation du myocarde.
De ce fait, de nombreuses études se sont concentrées sur les caractéristiques de la myocardite post-Covid chez l’athlète. L’une d’entre elles, publiée récemment dans le « JAMA Cardiology », a permis de déterminer finement son incidence − évaluée à un peu plus de 2 % − grâce à l’utilisation systématique de l’IRM cardiaque, l’examen de référence pour le diagnostic de cette pathologie.
Myocardites asymptomatiques
Pour cela, près de 1 600 sportifs de 13 universités américaines testés positifs au Covid par PCR à la mi-décembre 2020 ont tous bénéficié, en plus d’une évaluation clinique, d’une batterie d’examens : dosage de la troponine, ECG, échographie et surtout d’une IRM cardiaque. Parmi eux, 37 athlètes (2,3 %) ont reçu un diagnostic positif de myocardite, dont seulement neuf présentaient des signes cliniques (douleurs thoraciques, dyspnée ou palpitations). Les autres étaient tous asymptomatiques : huit avaient une anomalie à l’ECG, à l’échographie ou un taux de troponine élevé, et 20 uniquement des signes d’inflammation du myocarde à l’IRM cardiaque. Aucun trouble du rythme ni décès n’a été observé.
« Cette étude confirme les résultats d’autres publications sur la survenue de myocardite dans cette population, relève le Dr Christophe Hédon, cardiologue du sport au CHU Arnaud de Villeneuve à Montpellier. Cette proportion − estimée entre 2 et 3 % − n’est pas négligeable mais elle ne correspond pas à l’hécatombe que l’on craignait au début de la pandémie. »
Cette faible incidence a donc de quoi rassurer les acteurs du milieu sur le risque d’assister à une désertification des terrains de sport par un grand nombre d’athlètes. En effet, selon les recommandations actuelles, un sportif présentant une myocardite virale doit arrêter de pratiquer sa discipline pendant trois à six mois, en raison du risque d’un potentiel trouble du rythme et donc de mort subite.
Place de l’IRM
Toutefois, ces recommandations concernent seulement les inflammations du myocarde symptomatiques, c’est-à-dire avec des signes cliniques comme une douleur thoracique, une dyspnée, des palpitations ou encore un ECG anormal. Or, dans cette étude, « la majorité des athlètes testés positifs au Covid présentant une myocardite étaient asymptomatiques et plus de la moitié ont été diagnostiqués par l’intermédiaire d’une IRM cardiaque », relève le cardiologue.
Cela signifie-t-il que chaque sportif testé positif au Covid doit bénéficier systématiquement d’une IRM cardiaque ? « Certainement pas, affirme le Dr Hédon. Il semble disproportionné de réaliser cette imagerie à tous les athlètes Covid positifs compte tenu de son coût, de sa faible accessibilité et de la variabilité d’interprétation des images obtenues ». Par ailleurs, à ce jour, aucune étude ne permet de savoir si une myocardite cliniquement silencieuse a autant de risque de se compliquer par des troubles du rythme qu’une myocardite symptomatique. Cet examen, indispensable dans l’exploration et le suivi d’une inflammation du myocarde cliniquement parlante, est en revanche superflu comme outil de dépistage.
Respecter les 10 règles d’or
Fort de ce constat, le cardiologue rappelle qu’il faut surtout « mettre l’accent sur l’apprentissage du massage cardiaque et la mise à disposition de défibrillateurs automatiques dans un maximum d’infrastructures sportives ». En témoigne l’arrêt cardiaque du joueur danois Christian Eriksen le 12 juin dernier lors de l’Euro de football qui a été récupéré grâce à la réactivité de ses coéquipiers et du staff médical. À savoir que, dans ce cas précis, aucune cause n’a été retrouvée pour le moment, et que plus généralement, la mort subite du sportif concerne moins de 2 000 athlètes par an en France.
Il faut également « mettre en avant la promotion des 10 règles d’or définies par les cardiologues du sport », ajoute le spécialiste. Comme ne pas faire d’exercice physique en cas de fièvre ni dans les huit jours qui suivent un épisode grippal ou encore réaliser un bilan médical avant de reprendre une activité sportive intense chez les plus de 35 ans. « Le respect de ces mesures sauvera plus de vies que la réalisation d’une IRM cardiaque systématique », conclut le Dr Hédon.
C. J. Daniels et al, JAMA Cardiol, 2021. doi:10.1001/jamacardio.2021.2065
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